Un collège unique
En 1975 (réforme Haby), la création du collège est une réelle nouveauté, puisqu’il a vocation à accueillir l’ensemble de la génération dans une même structure (ce qui n’était pas le cas des CES et des CEG). Mais, dans la mesure où il n’arrive pas à relever complètement le défi qu’il s’est assigné, il est périodiquement remis en chantier sans que, pour l’instant, son caractère « unique » (le même pour tous les élèves) soit remis en question.
Depuis le milieu des années 1990, pas moins de sept réformes sont venues en modifier l’organisation, la dernière en date mettant en œuvre les dispositions issues de la
loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013
d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République avec la mise en place du nouveau socle commun de connaissances et de compétences et de culture, de nouveaux programmes, une nouvelle grille horaire (avec, notamment les « enseignements pratiques interdisciplinaire » – EPI) et, pour couronner le tout, un nouveau DNB à compter de la session 2017 qui devrait à nouveau connaître une nouvelle formule pour la session 2021.
Une réussite en demi-teinte
Si le collège n’en finit plus d’être « nouveau », c’est qu’il n’a pas vraiment su résoudre, notamment sur le plan pédagogique, le problème de l’accueil, de la formation et de l’orientation de l’ensemble de la génération. Il n’a pas complètement su relever le défi d’être à la fois le collège « pour tous » et « pour chacun ». La démocratisation quantitative (l’accueil de tous les élèves) n’a de sens que si elle s’accompagne d’une démocratisation qualitative qui permette à chacun de tirer le meilleur parti de ses possibilités. Ce dont il s’agit, c’est bien de prendre en compte de manière positive l’hétérogénéité des publics accueillis, qu’il s’agisse de niveau scolaire, d’intérêts ou de comportement.
Du collège unique à l’« école du socle commun »
C’était déjà la proposition du Haut conseil de l’éducation (rapport cité, 2010) qui constatait que, si le collège unique a constitué une avancée dans la démocratisation du système éducatif, dans son organisation et dans la prise en compte de la difficulté scolaire, il est aujourd’hui « en panne » : ses performances sont médiocres et en baisse (telles qu’elles peuvent être mesurées, notamment, par les enquêtes internationales), les différences de réussite en fonction de l’origine sociale des élèves se sont accrues (ou en tout cas n’ont pas été régulées),les difficultés et le malaise des enseignants de collège est notoire, tandis que les problèmes de vie scolaire se multiplient (violence, absentéisme notamment). Finalement, la haute assemblée considérait que le collège n’a d’« unique » que le nom, puisqu’il y a des disparités importantes entre les établissements (notamment en fonction de leur situation géographique, ou encore de leur « classement »), des dispositifs de prise en charge spécifiques qui s’empilent sans cohérence véritable, et des stratégies de contournement (notamment en matière de carte scolaire) qui ne bénéficient qu’aux familles les mieux informées.
À la tentative de faire du collège un « petit lycée » pour tous, devrait se substituer une « école du socle commun » qui, intégrant l’école primaire et le collège, constituerait le cursus de la scolarité obligatoire (avec, à la clé, une modification importante du service et du travail des enseignants).
Remarque
Une loi d’orientation plus tard, dans le contexte de la « refondation de l’école de la République », deux dispositifs tendent à mieux intégrer l’école et le collège : d’une part, la nouvelle définition des cycles, la classe de 6e étant désormais intégrée au cycle de consolidation (avec le CM1 et le CM2) ; d’autre part, la création du conseil école-collège (CEC) (cf. Retour d’expérience sur l’accueil des élèves de 6e) qui vise à programmer des actions communes aux deux institutions.
Des parcours diversifiés
Accueillir toute une classe d’âge, lui assigner des objectifs d’apprentissage communs… Cette « unicité » formelle n’est possible qu’au prix de la mise en place de multiples mécanismes de différenciation qui visent soit à compenser certaines difficultés liées à l’origine sociale des élèves (c’est l’éducation prioritaire, mise en place en septembre 1981 et dont les établissements classés REP et REP+ constituent la dernière mouture), soit à prendre en compte des difficultés individuelles d’apprentissage (aide individualisée, accompagnement personnalisé), des difficultés de comportements (dispositifs relais), ou encore à préparer certains élèves peu motivés à une orientation vers l’enseignement professionnel (la préprofessionnalisation au collège ou l’enseignement adapté).
Sous une apparente uniformité, le collège est riche de dispositifs censés permettre de prendre en compte la diversité des élèves qu’il accueille.
Un palier d’orientation essentiel
Paradoxalement, tout en affichant un projet égalitaire, le collège est aussi le moment de la scolarité où se noue le destin scolaire des élèves : en fonction de leur réussite ou de leurs difficultés, du temps qu’ils vont mettre à en parcourir les étapes, ils vont pouvoir poursuivre leur scolarité vers l’enseignement général et technologique (pour 60 % d’entre eux), l’enseignement professionnel (pour 26 % d’entre eux), l’apprentissage ou, pour certains, se retrouver en situation d’échec et de déscolarisation.
Le collège constitue donc le palier essentiel de l’orientation des élèves, qui prend la forme d’un processus continu dès le cycle central, pour se conclure en fin de 3e. Le CPE est partie prenante de ce processus, en tant que membre du conseil de classe et parce qu’il contribue à aider les élèves et les familles dans leurs choix, en collaboration avec les professeurs principaux et le psychologue de l’Éducation nationale.
Remarque
Depuis 2014 une expérimentation est menée dans une centaine de collèges visant à donner « le dernier mot » aux parents en matière d’orientation. Il semble qu’elle ne modifie qu’à la marge les flux d’orientation (cf. Participer à l’orientation des élèves au collège).