Réforme des retraites : pour les femmes, peut-on parler d’avancées ?

Publié le 18 janvier 2023 à 8h30 - par

La réforme des retraites améliorera-t-elle le sort des femmes ? Le Gouvernement affirme que les mesures sur les petites pensions et les carrières longues leur seront favorables, quand les opposants estiment que le cœur du projet creusera les inégalités qu’elles subissent.

Réforme des retraites : pour les femmes, peut-on parler d'avancées ?
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Le taux plein à 67 ans, « particulièrement favorable » aux femmes ?

Le projet présenté le 10 janvier 2023 ne comporte pas de mesures spécifiques aux femmes, ce qui offre à ses opposants un premier motif de contestation.

Mais le taux plein sera maintenu à l’âge de 67 ans, « particulièrement favorable aux femmes, qui sont deux fois plus nombreuses » – environ 20 % d’entre elles contre 10 % des hommes – « à devoir attendre » cet horizon pour éviter des pensions diminuées, argumente le Gouvernement.

« Un non-changement » pour l’économiste Rachel Silvera, qui estime « assez scandaleux de faire passer ça pour une avancée », alors que la écote en vigueur « pénalise davantage les femmes » en raison de carrières hachées (temps partiels subis, interruptions de carrière liées aux enfants…).

Jugeant ce seuil de 67 ans « pas acceptable », le président LR des Hauts-de-France, Xavier Bertrand, a demandé que les femmes « puissent partir avec une retraite sans décote » à 65 ans.

Carrières longues : quelle prise en compte ?

Quelque 100 000 aidants familiaux – en majorité des aidantes – pourront valider des périodes durant lesquelles ils se sont occupés d’un proche (enfant handicapé, parent dépendant…).

Par ailleurs, jusqu’à quatre trimestres effectués en congé parental pourront être pris en compte dans le dispositif « carrières longues », commencées avant 20 ans. Ces congés concernent à 90 % des femmes. « Chaque année, plus de 3 000 femmes pourront ainsi partir plus tôt à la retraite », fait valoir le Gouvernement.

« C’est très bien mais… que dire des millions de femmes pour qui l’allongement de 62 à 64 ans va annuler l’effet positif de la majoration de huit trimestres par enfant ? », critique François Hommeril (CFE-CGC).

Le dirigeant syndical résume le principal grief des opposants à la réforme : à leurs yeux, l’option-clé – le relèvement de deux ans de l’âge légal – est loin d’être compensée par les mesures d’accompagnement.

Pour l’économiste Antoine Bozio, la hausse de l’âge légal va cependant « plus toucher les hommes parce qu’ils ont plus souvent une carrière complète et qu’ils devront quand même travailler plus longtemps ». 

Quid du coup de pouce sur les petites retraites ?

La réforme prévoit la revalorisation du minimum de pension à 85 % du SMIC net, soit bientôt 1 200 euros brut (avant prélèvements sociaux), pour une carrière complète. « Ce sont en particulier des anciens travailleurs indépendants et des femmes qui vont être les bénéficiaires de cette mesure », affirme le Gouvernement.

L’exécutif souligne que les périodes de congé parental « seront aussi comptabilisées dans le calcul du minimum de pension majoré, augmentant ainsi les petites pensions des femmes ».

Globalement, la revalorisation des minima se traduira « par une hausse de la pension moyenne plus importante pour les femmes » que pour les hommes, estime le Gouvernement.

Mais l’économiste Rachel Silvera craint que le chiffre de 1 200 euros ne relève de l’« affichage en ce qui concerne les femmes », tant elles sont familières des carrières « incomplètes ». 

Qu’en est-il des droits familiaux ?

Contrairement à la réforme abandonnée de 2019-2020, le Gouvernement Borne n’a rien prévu en matière de droits familiaux (pour la naissance d’un enfant) ou conjugaux (après le décès du conjoint). 

L’exécutif a cependant demandé au Conseil d’orientation des retraites (COR) « d’ouvrir un chantier sur la modernisation des droits familiaux et l’unification du système de réversion » afin de corriger plus efficacement les inégalités de pension femmes-hommes.

Pour l’association Osez le féminisme, une réforme « juste » doit aller plus loin, en agissant sur les « problèmes structurels » : « revalorisation des métiers féminisés, politique de petite enfance qui permette aux femmes d’avoir accès facilement à des modes de garde moins coûteux », etc.

Les inégalités de pension restent substantielles : fin 2020, les femmes avaient une retraite (y compris la majoration de 10 % pour les mères de trois enfants ou plus) inférieure en moyenne de 40 % à celle des hommes, différence ramenée à 28 % en cas de réversion.

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