Loi handicap de 2005 : bilan et perspectives pour l’école inclusive

Publié le 28 janvier 2025 à 14h00 - par

Au vingtième anniversaire de la loi handicap de 2005, l’accueil des élèves en situation de handicap à l’école a énormément progressé. Toutefois, du chemin reste à faire pour améliorer leur scolarisation, en particulier d’un point de vue qualitatif.

Loi handicap 2005 : bilan et perspectives pour l'école inclusive
© Par Thares2020 - stock.adobe.com

La loi handicap du 11 février 2005 reconnaît le principe d’une scolarisation pour tout enfant en milieu ordinaire. Vingt ans plus tard, on constate de très nombreux progrès et les chiffres montrent la concrétisation de ce droit fondamental, a précisé Caroline Pascal, directrice générale de l’enseignement scolaire, le 15 janvier 2025, lors d’une table ronde organisée par la commission de la culture, de l’éducation, de la communication et du sport du Sénat. Alors qu’en 2006, 155 000 enfants en situation de handicap étaient scolarisés, ils sont aujourd’hui 519 000, dont six sur dix bénéficient d’un accompagnant d’élève en situation de handicap (AESH). Et, en 2022, l’État a consacré plus de 3,7 milliards d’euros à cette politique. Malgré tout, « des défis demeurent et la loi de 2005 est un processus vivant, en pleine évolution », a constaté Caroline Pascal.

Il faudrait notamment réfléchir à une nouvelle étape pour répondre aux besoins de chaque élève, en facilitant les parcours administratifs, en continuant à former et accompagner les équipes pédagogiques et en travaillant avec les acteurs du médico-social. Thierry Bour, conseiller école inclusive et enseignement supérieur du délégué interministériel à la stratégie nationale pour les troubles du neuro-développement, a rappelé que trois plans se sont succédé sur ce thème entre 2005 (plan autisme) et 2017. Ils ont apporté de nombreuses évolutions : formations spécifiques des enseignants, scolarisation plus inclusive avec accompagnement, unités localisées pour l’inclusion scolaire (Ulis), unités d’enseignement en maternelle active (UMA)… La stratégie 2018-2022 pour la scolarisation en milieu ordinaire prévoyait la création d’un poste par département pour accompagner les enseignants sur le sujet. La stratégie 2023-2027 a élargi cette disposition à l’ensemble des troubles du neuro-développement*. Au total, 589 dispositifs TND accompagnent actuellement 4 900 élèves et 210 nouveaux dispositifs seront créés d’ici 2027.

Il n’empêche que, selon Thierry Bour, il faudrait « simplifier le panel de solutions qui devient complexe, afin que les parents sachent vers quels dispositifs se tourner, et que les professionnels sachent à quels besoins ils répondent ». Par ailleurs, il conviendrait d’assouplir l’offre pour mieux couvrir certains territoires, notamment en milieu rural. Car, lorsqu’une école est couverte par un dispositif, cela ne concerne pas pour autant les autres établissements du territoire. Thierry Bour estime qu’il faudrait aussi assurer cette meilleure couverture territoriale en évitant de trop spécialiser les dispositifs par typologie de trouble : mieux vaudrait repenser les approches par besoins (qui peuvent être similaires) et non par troubles. Reste également à traiter le sujet de la scolarisation des élèves avec des troubles plus sévères, ainsi que la qualité de l’accompagnement, pour rendre les apprentissages plus accessibles, les pratiques n’étant pas toujours conformes aux recommandations des bonnes pratiques professionnelles pour le secteur social et médico-social de la Haute autorité de santé (HAS).

Outre les bâtiments scolaires qui doivent être adaptés à l’accueil de tous les élèves, l’inclusion des élèves en situation de handicap passe aussi par le numérique. En la matière, 21 démarches essentielles dans l’enseignement ont été identifiées. Leur accessibilité numérique a été améliorée, mais on relève seulement 73 % de conformité au référentiel général d’accessibilité (RGA), a précisé la déléguée interministérielle à l’accessibilité, Isabelle Saurat. Car, non seulement les sites doivent être techniquement accessibles, mais leur contenu pédagogique doit l’être aussi.

Ce qui n’est pas accessible est hors la loi

Dans son article 111–1, le Code de l’éducation précise que le service public de l’éducation reconnaît que tous les enfants partagent la capacité d’apprendre et de progresser, a rappelé Jérémie Boroy, président du Conseil national consultatif des personnes handicapées. « C’est ce cadre que nous devons tous avoir en tête », conseille-t-il, ajoutant que même si, en vingt ans, beaucoup de choses ont changé pour l’école, il faut renforcer la qualité des dispositifs proposés. Alors que, selon la loi, l’élève doit être inscrit dans l’école de référence de son quartier et c’est de là qu’on trouve les dispositifs et solutions d’accompagnement, ce n’est pas toujours le cas. C’est pourquoi tous les élèves, quels qu’ils soient, doivent avoir un numéro d’identification national étudiant (INE) « qui fait basculer la responsabilité dans le périmètre du ministère de l’Éducation nationale ». Mais certains élèves n’en ont pas. Par ailleurs, le prérequis de l’accessibilité est… l’accès à l’école. Or si elle n’est pas aux normes il n’y a pas d’accès. La loi de 2005 avait fixé une échéance à dix ans. En 2015, les pouvoirs publics ont accordé un peu plus de temps à travers des agendas d’accessibilité programmée, à 3, 6 ou 9 ans. Mais depuis septembre 2024, ces agendas sont terminés et aujourd’hui, « ce qui n’est pas accessible est hors la loi », a expliqué Jérémie Boroy. Pour lui, il faudrait aussi programmer la formation les enseignants, comme pour les bâtiments.

Quant à la coopération avec le secteur médico-social, il conviendra de s’assurer de la réussite des pôles d’appui à la scolarité (PAS) qui visent à adopter rapidement les aménagements pédagogiques et à mieux répondre aux besoins spécifiques des élèves. Une expérience menée dans quatre départements : Eure-et-Loir, Var, Aisne, Côte-d’Or. Il faudra s’assurer que tout le territoire en est pourvu d’ici 2027. Et, attention au terme d’« école inclusive ». « Il y a une seule école, c’est l’école pour tous et elle doit être capable de s’adapter à tous les profils », insiste Jérémie Boroy.

Marie Gasnier

* Autisme, Dys, troubles de l’attention avec ou sans hyperactivité concerne, trouble du développement intellectuel

Colloque

Le 11 février 2025 à 14h, le Sénat organise un colloque à l’occasion du vingtième anniversaire de la loi handicap de 2005.


On vous accompagne

Retrouvez les dernières fiches sur la thématique « Éducation »

Voir toutes les ressources numériques Éducation