L’Association des Maires de France (AMF) voit d’un œil favorable une évolution de la police municipale. Mais le choix d’élargir les prérogatives judiciaires des policiers municipaux pour renforcer leur action sur le terrain doit appartenir aux maires, selon le principe de libre administration des collectivités locales. Pour autant, la proposition de loi visant à étendre les prérogatives judiciaires des polices municipales, déposée le 4 juin 2025 par Éric Ciotti, député des Alpes-Maritimes et président du groupe Union des droites pour la République (UDR), tend à créer un officier de police judiciaire (OPJ) municipal. Si elle était votée, les policiers municipaux pourraient constater par procès-verbal les infractions donnant lieu à une amende forfaitaire délictuelle commises sur le territoire communal, et ils seraient placés sous l’autorité et le contrôle du procureur de la République, auquel ils rendraient compte.
« Cet OPJ municipal consisterait en un OPJ bridé dans le cadre d’une judiciarisation limitée », précise l’AMF, qui rappelle les problèmes que ce nouveau statut soulèverait : risque de subordination accentuée de l’OPJ municipal à l’autorité judiciaire, notation obligatoire par le procureur de la République, risque d’élargissement du champ judiciaire par la compétence OPJ, disproportion entre les pouvoirs OPJ et la finalité minimaliste recherchée…
L’association d’élus prône donc un autre type de judiciarisation limitée : celui de « policier municipal avec fonctions judiciaires », pris sur le modèle du garde champêtre. Relevant des catégories A, B et C, il pourrait, sur la base d’une liste de délits forfaitisés, être habilité à constater et à pratiquer la procédure d’amende forfaitaire délictuelle. Il pourrait effectuer diverses auditions, saisies, perquisitions et enquêtes – actes judiciaires normalement réservés aux OPJ. Il pourrait notamment consulter les fichiers restreints de traitement d’antécédents judiciaires (TAJ), de véhicules assurés (FVA) et de personnes recherchées (FPR), visiter les véhicules pour la constatation de certains délits routiers ou encore procéder à des relevés d’identité.
Mais le policier municipal à fonctions judiciaires n’aurait à réaliser aucun acte d’enquête complémentaire à la procédure d’amende forfaitaire délictuelle. En effet, « si les missions judiciaires des polices municipales doivent évoluer, c’est uniquement pour prolonger l’action de police de proximité, où le maintien de la présence sur la voie publique reste une priorité et où la subordination à l’autorité judiciaire est strictement encadrée », précise l’AMF qui souhaite que l’absence d’acte d’enquête figure dans la loi.
Simple faculté
Toutefois, même si constituer « un champ de prérogative fermé par une fonction judiciaire additionnelle » atténue les risques, l’extension des prérogatives judiciaires place de fait les policiers municipaux sous l’autorité hiérarchique du parquet et non plus sous celle du maire. C’est pourquoi l’AMF préconise que la création d’un policier municipal à fonctions judiciaires soit une simple faculté pour le maire, de même que celle d’une police municipale et de son armement.
Les polices municipales doivent rester complémentaires aux forces de sécurité intérieure et en aucun cas leur être subordonnées ni substituées. Comme pour les gardes champêtres (dont l’AMF souhaite que les prérogatives englobent la mise en fourrière de véhicules ou l’accès aux images de vidéoprotection), la finalité de leurs missions doit demeurer la police de proximité et la tranquillité publique.
Entre autres, l’AMF demande que les conventions de coordination soient revues et que les maires soient mieux informés des événements qui se produisent sur leurs communes.
L’association insiste sur la nécessité d’un engagement fort de l’État dans ses missions régaliennes de sécurité et de justice, afin d’éviter un transfert de charges supplémentaire vers les communes et les intercos. Quant au produit des amendes appliquées par les polices municipales, l’AMF revendique, une fois encore, qu’il soit reversé aux collectivités concernées et non versé au budget général de l’État.
Martine Courgnaud – Del Ry