“Au 1er janvier 2024, nous pourrons proposer une collecte de biodéchets à toute personne qui le demandera”

Publiée le 24 novembre 2023 à 10h00, mis à jour le 24 novembre 2023 à 10h00 - par

Entretien avec Jean-François Vigier, maire de Bures-sur-Yvette (Essonne, 9 442  habitants), président du Siom, syndicat mixte d'ordures ménagères de la Vallée-de-Chevreuse et membre du bureau de l'Association des Maires de France (AMF).
Entretien avec Jean-François Vigier, maire de Bures-sur-Yvette (Essonne, 9 442 habitants), président du Siom, syndicat mixte d'ordures ménagères de la Vallée-de-Chevreuse

Le 1er janvier 2024, le tri à la source des biodéchets (déchets de jardins, déchets alimentaires et de cuisine…) et leur valorisation deviennent obligatoires. Cela s’applique aussi aux services publics de gestion des déchets. Les collectivités peuvent favoriser le tri à la source et la valorisation sur place ou organiser une collecte séparée avec valorisation industrielle. Plus d’une centaine de collectivités (Lille, Bordeaux ou Rennes, Niort, Lorient, Nevers, Pau…) ont engagé une démarche de tri à la source et de collecte séparée des biodéchets. Le Siom, syndicat mixte d’ordures ménagères de la Vallée-de-Chevreuse*, va plus loin : il collecte et valorise les biodéchets depuis un an et demi. Son président, Jean-François Vigier, maire de Bures-sur-Yvette (Essonne, 9 442 habitants) et membre du bureau de l’Association des Maires de France (AMF), a accepté de nous faire part de son expérience.

Vous avez choisi de collecter et de valoriser les biodéchets dès avril 2022 ?

En effet, au syndicat des ordures ménagères de la Vallée-de-Chevreuse, nous sommes précurseurs. Nous avons décidé de devancer l’obligation légale et de proposer la collecte des biodéchets sur le territoire à partir du 4 avril 2022. La population, composée en majorité de chercheurs, d’enseignants et de cadres, est sensible aux questions de réduction des déchets et d’économie circulaire. Nous avons choisi de déployer ce nouveau service progressivement. Tout d’abord, sur la base du volontariat en secteur pavillonnaire, en couplant la collecte des biodéchets avec une baisse de fréquence du ramassage des ordures ménagères : elles sont collectées une fois par semaine et non plus deux, la seconde tournée étant consacrée aux biodéchets. Et, en novembre 2022, la collecte des biodéchets a été étendue aux immeubles volontaires. À ma connaissance, nous sommes le seul syndicat à avoir déployé la collecte des biodéchets sur l’ensemble de son territoire. D’autres collectivités se sont lancées, mais simplement dans le cadre d’expérimentations. Ainsi, aux Assises des déchets à Nantes, en septembre dernier, à trois mois de l’obligation légale, peu nombreux étaient les participants qui avaient déjà démarré.

Pourquoi faire appel au volontariat ?

Le choix du volontariat est important, car déployer ce type de collecte sur l’ensemble des pavillons aurait été très cher pour des quantités de déchets recueillies très faibles. En outre, le déploiement progressif permet d’adapter les moyens humains et matériels au fur et à mesure de la demande. Au départ, nous avons démarré avec 4 000 pavillons candidats, soit environ 10 % du parc. Aujourd’hui, plus de 5 000 en bénéficient. Ces habitants sont sensibilisés à la gestion des déchets, ils ont souvent un composteur dans leur jardin. Pour eux, il s’agit seulement d’une étape supplémentaire et ils commettent très peu d’erreurs de tri. Au 1er janvier 2024, nous serons en mesure de proposer une collecte de biodéchets à toute personne qui en fera la demande. Actuellement, nous réfléchissons aussi à la création de points d’apport volontaire pour les villes qui le souhaitent. Et nous allons relancer une campagne d’information pour encourager les gens qui veulent faire du compost. Depuis le début de l’année, nous avons déjà distribué 5 000 composteurs.

Que deviennent les biodéchets que vous collectez ?

Pour traiter ces biodéchets, nous avons fait un appel d’offres afin de choisir une entreprise qui les méthanise, pour les transformer en gaz. L’entreprise de collecte les apporte sur un site situé en Seine-et-Marne, où ils sont séparés des sacs plastiques et valorisés en gaz.

Que pouvez-vous conseiller aux autres collectivités ?

Il est important de sensibiliser les élus et les membres du syndicat sur la nécessité de démarrer, mais aussi de beaucoup communiquer auprès des habitants, de façon positive. Ainsi, dès 2016, nous avons accompagné le tri de tous les emballages dans le bac jaune – alors que certaines collectivités ont démarré seulement au 1er janvier 2023. Nous avons alors beaucoup communiqué, en expliquant aux concitoyens que nous étions dans une démarche vertueuse et que travailler sur la réduction des déchets était un exercice intéressant. Transformer un déchet en gaz répond à la démarche de transition énergétique. Il n’y a pas de sanctions prévues pour le moment pour les collectivités qui ne respecteront pas l’obligation de collecte des biodéchets en janvier 2024, mais l’histoire va dans le sens de la réduction des déchets et de l’économie circulaire. Bien sûr, l’exploitation et le service d’une collecte de biodéchets représentent un coût mais au Siom, en ayant réduit la fréquence de collecte des ordures ménagères, nous parvenons à trouver un certain équilibre.

Quelle est la position de l’AMF dont vous êtes membre du bureau ?

L’AMF a toujours veillé à ce que liberté soit donnée aux collectivités de développer leurs politiques publiques. Mais si elle est consciente de l’obligation légale, elle est aussi attentive à la question du coût de ces politiques. Il faut avoir les moyens financiers de mener des politiques qui demandent des investissements importants : collecte des biodéchets, construction de centres de tri et de « ressourceries »… Tous ces nouveaux services ont un coût, il faut donc disposer de ressources fiscales. C’est ce que nous demandons à l’État, qui a tendance à nous les retirer. Nous souhaitons avoir les moyens de déployer nos politiques par la fiscalité. Notre syndicat, qui est pourtant particulièrement vertueux, voit sa taxe générale sur les activités polluantes, la TGAP, augmenter d’un milliard d’euros sur quatre ans. En effet, l’État veut pénaliser les collectivités qui enfouissent leurs déchets mais le calcul fait que notre TGAP augmente malgré tout. Or, si l’on perd de la fiscalité et des ressources fiscales, on ne pourra plus rien faire…

Propos recueillis par Martine Courgnaud-Del Ry


* Le Siom intervient sur la communauté de communes de la Haute-Vallée-de-Chevreuse (Yvelines, 10 communes, 25 500 habitants) et sur la communauté d’agglomération Communauté Paris-Saclay (Essonne, 27 communes, 318 000 habitants).

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