Soins funéraires aux séropositifs : la fin d’une « discrimination » post-mortem

Publié le 21 juillet 2017 à 6h40 - par

Les personnes séropositives décédées pourront désormais recevoir des soins funéraires de conservation du corps, ce qui leur était interdit depuis 1986.

Soins funéraires aux séropositifs : la fin d'une "discrimination" post-mortem

C’est la fin d’une « discrimination » vieille de 30 ans, se réjouissent les associations de lutte contre le sida. La levée de cette interdiction, qui concerne aussi les personnes décédées atteintes d’hépatites, est parue jeudi 20 juillet au Journal Officiel et prendra effet le 1er janvier 2018.

Elle était réclamée de longue date par les associations de lutte contre le sida et a été annoncée à trois jours de l’ouverture de la conférence internationale de recherche sur le sida, dimanche 23 juillet à Paris.

L’interdiction était « une discrimination et une situation indigne pour les familles et l’entourage. Quand elles rendaient visite au corps, celui-ci était dans un état de délabrement du fait de la maladie », a réagi pour l’AFP Joël Dumier, président de l’association SOS homophobie.

Les soins de conservation des corps (thanatopraxie), qui visent à retarder le processus de décomposition, consistent notamment à injecter dans le système vasculaire un produit antiseptique et conservateur à la place du sang.

En 2013, un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) et de l’Inspection générale de l’administration (IGA) estimait que la thanatopraxie concernait environ 200 000 des 545 000 personnes décédées en France, soit plus d’un décès sur trois.

Ces soins étaient jusque-là interdits aux personnes décédées séropositives et atteintes d’hépatites en vertu de deux textes datant de 1986 puis 1998, par crainte de contamination.

Selon l’arrêté publié jeudi 20 juillet et signé par la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, le sida et les hépatites ont été retirés de la liste des maladies concernées par cette interdiction.

Maladie taboue

« C’était une mesure tellement anachronique », s’est félicité Christian Andreo, directeur général adjoint de l’association Aides, auprès de l’AFP.

« Elle datait du temps de la terreur du VIH, une maladie dont on ne savait rien. On voulait alors placer les personnes séropositives dans des cercueils plombés », a-t-il poursuivi.

« Il n’y a jamais eu un seul thanatopracteur, un seul professionnel de la mort qui s’occupe de ces personnes, qui a été infecté par le VIH », a souligné auprès de l’AFP Jean-Luc Romero, Conseiller régional d’Île-de-France et militant de la lutte contre le sida.

« On était un des seuls pays aux monde à appliquer cette discrimination », a-t-il ajouté. « On faisait tout pour que ça reste une maladie taboue, une maladie honteuse ».

De précédents ministres de la Santé, Xavier Bertrand en 2012 puis Marisol Touraine en 2014, s’étaient déjà prononcés en faveur de la fin de l’interdiction. Elle avait également été recommandée par le Haut Conseil à la santé publique et d’autres organismes.

Mais elle s’est faite à petits pas. D’abord, un décret a été publié en décembre dernier pour rendre obligatoire la vaccination des thanatopracteurs contre l’hépatite B.

Puis, le 11 mai, un décret et un arrêté sont parus pour préciser les conditions d’intervention des thanatopracteurs (information des familles, équipement des lieux, précautions d’hygiène, soins funéraires à domicile sous certaines conditions).

C’est à ce moment-là, juste après l’élection d’Emmanuel Macron à la présidence de la République, que des associations de lutte contre le sida l’ont interpellé pour lui demander la levée de l’interdiction.

L’arrêté paru jeudi 20 juillet précise que les soins funéraires de conservation des corps restent interdits dans le cas de personnes décédées de la maladie de Creutzfeldt-Jakob, de tout « état septique grave », de la rage, du choléra ou de la peste.

 

Textes de référence :

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