Depuis le 1er mars 2025, la réforme du régime de rémunération applicable aux congés de maladie ordinaire dans la fonction publique a profondément modifié les modalités de traitement des agents durant les trois premiers mois d’arrêt. Issue de l’article 189 de la loi n° 2025-127 du 14 février 2025 de finances pour 2025, cette réforme modifie l’article L. 822-3 du Code général de la fonction publique (CGFP) en instaurant le principe d’une rémunération à hauteur de 90 % du traitement pendant cette période. Si cette mesure s’applique à l’ensemble des agents publics, elle soulève des problématiques particulières pour certaines catégories, notamment les sapeurs-pompiers professionnels (SPP), dont le régime indemnitaire obéit à des règles spécifiques.
Un régime indemnitaire dérogatoire propre aux sapeurs-pompiers professionnels
Les sapeurs-pompiers professionnels (SPP) ne relèvent pas du régime indemnitaire de droit commun applicable aux agents de l’État. L’article L. 714-4 du CGFP prévoit un principe de parité avec les corps équivalents de la fonction publique de l’État. Or, en l’absence de tels corps, le législateur a établi un cadre dérogatoire, défini aux articles 6-1 à 6-9 du décret n° 90-850 du 25 septembre 1990 modifié.
Ce régime indemnitaire repose en grande partie sur des primes calculées en pourcentage du traitement indiciaire. Il s’agit notamment de l’indemnité de responsabilité, de l’indemnité de feu ou encore de la prime de qualification, dont le montant varie proportionnellement au traitement de base perçu par l’agent. Contrairement à d’autres agents publics dont certaines primes peuvent être maintenues en intégralité lors d’un congé, les SPP voient leur régime indemnitaire évoluer de manière proportionnelle à leur traitement de base. Cette structure rend leur rémunération particulièrement sensible à toute baisse de traitement.
Une réduction mécanique du régime indemnitaire en cas d’arrêt maladie
Le décret n° 2010-997 du 26 août 2010, qui prévoit le maintien des primes à hauteur du traitement dans certaines situations de congés pour les agents de l’État, ne s’applique pas aux sapeurs-pompiers professionnels (SPP). Toutefois, cette exclusion reste sans effet significatif pour l’administration, dans la mesure où les règles spécifiques à leur statut produisent un résultat équivalent, voire plus restrictif, pour les agents concernés.
En effet, la majorité des primes et indemnités perçues par les SPP étant indexées sur le traitement indiciaire, toute réduction de celui-ci entraîne mécaniquement une baisse équivalente de ces compléments de rémunération. Ainsi, depuis l’entrée en vigueur de la réforme au 1er mars 2025, la rémunération globale des sapeurs-pompiers professionnels (SPP) placés en congé maladie ordinaire est réduite à environ 90 %, non seulement sur le traitement indiciaire, mais également sur les primes proportionnelles. Quelques rares indemnités échappent à cette règle, notamment celles reposant sur un montant forfaitaire ou expressément maintenues (comme certaines primes d’astreinte ou de sujétion). Cependant, ces exceptions ne permettent pas de compenser la perte globale subie par les intéressés.
La réforme du 1er mars 2025, bien qu’orientée par des logiques de maîtrise des dépenses publiques, a des effets particulièrement sensibles sur les sapeurs-pompiers professionnels (SPP). Leur régime indemnitaire, déjà distinct, se trouve mécaniquement affaibli par l’effet cumulé de la baisse de traitement et de la réduction corrélative des primes. Cette situation interroge sur la reconnaissance institutionnelle accordée à une profession soumise à des contraintes physiques, psychologiques et organisationnelles considérables. À l’heure où la question de l’attractivité et de la fidélisation des agents publics est cruciale, il pourrait être opportun d’envisager des dispositifs spécifiques d’amortissement ou de compensation, portés par les collectivités ou soutenus par l’État, tels qu’un fonds de solidarité temporaire ou une majoration forfaitaire des primes en cas d’arrêt maladie, afin de limiter l’impact financier pour les agents concernés.
Texte de référence : Question écrite n° 6590 de Mme Anna Pic [Manche (4e circonscription) – Socialistes et apparentés], du 13 mai 2025, Réponse publiée au JOAN du 3 juin 2025
