Secrétaires de mairie, gardes champêtres, chevilles ouvrières oubliées des mairies

Publié le 25 novembre 2022 à 8h40 - par

Métiers « à tout faire » au nom resté désuet, les secrétaires de mairie et les gardes champêtres sont le bras armé des petites mairies, en prise directe avec la population, mais souffrent d’un manque cruel de reconnaissance.

Secrétaires de mairie, gardes champêtres, chevilles ouvrières oubliées des mairies

Secrétaire de mairie depuis trente-cinq ans dans une commune bretonne de 390 habitants, Jannik Nicole a toujours « la foi » en son métier, un métier « de passion » mais qui peine à recruter et peut « faire peur aux jeunes », reconnaît-elle lors d’un forum organisé au congrès de l’Association des Maires de France (AMF). En cause ? La polyvalence des tâches, entre préparation du budget communal, conseils municipaux, actes d’urbanisme, état civil, marchés publics, assistance à la maîtrise d’ouvrage ou élections… Sans parler des centaines de mails envoyés chaque semaine par les administrés, qui exigent souvent une réponse « à la minute ».

« Il faut être bon partout et si on se loupe, ça peut avoir des conséquences importantes », reconnaît Christophe Iacobbi, maire d’Allons (Alpes-de-Haute-Provence).

« Couple, binôme », le lien qui unit maire et secrétaire est jugé indispensable à la bonne marche des communes, souvent de moins de 2 000 habitants, en particulier depuis que la dématérialisation et l’« e-administration » ont éloigné les services de l’État, comme les trésoreries, des territoires ruraux.

« Sans le couple maire-secrétaire, tout explose. Les gens ne se rendent pas compte de leur travail et les engueulent même régulièrement », observe Pierrette Daffix-Ray, maire d’Youx (Puy-de-Dôme).

« Depuis quelques années, tout s’est complexifié. La dématérialisation a accéléré le temps, on doit tout gérer en même temps, on passe de la compta à l’accueil, on est bousculé, stressé, on n’a pas le temps de se poser sur un dossier », reconnaît Jannik Nicole.

Autrefois agents de catégorie A, les secrétaires de mairie sont aujourd’hui le plus souvent recrutées en catégorie C et souffrent d’une absence de reconnaissance statutaire qui rend leur métier peu attractif, alors que 42 % d’entre elles devraient partir à la retraite d’ici 2030, selon l’AMF.

Moins de 1 000

Souvent qualifiées de « couteaux suisses », elles ne bénéficient paradoxalement d’aucune formation nationale harmonisée. De plus, leurs faibles rémunérations obligent souvent les maires à compléter leur traitement par des primes. Autre métier en tension de la fonction publique territoriale, celui de « garde-champêtre », bras armé du maire dans l’application de ses pouvoirs de police (code de la route, stationnement…). « Notre métier a été oublié au profit de celui de policier municipal », regrette, en uniforme, Christian Comin, président de la Fédération nationale des gardes-champêtres.

Alors qu’en 1958, l’Hexagone comptait encore 20 000 gardes-champêtres, ils sont moins de 1 000 aujourd’hui. Parallèlement, les policiers municipaux, autrefois réservés aux villes, sont aujourd’hui quelque 25 000. Contrairement au policier municipal, le garde-champêtre, qui possède « 150 domaines d’attribution », est lui doté d’un pouvoir de police de l’environnement, qui inclut la chasse, la pêche, les forêts, la pollution de l’eau ou la prévention des inondations.

« Les gardes-champêtres étaient parmi les premiers engagés dans les incendies de forêt cet été pour faire respecter les restrictions d’accès à certains massifs forestiers », rappelle Christian Comin.

À l’instar des secrétaires de mairie, le métier n’a pas de concours ni de formation identifiée, et a beaucoup évolué au fil du temps, loin de l’image du crieur public ou du cantonnier.

« Nous sommes des agents de catégorie C alors que nous ne sommes plus de simples personnels d’exécution. Nous effectuons de plus en plus de tâches de rédaction d’actes administratifs et de la veille juridique », poursuit M. Comin, pour qui « les grilles de salaires sont à revoir ».

Car la demande existe. Certaines villes, comme Nancy, envisagent même de recruter des gardes-champêtres.

« La crise sanitaire a précipité les aspirations de la population au calme, à la place de la nature en ville, et j’ai décidé de recruter des gardes-champêtres urbains dont la mission sera articulée autour des enjeux liés à l’environnement et au cadre de vie », explique le maire Mathieu Klein.

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