En France, 5 418 communes sont dotées d’un hôtel (15,6 % du total) quand 28 289 accueillent au moins une offre de location Airbnb (81 %), révèle une étude de l’Institut Terram publiée en octobre 2025. « La diffusion des meublés touristiques s’avère donc quatre à cinq fois plus large », soulignent ses trois auteurs.
Dans les communes de moins de 500 habitants, seules 5 % disposent d’un hôtel mais plus des deux tiers d’une offre Airbnb. Le revenu médian des hôtes atteint 3 800 euros annuels, équivalant souvent à un treizième, voire à un quatorzième mois de salaire, précise l’étude. Dans les communes de 1 000 à 3 000 habitants, la présence d’Airbnb s’accompagne d’une densité accrue de commerces et services. Ainsi, les bourgs sans réservation recensent en moyenne 3,5 commerces et services de base, contre 7 dans les localités où les nuitées dépassent 10 000 par an et plus de 10 là où les nuitées dépassent 20 000 par an. L’an dernier, la plate-forme a reversé 218 millions d’euros de taxe de séjour à 25 700 communes, soit + 16 % par rapport à 2023. La collecte a concerné 25 700 communes, contre 24 500 l’année précédente, et 315 villes ont perçu plus de 100 000 euros chacune, indique l’Institut Terram.
La carte Airbnb de la France touristique
L’implantation d’Airbnb épouse les grands pôles d’attractivité nationale : littoraux, montagne, patrimoine, grandes métropoles. Les communes littorales de la côte aquitaine dépassent fréquemment 5 000 nuitées pour 1 000 habitants, culminant même à 70 000 à Moliets-et-Maa (Landes) et 43 000 à Lacanau (Gironde). Dans la vallée de la Loire, 45 communes dépassent 10 000 nuitées, tandis que Saint-Aignan, où se situe le Zooparc de Beauval, franchit les 73 000 nuitées pour moins de 3 000 habitants ! En Dordogne, dans le triangle Lascaux-Sarlat-Bergerac, les réservations dépassent les 5 000 nuitées pour 1 000 habitants dans une soixantaine de communes et s’étalent en tache d’huile autour de cette zone principale. La vallée de la Vézère se distingue par un niveau de réservations encore plus élevé, avec des communes où le ratio de 15 000 nuitées pour 1 000 habitants est dépassé.
La plate-forme sert aussi de révélateur des nouvelles géographies touristiques, ajoutent les auteurs de l’étude : parcs naturels, zones viticoles (Alsace, Bordelais), montagnes intermédiaires (Cantal, Cévennes) ou campagnes patrimoniales connaissent une progression soutenue du « tourisme vert ». Les stations du massif des Vosges (Gérardmer, Ventron, La Bresse, Le Valtin), enclaves touristiques dans un département vosgien qui l’est peu, rencontrent un fort succès sur Airbnb. La route des vins d’Alsace affiche les taux de réservation les plus élevés de l’Est.
Les métropoles demeurent des foyers majeurs. À Paris, les quatre premiers arrondissements, Montmartre et les abords de l’Arc de Triomphe dépassent 15 000 nuitées pour 1 000 habitants. Marseille connaît un formidable engouement touristique depuis quelques années. Les réservations se concentrent fortement dans le centre, mais aussi dans certains quartiers périphériques « typiques », comme l’Estaque, au nord, ou les Goudes, au sud. « Ces exemples illustrent à la fois la centralité métropolitaine du modèle et la tension résidentielle qui en découle : la montée des meublés peut s’accompagner d’une raréfaction du logement permanent », commentent les trois auteurs de l’étude.
Par ailleurs, les festivals et les manifestations sportives produisent des chocs ponctuels de demande, révélant la dimension événementielle du tourisme numérique. Deux exemples :
- À Angoulême, la semaine du Festival international de la bande dessinée fait bondir les réservations de 1 300 à 4 000 nuitées, soit + 200 %.
- Au Mans, les 24 Heures Autos génèrent 16 000 nuitées en ville et 10 000 supplémentaires dans un rayon de quinze kilomètres.
Les profils des clients d’Airbnb
Un Français sur deux déclare avoir déjà utilisé Airbnb pour un séjour et 30 % affirment y recourir au moins une fois par an, montre encore l’étude de l’Institut Terram. Les utilisateurs réguliers, soit 30 % des répondants, présentent un profil plus masculin (53 %, contre 47 % de femmes), plus jeune (39 % ont moins de 35 ans, contre 25 % dans l’ensemble de la population) et plus diplômé (44 % diplômés du supérieur, contre 30 %). Près des trois quarts (74 %) sont actifs et 40 % ont des enfants à charge.
La durée moyenne des séjours s’établit à 5 jours, avec près de la moitié (47 %) de réservations comprises entre 3 et 6 jours. Les séjours très courts (moins de 3 jours) concernent surtout les jeunes et les catégories modestes, tandis que les plus de 7 jours sont l’apanage des retraités. Le littoral reste la destination privilégiée (79 % des utilisateurs), suivi des grandes villes (72 %) et des villes moyennes (69 %). Airbnb séduit avant tout pour ses prix plus abordables (43 %), la surface et le confort des logements (39 %) et la flexibilité des réservations. « Près de 70 % des familles estiment que sans la plate-forme, leurs séjours leur coûteraient plus cher et seraient plus difficiles à organiser », rapporte l’étude.
Airbnb s’est imposé comme un acteur structurant du tourisme français. « Il offre une réponse à la demande de flexibilité, favorise l’économie d’appoint des ménages et soutient les commerces de proximité. Mais son succès accentue certaines fractures : raréfaction du logement dans les zones tendues, hausse du foncier et inégalités d’accès aux vacances. Le défi pour les années à venir consiste à stabiliser ce modèle hybride, entre innovation et régulation. L’avenir du tourisme numérique dépendra de la capacité des territoires à articuler trois impératifs : le droit au départ, l’équilibre résidentiel et la vitalité économique locale », conclut l’Institut Terram.
