Le 1er janvier 2022, la durée légale du temps de travail a été portée à 1 607 heures, en supprimant des jours de congés devenus illégaux. Depuis environ un an, Neuilly-sur-Marne (Seine-Saint-Denis, 36 640 habitants) propose à neuf cents agents une organisation du temps de travail plus souple, tout en garantissant un service public de qualité. La durée hebdomadaire du travail est passée de 37 à 38 heures (12 min de plus chaque jour et 6 RTT supplémentaires), et les agents ont le choix entre 38 heures sur 5 jours ou sur 4 jours 1/2, 38 ou 35 heures sur 4 jours. Le dispositif prévoit également la transformation des temps partiels en plein temps, les horaires variables, la prise en compte de la pénibilité au travail (1 ou 2 jours de congés supplémentaires) et la monétisation du congé de pré-retraite. Delphine Tranchand, directrice générale adjointe de la ville de Neuilly-sur-Marne, fait le point sur ce projet, qui a reçu le prix Territoria RH WEKA Argent, à l’Assemblée nationale le 7 novembre 2023.
Pourquoi avoir adopté la semaine de quatre jours ?
À la suite de l’annulation des élections municipales, le préfet a mis la commune en demeure de respecter la loi, en appliquant les 1 607 heures au 1er janvier 2022. Et, en attendant les nouvelles élections et la nouvelle équipe municipale, c’est une délégation du préfet qui a pris en charge ce sujet. Le nouveau maire a pris l’engagement de travailler pendant cette transition sur le dossier du temps de travail, dont j’ai été chargée. Il fallait trouver une organisation souple et innovante, qui allie qualité de vie au travail et conciliation avec la vie personnelle. Nous avons choisi d’augmenter la durée hebdomadaire du travail, en passant de 37 heures à 38 heures et de proposer aux agents de choisir entre une semaine de 5 jours à 38 heures, 4 jours 1/2 à 38 heures ou 4 jours à 38 heures ou 35 heures. Les agents peuvent choisir mais la priorité numéro un, c’est la continuité de service.
Comment ont réagi les agents ?
Les organisations syndicales ont été concertées mais à cause de l’ordre du préfet, le temps nous a manqué pour consulter les agents. Ils sont très contents. Nous leur laissons la liberté de choix, sous réserve que le chef de service accepte. Environ trente-cinq agents se sont lancés sur une nouvelle organisation de leur temps de travail. Une seule collègue a choisi 35 heures sur 4 jours ; c’est la semaine de 4 jours 1/2 qui a eu le plus grand succès. Car en travaillant 38 heures sur 4 jours, cela fait de longues journées et avec 35 heures sur 4 jours, on abandonne les RTT. Ce sont essentiellement les cadres et les administratifs qui sont concernés par cette liberté de choix : les agents de terrain ne peuvent ni bénéficier de la semaine de 4 jours ni télétravailler. C’est la limite du système : on ne peut pas étendre le dispositif aux neuf cents agents et aux cent-trente métiers que compte la commune. Nous avons donc commencé par définir le cadre et nous allons maintenant chercher des solutions équitables pour tous. Par ailleurs, pour les cadres qui ont déjà de longues journées de travail, une semaine de 4 jours ou 4 jours 1/2 est très difficile à tenir sur la durée. Quant aux postes de direction, ils ne peuvent pas pour le moment s’organiser et modifier leur semaine de travail.
Quelles difficultés avez-vous rencontrées pour mettre en place la semaine de quatre jours ?
Il n’y a pas eu de difficulté particulière. C’est maintenant que les difficultés vont arriver… Car nous avons laissé un an pour voir comment les uns et les autres s’emparaient du dispositif, mais il apparaît que ce n’est pas vraiment naturel, chacun est pris dans son quotidien. Donc un accompagnement de la RH sera nécessaire. Nous allons donc envoyer un questionnaire à tous les agents pour comprendre pourquoi il n’y a pas eu davantage de demandes et pour évaluer le dispositif. En effet, il y a chez les agents des envies de travailler autrement mais cela ne se fait pas tout seul. Cela nécessitera un travail important de balayer, service par service, tous les sujets dont les départs en retraite.
Quels sont les bénéfices de la semaine de quatre jours pour la commune ?
Le coût pour la collectivité est égal à zéro : il s’agit juste de redéployer des effectifs alors que le temps de travail est toujours le même. Et c’est plus productif car le temps qui était du congé devient du travail. Nous avions aussi pour objectif, avec cette nouvelle organisation, de mieux répondre aux attentes des administrés en leur rendant le service public le plus proche possible. La réorganisation nous permet, par exemple, de répondre à davantage d’affluence des usagers à midi plutôt qu’en fin de journée. Nous sommes en train de mettre en place un accueil unique, en intégrant la semaine de 4 jours mais aussi une plus grande polyvalence pour qu’il puisse y avoir des roulements d’agents. Ce sont des sujets lourds à traiter. Et nous avons également introduit les horaires variables, qui apportent une souplesse supplémentaire à l’organisation du travail de chacun.
Propos recueillis par Martine Courgnaud – Del Ry
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