L’État encore condamné pour la pollution de l’air

Publié le 18 octobre 2022 à 8h05 - par

La France une nouvelle fois épinglée sur la pollution de l’air : après une première amende en août 2021, l’État a de nouveau été condamné lundi 17 octobre 2022 par le Conseil d’État à une somme record de 20 millions d’euros pour n’avoir pas suffisamment agi.

L'État encore condamné pour la pollution de l'air

« Après avoir ordonné à l’État, depuis 2017, de faire respecter les normes européennes, reprises en droit français, de qualité de l’air, le Conseil d’État le condamne aujourd’hui à payer deux nouvelles astreintes de 10 millions d’euros pour les deux périodes allant de juillet 2021 à janvier  2022 et de janvier à juillet 2022 », indique la plus haute juridiction administrative française dans sa décision.

Si le Conseil d’État reconnaît des « améliorations dans la durée », il estime que la situation « reste fragile ou mauvaise » dans plusieurs zones.

Si Grenoble ne présente plus de dépassement en matière de concentration en dioxyde d’azote, les « seuils limites (…) – qui doivent être respectés depuis 2010 – restent dépassés (…) notamment dans les agglomérations de Paris, Lyon et Marseille », souligne-t-il.

L’État avait déjà été condamné en août 2021 à verser 10 millions d’euros pour ne pas avoir renforcé suffisamment son dispositif contre la pollution, une décision qui portait alors sur le premier semestre 2021.

« Compte tenu tout à la fois de la persistance du dépassement des seuils limites mais aussi des améliorations constatées depuis (…), le montant de l’astreinte semestrielle n’est ni majoré ni minoré », explique le Conseil d’État, qui a suivi la recommandation formulée le 19 septembre 2022 par le rapporteur public.

Surmortalité

« À ce jour, les mesures prises par l’État ne garantissent pas que la qualité de l’air s’améliore de telle sorte que les seuils limites de pollution soient respectés dans les délais les plus courts possibles », estime le Conseil d’État.

La pollution, liée notamment au trafic automobile, représente un enjeu important de santé publique. La mortalité liée à la pollution de l’air ambiant reste un risque conséquent en France avec 40 000 décès prématurés attribuables chaque année aux particules fines, soulignait Santé publique France l’an dernier.

Les 20 millions de l’astreinte iront essentiellement à des organismes publics luttant contre la pollution de l’air et 50 000 euros seront reversés à l’association les Amis de la Terre, qui avaient saisi initialement le Conseil d’État en 2017.

« C’est une décision qui nous apparaît raisonnable. Le Conseil d’État constate comme nous que sa décision de 2017 n’est pas respectée et que sa première condamnation non plus », s’est félicité Louis Cofflard, avocat des Amis de la Terre.

« Le juge fait une bonne balance entre quelques progrès constatés et la réticence de l’État à s’exécuter », a-t-il ajouté. « On peut arriver à de nouvelles condamnations chaque semestre tant que l’État ne s’exécutera pas », estime Me Cofflard.

En matière climatique, deux décisions de justice distinctes, dans les dossiers dits de « Grande-Synthe » et de « l’Affaire du siècle » ont reconnu en 2021 les manquements de la France.

Pour la pollution de l’air, une première décision remonte à juillet 2017. Le Conseil d’État avait alors enjoint à l’État de mettre en œuvre des plans de réduction des niveaux de particules fines PM10 ou de dioxyde d’azote (NO2, notamment associé au trafic routier) dans treize zones.

L’État prend acte

Depuis, le Gouvernement a initié plusieurs actions, dont un plan en 2021 visant à réduire de moitié d’ici à 2030 les polluants atmosphérique induits par le chauffage au bois domestique, première source d’émissions de particules fines, diverses aides à l’acquisition de véhicules peu polluants, telles que le bonus écologique et la prime à la conversion. Il a également crée des zones à faibles émissions mobilités (ZFE-m) dans une trentaine de grandes agglomérations supplémentaires d’ici à la fin de l’année 2024.

Il a publié jeudi 13 octobre 2022 un bilan 2021 de la réduction des polluants atmosphériques, montrant des baisses significatives depuis 20 ans – en prenant un indice 100 en 2000, le dioxyde de souffre est maintenant à 16, l’oxyde d’azote est à 40 – tout en reconnaissant la persistance des dépassements des seuils réglementaires.

Le ministère de la Transition écologique a indiqué lundi 17 octobre « prendre acte » de la décision du Conseil d’État. Christophe Bechu doit recevoir prochainement les élus concernés par les ZFE avec pour objectif « d’accélerer sur l’amélioration de la qualité de l’air » et de travailler « sur la décarbonation des mobilité urbaines », est-il ajouté.

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