La qualification d’entité adjudicatrice s’applique aux acheteurs exploitant directement un réseau
En l’espèce, une commune avait engagé, en tant qu’entité adjudicatrice, une consultation sous la forme d’une procédure avec négociation en vue de conclure un accord-cadre à bons de commande portant sur le transport de voyageurs. Selon l’article L. 1212-1 du Code de la commande publique : « Les entités adjudicatrices sont : / 1° Les pouvoirs adjudicateurs qui exercent une des activités d’opérateur de réseaux définies aux articles L. 1212-3 et L. 1212-4 ; / () ». Aux termes des dispositions de l’article L. 1212-3 du même Code : « Sont des activités d’opérateur de réseaux : / () / 4° Les activités d’exploitation de réseaux destinés à fournir un service au public dans le domaine du transport par chemin de fer, tramway, trolleybus, autobus, autocar, câble ou tout système automatique (). / Le service de transport est regardé comme fourni par un réseau de transport lorsqu’une autorité nationale ou territoriale définit les conditions générales d’organisation du service, notamment en ce qui concerne les itinéraires à suivre, la capacité de transport disponible ou la fréquence du service ». Selon le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble, « Lorsqu’une autorité compétente pour l’organisation et la gestion d’un réseau confie par voie de marché l’exploitation de ce réseau à un tiers, elle ne peut être considérée comme agissant en qualité d’opérateur de réseau au sens de ces dispositions, alors même qu’elle en définit les conditions d’organisation, en assure le contrôle du fonctionnement et en assume le risque économique. Ainsi, un tel acte n’est pas constitutif d’une activité exercée par une entité adjudicatrice. En revanche, un marché limité à l’acquisition d’un équipement destiné à la constitution d’un réseau de transport public ou s’intégrant à un réseau de transport public déjà constitué constitue une activité exercée par une entité adjudicatrice ».
Une erreur de qualification qui a des conséquences sur la légalité de la procédure de passation du marché
Le Code de la commande publique (art. R. 2124-4) autorise librement la procédure avec négociation pour les entités adjudicatrices au lieu et place de l’appel d’offres pour les pouvoirs adjudicateurs. La commune ne pouvant être regardée comme exerçant elle-même une activité d’opérateur de réseau, elle aurait dû respecter les dispositions applicables aux pouvoirs adjudicateurs et non aux entités adjudicatrices. Peu importe que les deux candidats ont été en mesure de négocier ce qui a permis une amélioration significative de l’offre de la société requérante. Ainsi, le recours irrégulier à la procédure avec négociation est susceptible d’avoir exercé une influence sur la présentation des offres initiales des candidats et par conséquent sur leur classement et sur le choix de l’attributaire. La requérante est ainsi fondée à soutenir que le recours irrégulier à la procédure avec négociation doit être regardé comme susceptible de l’avoir lésée. Dès lors que le manquement initial dans le choix de la procédure est susceptible d’avoir exercé une influence sur les offres des candidats et qu’aucun motif d’intérêt public n’est opposé, la requérante est fondée à solliciter l’annulation de l’ensemble de la procédure de passation du marché. Selon le juge des référés, la procédure de passation du marché public de transport de voyageurs doit être annulée au stade de l’analyse des offres.
Dominique Niay
Texte de référence : Tribunal administratif de Grenoble, ord. 25 août 2025, req. n° 2508124
