Strasbourg inaugure une école européenne, espérant renforcer son statut de capitale européenne

Publié le 11 septembre 2015 à 13h26 - par

Enfants vêtus des couleurs de l’Europe, chorale entonnant « L’Hymne à la joie » : Strasbourg a inauguré jeudi 10 septembre son école européenne, un projet censé renforcer le statut de capitale européenne de la ville mais critiqué pour son coût.

Strasbourg inaugure une école européenne, espérant renforcer son statut de capitale européenne

Tout est trilingue dans les bâtiments flambants neufs de l’école, installés dans le quartier chic de la Robertsau, à commencer par les inscriptions sur les murs indiquant la cantine ou la bibliothèque.

Répartis dans trois sections linguistiques – francophone, anglophone et germanophone -, 974 élèves y ont fait leur rentrée le 1er septembre, de la maternelle au lycée. Des enfants de fonctionnaires européens, mais aussi de diplomates, de cadres de multinationales ou de parents binationaux.

Les bâtiments définitifs de l’école, créée en 2008 mais jusqu’à présent installée dans des locaux provisoires, ont coûté un peu plus de 34 millions d’euros, déboursés par la ville, le département et la région.

L’école européenne de Strasbourg est en effet une école publique française, où des professeurs rémunérés par l’Éducation nationale dispensent un enseignement gratuit. Agréée par l’Union européenne, elle prépare les élèves au baccalauréat européen.

Contrairement aux écoles européennes « historiques » de Bruxelles, Luxembourg ou encore Francfort, le coût de la scolarité n’est pas assumé ici par les institutions européennes et les parents d’élèves, mais par le pays d’accueil.

Un financement public qui passe mal auprès de certains Strasbourgeois. « On en fait beaucoup pour les institutions européennes, qui en font de moins en moins pour nous », commente Thierry Bardin, vice-président de la FCPE 67.

« On nous dit qu’il faut faire des économies, mais on dépense de l’argent dans le seul et unique but de tenter de faire croire que Strasbourg va garder le siège du Parlement européen », se moque-t-il.

Dans la cour des grands

De fait, pour l’ancienne majorité municipale (Les Républicains) comme pour le maire socialiste actuel, cette école constitue un élément essentiel du « rayonnement européen » de Strasbourg.

« Je ne voudrais pas qu’un jour, si des décisions sont prises pour renforcer la dimension politique européenne de Strasbourg, (…) on puisse dire vous n’avez même pas d’école européenne, donc vous ne jouez pas dans la cour des grands », explique le maire, Roland Ries.

Pour Pascal Mangin, adjoint chargé des Affaires européennes pendant le mandat de Fabienne Keller (LR), cette école représente « un argument pour valoriser la possibilité de décentrer vers Strasbourg une partie des fonctionnaires qui se trouvent à Luxembourg ».

Bien qu’abritant le siège officiel du Parlement européen, la capitale alsacienne compte actuellement peu de fonctionnaires de l’UE, la plupart étant répartis entre Luxembourg et Bruxelles. Et les eurodéputés ne siègent à Strasbourg que trois jours et demi par mois.

Cette situation conduit l’école européenne à accueillir les enfants de personnels d’institutions européennes non communautaires, comme le Conseil de l’Europe, mais également des enfants de parents amenés à se déplacer en Europe pour des raisons professionnelles.

La sélection, de fait, se fonde beaucoup sur la profession des parents, alimentant des accusations d’entre-soi social.

« C’est de la discrimination sociale revendiquée ! » s’indigne Isabelle Antoine de SUD-Éducation, qui souligne que ces investissements « ne concernent que des élèves triés sur le volet, sur des critères abracadabrantesques ». L’enseignante évoque « des conditions matérielles et d’encadrement dignes d’établissements prioritaires plus plus plus ».

Carole Murphy, Française mariée à un Irlandais, vice-présidente de l’association des parents d’élèves de l’école européenne, fait partie des « heureux élus » qui, sans travailler pour l’Europe, sont parvenus à y inscrire leurs enfants.

« Il y a beaucoup de candidats pour peu de places », reconnaît cette banquière, qui ajoute : « Je me suis engouffrée dans la brèche au début, quand c’était un peu plus facile. »

Au-delà de la dimension linguistique, elle se réjouit que ses deux fils bénéficient d’un enseignement ouvert sur l’Europe. « Il faut faire le deuil de certains sujets franco-français : ils en sauront peut-être moins que moi sur Charlemagne et Napoléon, mais on leur enseigne une histoire-géographie qui correspond à ce qu’ils vivent », note-t-elle.

 

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