Pesticides : des chercheurs, soignants, malades reprochent au gouvernement de sacrifier la santé

Publié le 10 mai 2024 à 9h10, mis à jour le 8 mai 2024 à 11h38 - par

Des chercheurs, soignants, associations de patients et de défense de l’environnement critiquent la nouvelle stratégie gouvernementale de réduction des pesticides comme « une politique d’immobilisme » et appellent à « faire le choix de la santé publique, pas celui du cancer », mardi 7 mai 2024 dans le journal Le Monde.

Pesticides : des chercheurs, soignants, malades reprochent au gouvernement de sacrifier la santé
© Image par Erich Westendarp de Pixabay

« Avec son nouveau plan Écophyto, le gouvernement persiste dans une politique d’immobilisme vieille de vingt ans. L’exposition délibérée, que ce soit des agriculteurs et de leurs familles ou de la population en général, à des substances nocives (ou dont la nocivité est encore inconnue pour les pesticides en cours d’agrément) va perdurer », affirme dans une tribune ce collectif.

Sur l’impact des pesticides sur la santé, les quelque 400 chercheurs, 200 soignants, associations de malades ou de défenseurs de l’environnement signataires pointent d’abord « une forte présomption d’un lien entre l’exposition à plusieurs pesticides et le développement de cancers de la prostate, de lymphomes et de leucémies », inscrits au tableau des maladies professionnelles.

Ils notent encore que l’exposition « in utero ou au cours de la petite enfance dans un contexte professionnel ou domestique accroît aussi le risque de certains cancers pédiatriques » ou que les populations les plus vulnérables vivent près de zones d’épandage.

Le collectif évoque aussi « la contamination de la population antillaise par le chlordécone » et l’inaction des autorités sur ce pesticide utilisé dans les bananeraies, à l’origine d’« une pollution persistante de toute la chaîne alimentaire associée à une multiplication de pathologies graves, dont des cancers de la prostate ».

« Nous (…) qui nous battons au quotidien contre le cancer ne pouvons accepter que la santé publique soit sacrifiée à des intérêts court-termistes. Apaiser la colère légitime du monde agricole en perpétuant son exposition aux pesticides n’est pas la solution », lancent-ils.

Affirmant qu’« il est encore temps pour le gouvernement de reconsidérer ses décisions », le collectif juge que « nos responsables politiques doivent avoir le courage de faire le choix de la santé publique, pas celui du cancer ».

Le gouvernement s’est défendu lundi 6 mai 2024 de tout recul environnemental dans la nouvelle stratégie de réduction des pesticides Écophyto 2030, mise en « pause » pendant la crise agricole, et dénoncée par les ONG comme insuffisante pour réduire l’impact de ces produits sur la nature.

Nouvelle mouture Écophyto 2030

Attendue depuis des mois, la nouvelle stratégie de réduction des pesticides Écophyto 2030 avait été mise en pause pour répondre aux manifestations de colère des agriculteurs.

Le plan prévoit désormais une enveloppe de 20 millions d’euros pour aider les collectivités locales à traiter l’eau destinée à la consommation humaine en cas de « pollutions par des produits phytopharmaceutiques ». Par ailleurs, les agriculteurs seront davantage accompagnés « financièrement » pour qu’ils changent de pratiques en faveur d’une amélioration de la qualité des eaux, affectées par les épandages de pesticides dans leurs champs. Enfin, l’État engage 250 millions en 2024, dont 146 millions spécifiquement dédiés à la recherche d’alternatives pour anticiper le retrait de certaines substances actives au niveau européen.

Les ONG, pour leur part, dénoncent un mécanisme qui « ne permettra pas d’enrayer l’effondrement de la biodiversité », tandis que le syndicat agricole majoritaire FNSEA se satisfait « de la mise d’un indicateur européen » qui « permettra de travailler sur les mêmes objectifs au niveau européen ».

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