Les maires alertent sur les inégalités croissantes dans l’accès aux soins en France

Publié le 9 décembre 2020 à 8h39 - par

Une désertification médicale qui s’accélère, des habitants des zones rurales qui accèdent moins aux hôpitaux : l’AMF et les maires ruraux alertent sur les inégalités croissantes dans l’accès aux soins en France, dans deux études publiées simultanément.

Les maires alertent sur les inégalités croissantes dans l'accès aux soins en France

Le constat est sans appel : « L’offre de soins est mal répartie sur le territoire et elle se rétracte inexorablement », affirme Séverine Salgado, directrice santé à la Mutualité française, qui présentait mardi 8 décembre 2020 son premier baromètre santé réalisé avec l’Association des Maires de France (AMF). 

« La conséquence directe c’est que 11,1 % des Français habitaient dans un désert médical » en 2019, année sur laquelle porte l’étude, soit 7,4 millions de Français contre 5,7 millions en 2016 (8,6 %). « Il y a une accélération de la désertification médicale », constate-t-elle.

Ces chiffres sont plus importants que ceux de la statistique publique (Drees) qui estimait en février à 3,8 millions de personnes le nombre de Français vivant dans un désert médical en 2018 (5,7 % de la population), qui se définit comme « une zone où les habitants ne peuvent en moyenne bénéficier au plus que de 2,5 consultations de médecine générale par an ».

« Si nous ne faisons rien, la situation va se détériorer », prévient Mme Salgado, rappelant que beaucoup de généralistes se rapprochent de l’âge de la retraite. « Or, c’est dans les départements où la densité médicale est la plus faible que les médecins sont aussi les plus âgés. »

Écart considérable

 
La seconde étude, réalisée par l’Association des maires ruraux de France (AMRF) se veut encore plus alarmiste. Selon elle, les habitants des régions rurales « consomment 20 % de soins hospitaliers en moins que ceux des villes ».

« Cela démontre, hélas, qu’à force d’être éloignés de l’accès aux soins, les gens ne vont plus ou vont moins chez le médecin ou, quand ils y vont, trop tard », regrette auprès de l’AFP Dominique Dhumeaux, premier vice-président de l’AMRF et maire de Fercé-sur-Sarthe, localité de 600 habitants.

« 20 % en moins, c’est considérable au regard de l’idée que l’on se fait de l’égalité entre citoyens », abonde l’auteur de l’étude Emmanuel Vigneron, professeur des universités à Montpellier et spécialiste de l’approche territoriale de la santé.

« De deux choses l’une : ou les citadins consomment trop ou alors les gens des campagnes consomment injustement moins et donc il faut y remédier », dit-il à l’AFP, à partir de cette étude que l’AMRF présente comme « inédite », basée sur les données d’hospitalisation qui sont publiques.

« Pourquoi on consomme moins de soins ? Parce qu’on est loin, parce qu’on a moins d’informations, parce qu’il y a moins de médecins », ajoute M. Vigneron, auteur du livre « La santé au 21e siècle », aux éditions Berger-Levrault. 

Selon le baromètre de l’AMF, la France dénombre en moyenne 151 médecins généralistes pour 100 000 habitants, mais les écarts sont très importants entre les départements. Celui de l’Eure est celui qui en compte le moins (94) et celui des Hautes-Alpes est celui qui en dispose le plus (248).

« Nous savions le désert médical. Nous savions aussi la dégradation dans certaines régions », réagit François Baroin, le président de l’AMF, appelant à un « big bang médical territorial » pour y remédier.

« Nous avons formulé des propositions en termes de réorganisation de santé », ajoute-t-il, rappelant que l’accès aux soins ne fait pas partie pour l’instant des compétences des maires.

« Il faut de nouveaux véhicules législatifs pour que les maires ou les intercommunalités puissent être des acteurs du financement de la médecine généraliste, hospitalière », affirme M. Baroin.

Pour Thierry Baudet, président de la Mutualité française, le baromètre « illustre les besoins bien réels dans l’ensemble de nos territoires », plaidant pour « une nouvelle alliance entre l’État et ses territoires ».

« La santé ne peut être réduite à un schéma national et vertical se déclinant partout de la même manière », insiste-t-il.

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