La biodiversité, le nouveau défi de Nicolas Hulot

Publié le 17 mai 2018 à 15h16 - par

La biodiversité, « tout le monde s’en fiche ». Nicolas Hulot, auteur de ce cri de détresse devant l’Assemblée nationale, présente vendredi 18 mai ses pistes pour tenter de protéger un monde du vivant frappé d’un déclin à la rapidité inédite.

La biodiversité, le nouveau défi de Nicolas Hulot

L’urgence est criante : destruction de milieux naturels, pollutions persistantes, surexploitation des ressources, boom des espèces invasives, climat déréglé… accélèrent toujours plus la disparition de populations animales et végétales.

Déclin « vertigineux »

La France possède un patrimoine très riche, avec notamment plus de 16 500 espèces endémiques (à 4/5e en Outre-mer), ce qui lui confère aussi « une responsabilité internationale », note l’Observatoire national de la biodiversité (ONB).

Mais les chiffres brossent un bien sombre tableau.

Une étude choc a récemment montré le déclin « vertigineux » des oiseaux des campagnes : – 60 % de moineaux friquet en 10 ans, moins un tiers d’alouettes des champs en 15 ans… selon le CNRS et le Muséum d’Histoire naturelle.

En 2016, près d’un tiers des espèces évaluées dans les listes rouges nationales étaient éteintes ou menacées. Les chauve-souris par exemple, utiles insectivores et pollinisateurs, ont perdu près de la moitié de leur effectif entre 2006 et 2014.

Selon l’Observatoire, seules la moitié des zones humides, 43 % des eaux de surface, et 22 % des milieux naturels d’intérêt européen sont en bon état.

Autant d’écosystèmes ou espèces qui ne peuvent plus rendre des services pourtant vitaux à l’homme, qu’il s’agisse de fournir eau, nourriture, pharmacopée… de polliniser les cultures, stabiliser les sols ou éviter les crues.

Béton et goudron

Pointée du doigt, l’artificialisation des sols a fait perdre depuis 2006 à l’agriculture et aux milieux naturels une surface équivalente au département de la Seine-et-Marne, en grande partie sous la forme de surfaces goudronnées, selon l’ONB.

Prairies et pâturages paient le tribut le plus lourd, mais les cours d’eau sont aussi de plus en plus fragmentés par des ouvrages (15 obstacles à l’écoulement pour 100 km de cours d’eau en 2017).

En présentant sa vision, en juillet 2017, Nicolas Hulot l’avait affirmé : « L’objectif « zéro artificialisation des terres » doit demeurer (…). Ne serait-ce que pour garantir la souveraineté alimentaire ».

Le nouveau ministre avait annoncé « une pause » dans les grands projets d’infrastructures, pour raisons budgétaires.

Depuis, le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes a été abandonné. Mais d’autres se poursuivent. Celui du canal Seine-Nord a été relancé et l’État vient de faire appel d’une décision de justice retoquant la zone d’aménagement d’Europacity, au grand dam des opposants à ce projet de méga-complexe commercial au nord de Paris.

La France est aussi le 2e utilisateur de produits phytosanitaires en Europe, et championne des dérogations aux interdictions. « La surveillance met en évidence la présence généralisée de pesticides dans les milieux aquatiques », avec « les teneurs les plus élevées dans les zones de grandes cultures, arboriculture et viticulture », note l’Insee dans son bilan environnement pour 2017.

Grosses bêtes

Mais il y a aussi quelques nouvelles positives : la « hausse constante » depuis 10 ans des moyens affectés à la biodiversité (plus de 2 milliards d’euros en 2014), une prise de conscience citoyenne, énumère l’ONB. Des espèces se portent mieux : la loutre, le castor…

Mesures et lois se sont aussi succédé, bien que pas toujours appliquées.

Nicolas Hulot, qui évaluera « cet été » son maintien au gouvernement, veut voir les progrès.

Mercredi 16 mai sur BFMTV, il a loué le rôle de la France en faveur de l’interdiction des néonicotinoïdes et du glyphosate.

« On va changer d’échelle notamment dans les nouvelles formes de production agricole », assure-t-il. « Il faut que dans les collectivités, les citoyens, chacun d’entre nous s’interroge sur sa responsabilité ».

Vendredi 18 mai, il doit présenter plusieurs « axes de mobilisation », avant consultations et adoption d’un plan en juillet, pour que « la France prenne sa part de responsabilité, qu’on arrête d’empoisonner la nature, d’artificialiser les sols ».

En attendant, il a déjà entrepris de favoriser deux grosses bêtes médiatiques, le loup et l’ours, quitte à s’aliéner les éleveurs d’ovins.

« On dit bravo et merci » pour les ours, souligne Jean-David Abel, de France Nature Environnement, qui cependant prévient le gouvernement : « Il ne faut pas en faire l’arbre qui cache la forêt ».

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