La perception de la dépendance par les Français

Publié le 16 mai 2011 à 0h00 - par

Dans le cadre du débat national sur la dépendance, le ministère des Solidarités et de la Cohésion sociale a commandé à la TNS Sofres une étude qualitative sur la perception de la dépendance et de sa prise en charge en France. Présentation des résultats.

Le premier des quatre débats interrégionaux sur la dépendance s’est tenu à Nantes, le 9 mai. Il était consacré au thème « Société et vieillissement ». L’occasion de présenter les résultats de l’étude qualitative menée par TNS Sofres sur la perception de la dépendance.

•   La perception du grand âge et de la dépendance
Le sujet génère auprès du grand public « de fortes stratégies d’évitement », constate l’étude. De fait, la question de la dépendance et de sa prise en charge véhicule « des perceptions particulièrement pénibles, telles que la vieillesse, l’affaiblissement, la souffrance et, finalement, l’angoisse de la mort à laquelle elle conduit. »
L’évocation du grand âge suscite des réactions négatives auprès de l’ensemble des groupes interrogés. Et ceci à plusieurs niveaux. L’étude relève, notamment, la crainte d’un manque de ressources financières, d’un affaiblissement psychologique menant à l’isolement ou de l’apparition de problèmes de santé de plus en plus prégnants. La question de la dépendance est, quant à elle, spontanément évoquée comme une composante de l’avancée en âge. Les représentations qui y sont liées se révèlent également négatives, dans les registres de la déchéance, de la vulnérabilité, de la perte d’autonomie physique, de la dépression, de la régression, de la perte de libre-arbitre ou encore de la dépersonnalisation.
Ainsi, une définition de la dépendance émerge. Celle-ci est décrite comme « l’incapacité à s’occuper de soi pour ses besoins élémentaires quotidiens, avec une notion de mise en danger de soi-même », résume l’organisme TNS Sofres.
« Au-delà de cet univers très noir », dixit l’étude, l’évitement s’accompagne « d’une grande méconnaissance » de la question. En effet, hormis quelques participants confrontés de très près à la dépendance, les données démographiques, d’une part, tout comme les solutions et moyens dédiés, ainsi que les structures et institutions concernées, d’autre part, sont largement ignorés. « Ce manque de connaissance vient ajouter de l’anxiété au tableau sombre déjà dressé spontanément. »

•   Le traitement du vieillissement et de la dépendance par la société
Les personnes interrogées témoignent « d’une société française qui ne sait plus accueillir ses personnes âgées », complète l’étude. Celles-ci sont en effet perçues comme « des citoyens devenus inutiles, voire représentant une charge pour la société, ne méritant de la seule considération qu’à un seul titre : le pouvoir économique qu’elles peuvent éventuellement représenter. » Ainsi, les notions d’expérience, de transmission intergénérationnelle restent marginales dans les représentations des personnes interrogées.
Compte tenu de leur grande méconnaissance du sujet, celles-ci ont bien du mal à statuer sur la qualité de la prise en charge des personnes âgées dépendantes. En la matière, chacun aborde le sujet par le prisme de son expérience personnelle, voire d’une anecdote entendue. Pour autant, le constat récurrent est celui d’une offre très dispersée qui semble à tous, confrontés ou non à la question, difficile à appréhender, rapporte l’étude : des aides, structures et services éclatés et des interlocuteurs multiples, qui empêchent une vision globale du système de prise en charge de la dépendance.
En termes de modes de prise en charge, les maisons de retraite constituent la structure la plus présente à l’esprit, et la seule pour un grand nombre de personnes interrogées. Mais elles sont porteuses d’une image très négative. A savoir : « l’image d’un mouroir, avec des soupçons de maltraitance en toile de fond, prédomine, tout en étant souvent inaccessible en raison de tarifs trop élevés et d’un nombre de places jugé insuffisant. » Le maintien à domicile est également cité. Toutefois, les éléments restitués sont beaucoup plus épars, même si les a priori s’avèrent sensiblement plus positifs. De même, les personnels impliqués dans la prise en charge de la dépendance souffrent d’un triple déficit aux yeux des citoyens consultés : des manques d’effectifs, un manque de formation et une valorisation du métier inexistante.
Au final, la dépendance renvoie « une image très peu flatteuse de l’évolution de notre société, de plus en plus marquée par l’individualisme, ce qui se traduit alors par des doutes importants sur le respect de la dignité et, plus généralement, de la volonté des personnes concernées », selon l’étude.

•   Famille et dépendance : les enjeux pour l’avenir
L’entrée d’un proche dans la dépendance est vécue comme un moment particulièrement difficile dans la vie des familles et unanimement vu comme tel, y compris par les personnes non directement confrontées. Néanmoins, « bien que le sujet soit donc éminemment personnel et familial, la demande de réponse reste collective », notent les auteurs de l’étude. C’est ainsi à l’égard de l’Etat que les personnes interrogées ont le plus d’attentes : « l’importance culturelle de la solidarité nationale, d’une part, et l’investissement considérable en jeu, d’autre part, nécessitent en effet une implication collective et générale, qui ne peut être pilotée que par l’Etat », estiment-elles. Aussi, elles attendent de sa part des réponses et des solutions en termes de financement de la dépendance, de modes d’hébergement, de contrôles efficaces du respect de la bientraitance dans les structures d’accueil ou encore de formation et de valorisation des personnels.
« In fine, après avoir dressé un tableau général des représentations et enjeux de la dépendance, force est de constater que le grand public exprime un certain pessimisme compte tenu de la sensibilité et de l’ampleur de la problématique », conclut l’étude.

 

(photo : Laura Jauneau)


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