Des prestations non exécutées à la demande de l’acheteur ne justifient pas une réfaction sur le prix
Une société avait été attributaire par l’université de deux lots d’un marché portant sur l’entretien et le nettoyage des locaux. Le marché en litige comprenait pour l’essentiel une prestation de nettoyage de locaux rémunérée par des prix forfaitaires. Seules des prestations ponctuelles faisant l’objet de bons de commande étaient rémunérées sur la base de prix unitaires. Par deux décisions, l’acheteur avait appliqué au prestataire des réfactions (réduction du montant facturé) sur les sommes dues à la société correspondant selon l’université à des prestations non réalisées dans les parties des locaux de l’université qui étaient fermées au public du 17 mars 2020 au 31 mai 2020 inclus. Le pouvoir adjudicateur, pour justifier du bien-fondé des deux décisions appliquant des réfactions, se prévalait des dispositions de l’article 33 du décret du 7 novembre 2012 relatives au paiement après service fait. Il faisait valoir que, dès l’instant où l’ensemble des prestations dont la rémunération est prévue par un prix forfaitaire ne sont pas exécutées, une minoration du prix à hauteur du pourcentage de non-réalisation peut être pratiquée, conformément à ce que prévoient les stipulations de l’article 11.4.5 du cahier des clauses administratives générales. Selon ce dernier article, « Les prix forfaitaires peuvent être fractionnés, si la prestation ou la partie de prestation à laquelle le prix se rapporte n’est pas achevée. Il est alors compté une fraction du prix égale au pourcentage d’exécution de la prestation ». Selon le juge administratif d’appel, « s’il est constant que l’entretien d’une partie des locaux n’a pas été réalisé entre le 17 mars et le 10 mai 2020, il ne s’agit pas pour autant d’une prestation qui ne serait pas « achevée » au sens des dispositions précitées du cahier des clauses administratives générales, puisqu’il n’est pas contesté que l’entreprise Sud Service s’est conformée aux demandes de la personne publique quant à l’étendue des prestations à réaliser durant la période susmentionnée ». En effet, entre le 17 mars et le 10 mai 2020, une partie des locaux universitaires faisant l’objet du marché a, du fait de l’épidémie de Covid-19, été fermée aux étudiants. Durant cette période, l’université avait demandé au titulaire du marché de n’assurer le nettoyage et l’entretien que des seuls locaux restants utilisés pour lesquels elle conservait un besoin. C’est donc l’université qui, de sa propre initiative, sans pour autant suspendre l’exécution du marché, a décidé de dispenser provisoirement la société d’effectuer le nettoyage des bâtiments temporairement inutilisés au cours de la période sus-indiquée, et non la société qui se serait abstenue d’exécuter une prestation contractuellement prévue.
L’acheteur doit payer le prix forfaitaire prévu au contrat
La décision d’exempter la société prestataire d’une partie de ses obligations, compte tenu d’une diminution des besoins de la personne responsable du marché, est sans incidence sur le paiement du prix forfaitaire contractuellement prévu. En outre, à l’exception des prestations que l’université l’a dispensée provisoirement d’effectuer, eu égard à la fermeture temporaire des bâtiments universitaires concernés, il est constant que l’ensemble des prestations d’entretien et de nettoyage prévues par le contrat ont été réalisées par la société, lesdites prestations ayant été au demeurant tacitement admises en l’absence de décision contraire dans le délai de quinze jours. Dans ces conditions, sans que n’aient d’incidence les circonstances invoquées par l’université selon lesquelles d’une part, les prestations de la société étaient rémunérées par l’application d’un prix forfaitaire décomposé par bâtiment, conformément à la décomposition du prix global et forfaitaire annexée à l’acte d’engagement, et d’autre part, que les parties auraient, sur les prestations qui n’auraient pas été réalisées, envisagé un accord, lequel n’a pas été finalisé, la société est fondée à soutenir que les dispositions de l’article 11.4.5 du cahier des clauses administratives générales ne trouvaient pas à s’appliquer.
Dominique Niay
Texte de référence : CCA de Toulouse, 3e chambre, 30 septembre 2025, n° 23TL02024, Inédit au recueil Lebon
