« Plus de cinq années après son démarrage, ses objectifs demeurent incertains et dès lors mal compris par le grand public, en particulier par les jeunes qui en constituent pourtant la cible », écrit la Cour dans un rapport publié vendredi 13 septembre 2024.
Promesse de campagne du chef de l’État, le SNU a été lancé avec l’objectif qu’il devienne à terme obligatoire pour toute une classe d’âge (environ 800 000 jeunes par an). Il comporte une « mission d’intérêt général » et un « séjour de cohésion » comprenant des activités sportives, culturelles et intellectuelles, avec des journées qui débutent par la « levée des couleurs » (drapeau et hymne national) et port de l’uniforme. Il ne concerne jusqu’à présent que des jeunes volontaires âgés entre 15 et 17 ans.
La Cour déplore notamment qu’en « matière de mixité sociale comme d’engagement, les ambitions du dispositif ne soient pas atteintes ».
En janvier 2024, l’ex-Premier ministre Gabriel Attal a annoncé le lancement des « travaux » en vue d’une généralisation du SNU « à la rentrée 2026 ». Évoquée à plusieurs reprises ces derniers mois, elle se heurte à de vives résistances. Depuis mars 2024, ce dispositif est intégré au temps scolaire, avec un stage de douze jours pour les élèves en classe de seconde, volontaires.
Le rapport s’est penché aussi sur le coût du SNU. Il épingle « un dispositif sans pilotage budgétaire » et dont le coût est « largement sous-estimé ». « Le chiffrage du coût du SNU dans sa configuration actuelle et généralisé à l’ensemble d’une classe d’âge (soit environ 850 000 jeunes) est de 2 milliards d’euros », rappelle-t-il, mais « il ne correspond pas à une évaluation du coût global du dispositif pour les pouvoirs publics ».
« Coût exorbitant »
Le coût de fonctionnement annuel du dispositif généralisé serait, selon le rapport, plutôt de « 3,5 à 5 milliards d’euros ».
À ce chiffre, il faut « ajouter 6 milliards d’investissement pour la construction de centres, sans compter les coûts supportés par les collectivités territoriales » qui n’ont pu être chiffrés. « On est dans des ordres de grandeur qui dépassent les 10 milliards d’euros », a commenté Pierre Moscovici, premier président de la Cour des comptes lors d’une conférence de presse.
La Cour des comptes évoque aussi de « multiples difficultés » dans le « déploiement » du SNU, notamment sur l’« identification de lieux d’hébergement susceptibles d’accueillir des mineurs dans le respect des jauges prévues par le cahier des charges, les conditions de recrutement » ou encore la « rémunération des encadrants, le transport des jeunes vers et depuis les centres ».
Dans un message publié sur X (ex-Twitter), Cédric Perrin, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées au Sénat, déplore que « le rapport de la Cour des comptes confirme les craintes de la commission des affaires étrangères et défense du Sénat exprimées depuis le début : un coût exorbitant pour un effet non défini. La France n’a pas les moyens de gaspiller 5 milliards par an pour ce dispositif inefficace ».
Parmi ses recommandations, la Cour des comptes propose de « clarifier les objectifs du dispositif et prévoir leurs modalités d’évaluation », de « créer les conditions d’un pilotage ministériel et administratif adapté aux ambitions du dispositif » – en évoquant l’Éducation nationale, les Armées et les Comptes publics – ou encore de « donner une assise juridique au dispositif, permettant d’assurer sa montée en charge ».
Dans la foulée de la publication du rapport, le ministère affirme dans un communiqué que, concernant le budget alloué au SNU, « des actions d’optimisation et de planification ont été menées pour garantir une parfaite maîtrise des coûts et abaisser structurellement le coût moyen par jeune ».
De son côté, dans un document annexe au rapport, le ministère des Armées admet « la nécessité de clarifier » les objectifs du SNU « et de créer les conditions d’un pilotage ministériel et administratif adapté à l’ambition gouvernementale retenue ».
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