État des lieux des démarches participatives dans les quartiers prioritaires

Publié le 21 juillet 2023 à 10h00 - par

À la veille du renouvellement des contrats de ville, l’Agence nationale de la cohésion des territoires formule des propositions pour pérenniser les démarches participatives engagées dans les quartiers prioritaires.

État des lieux des démarches participatives dans les quartiers prioritaires
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Quelques semaines avant la récente flambée de violences dans les quartiers, consécutive à la mort du jeune Nahel, tué par un policier à Nanterre, l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) a publié un document intitulé « Les démarches participatives dans les quartiers prioritaires – État des lieux 2014-2023 ». Huit ans après le vote de la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine du 21 février 2014 et à la veille du renouvellement des contrats de ville, l’Agence esquisse ainsi un bilan des démarches participatives engagées dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV).

Ce travail répond à plusieurs objectifs, explique l’ANCT. D’abord, le caractère obligatoire de la création des conseils citoyens impose d’apprécier l’effectivité de leur mise en œuvre. De fait, au 1er janvier 2023, près de 72 % des quelque 1 034 conseils citoyens recensés étaient actifs ou en veille (pour 26 % de non actifs), apprend-on à la lecture du document. Ensuite, cette analyse doit contribuer à nourrir les travaux en cours relatifs à la future contractualisation, laquelle devra prévoir les modalités de la participation des habitants. « Enfin et peut-être surtout », dixit l’Agence, ce travail doit permettre de « reconnaître l’engagement des habitants qui se sont mobilisés dans les conseils citoyens et dans le cadre d’autres démarches participatives. »

Ainsi, cet état des lieux traite des conseils citoyens en tant qu’obligation légale, mais ne saurait faire l’impasse sur les autres démarches participatives qui contribuent également à l’expression et à la participation des habitants, ce que l’ANCT désigne comme « l’écosystème participatif ». L’Agence formule une série de préconisations pour pérenniser et développer ces dynamiques. Quels que soient les formats des démarches participatives à l’œuvre, ses préconisations s’attachent aux principes qui concourent à les structurer davantage qu’à leurs modalités de fonctionnement, même si celles-ci peuvent conditionner la pérennité des dynamiques.

Définir la participation pour sécuriser l’engagement

Le nombre de conseils citoyens atteste d’une dynamique participative à l’œuvre dans les QPV, se félicite l’ANCT. Désormais, l’enjeu n’est plus de créer les conditions de l’expression des habitants, mais bien de préciser le rôle qui leur est assigné et le pouvoir qui leur est conféré au sein des instances de gouvernance de la politique de la ville. « Les habitants qui s’engagent ont besoin de connaître le niveau de participation attendu, insiste l’Agence. Cette clarification est la base d’une participation saine et constructive. » Elle suggère donc de  :

  • désigner le garant de la méthode participative au sein de la gouvernance ;
  • valoriser et intégrer les démarches existantes ;
  • préciser le niveau de participation ;
  • préciser les processus décisionnels et les zones de pouvoir de chacune des parties prenantes.

Partager l’intérêt de la participation : soutenir les élus et les professionnels

La participation suppose la reconnaissance mutuelle des parties en présence, de leurs compétences et de leurs expertises respectives. Ce cheminement n’incombe pas uniquement aux habitants, mais à l’ensemble des acteurs de la gouvernance, indique l’ANCT, en rappelant que les professionnels et élus sont rarement formés « à faire avec », mais plutôt « à faire pour ». Aussi, la reconnaissance mutuelle peut être initiée dans le cadre de formations communes pour fabriquer un collectif de travail, incluant l’ensemble des acteurs de la gouvernance. À ce titre, il convient de :

  • distinguer information, formation et coformation des parties prenantes ;
  • partager une culture commune de la participation ;
  • coformer les acteurs institutionnels et les habitants à la coconstruction ;
  • valoriser les démarches exemplaires des élus.

Penser la composition du collectif pour faire participer ceux que l’on voit le moins

Les modalités retenues pour le tirage au sort des habitants doivent permettre d’assurer la présence des personnes les plus éloignées des processus démocratiques, notamment les jeunes, plaide l’Agence. Associés à des habitants volontaires, les nouveaux membres doivent pouvoir bénéficier de l’expérience d’habitants aguerris à la coconstruction. Aussi, elle préconise de :

  • définir les objectifs du tirage au sort ;
  • prévoir les règles de remplacement, la durée de l’engagement, les outils de transmission de l’expérience entre les membres ;
  • intégrer ces modalités à une charte de fonctionnement.

Construire une vision commune  : un changement attendu

La participation est juste une méthode, mais ne constitue pas une politique publique an tant que telle. L’objectif demeure la coconstruction de la politique de la ville pour répondre au mieux aux besoins des habitants, réaffirme l’ANCT. Pour cela, il faut  :

  • distinguer les chantiers (faire vivre un collectif et coconstruire un projet pour un quartier) ;
  • identifier et prendre en compte les différentes temporalités, d’un collectif d’habitants bénévoles, d’un projet de renouvellement urbain, d’une administration… ;
  • confronter la vision commune et les actions mises en œuvre.

Garantir les moyens de la participation

Si les aspects logistiques peuvent paraître accessoires au regard des enjeux de gouvernance du contrat de ville, ils conditionnent néanmoins la pérennité d’un collectif en ce qu’ils libèrent les acteurs de la participation des contraintes matérielles, soutient l’Agence. Aussi, suggère-t-elle de :

  • dédier un financement et des locaux dans le cadre du contrat de ville pour sécuriser le fonctionnement ;
  • assurer l’effectivité des outils existants (congé d’engagement, possibilité de saisir le préfet, recours à l’expertise).

Outiller les parties prenantes

Les nombreuses expériences de participation des habitants constituent désormais des ressources qui doivent nourrir les démarches à venir. La capitalisation et surtout la valorisation de ces ressources doivent être structurées et rendues accessibles à tous, souligne le document.

Reconnaître, évaluer et rendre compte

La coconstruction est un objet d’évaluation en tant que tel, à suivre tout au long du processus pour réajuster, si nécessaire, et mesurer ses effets sur l’action publique et les parties prenantes, explique l’ANCT. Les travaux universitaires sur le sujet sont nombreux et doivent être mis au service du renforcement des dynamiques locales. À ce titre, l’Agence préconise de  :

  • confier le pilotage de l’évaluation aux centres de ressources qui mobiliseront des universitaires  ;
  • internaliser l’évaluation à la gouvernance pour une démarche continue et partagée  ;
  • rendre compte des effets de la coconstruction pour valoriser les démarches, les parties prenantes et particulièrement les habitants engagés, ainsi que partager l’intérêt d’une action publique coconstruite, notamment avec les habitants non impliqués.

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