Analyse des spécialistes / Élus

Quel espace d’expression pour les élus de l’opposition au sein du conseil municipal ?

Publié le 24 janvier 2024 à 15h50 - par

Le député M. Frédéric Zgainski a déposé une proposition de loi visant à renforcer la démocratie locale et le fonctionnement du conseil municipal1. Elle vise à améliorer le fonctionnement du conseil municipal et les conditions de travail des élus locaux et de renforcer les moyens qui sont à leur disposition. Quelques dispositions concernent les élus de l’opposition.

Quel espace d'expression pour les élus de l'opposition au sein du conseil municipal ?
© Par Olivier Le Moal - stock.adobe.com

Le rapport de la commission des lois sur la proposition de loi2 indique en préambule que : « une enquête réalisée par l’Association nationale des élus locaux d’opposition (AELO) auprès de 500 élus municipaux d’opposition, publiée en juin 2023, est venue étayer ce constat : 60 % des conseillers municipaux d’opposition déclarent ne pas disposer d’un local pour se réunir, seulement 14 % perçoivent une indemnité de fonction, 77 % indiquent que la taille de leur espace d’expression réservé n’excède pas 2 000 signes et 73 % considèrent que les délais de transmission de l’ordre du jour et des annexes ne sont pas suffisants pour préparer la réunion du conseil municipal. Par ailleurs, cette enquête met en évidence la forte judiciarisation de la vie politique locale : 24 % des élus minoritaires indiquent que le maire a engagé des démarches judiciaires à leur encontre et 33 % des élus minoritaires confirment avoir engagé des actions en justice contre leur maire. Cette judiciarisation est le symptôme d’une tension croissante des relations entre les élus locaux et du manque de marges de manœuvre de ces derniers. Elle a des conséquences financières pour les élus, qui financent souvent ces procédures sur leurs deniers personnels, et participe à l’allongement des délais pour la résolution de problèmes, alors qu’une issue consensuelle pourrait être trouvée. Elle participe aussi à l’encombrement de nos tribunaux administratifs »3.

Le texte retenu par la commission des lois crée un espace d’expression pour les élus qui n’appartiennent pas à la majorité municipale.

1. La mise à disposition de locaux pour les élus de l’opposition

L’article 4 bis de la proposition de loi reprend les garanties jurisprudentielles relatives à la mise à disposition d’un local pour les élus n’appartenant pas à la majorité municipale et à l’espace d’expression réservé aux conseillers municipaux. La proposition de loi modifie l’article L. 2121-27 du CGCT pour prévoir que le local commun est mis à disposition des élus n’appartenant pas à la majorité municipale dans un délai maximum de quatre mois. De plus, elle modifie l’article L. 2121-27-1 du CGCT pour prévoir que les élus municipaux disposent d’un espace d’expression réservé sur toute publication d’information générale de la commune, quel que soit le support de cette publication. Cet espace doit présenter un caractère suffisant et être équitablement réparti eu égard aux caractéristiques de la publication.

2. La création d’une commission des finances présidée par un élu de l’opposition

L’article 5 de la proposition de loi crée une commission chargée des questions relatives aux finances dans chaque commune, dont la présidence est confiée, dans les communes de 1 000 habitants et plus, à un conseiller n’appartenant pas à la majorité municipale, sauf si aucun conseiller n’a déclaré ne pas appartenir à la majorité municipale. En outre, une obligation d’instituer des commissions municipales dans les communes de 3 500 habitants et plus a été créée.

3. La saisine de la chambre régionale des comptes sur demande du conseil municipal

L’article 7 de la proposition de loi donne la possibilité aux trois cinquièmes des membres du conseil municipal de demander au préfet qu’il saisisse la chambre régionale des comptes (CRC) pour un contrôle des comptes ou un examen de la gestion de la commune. Cette disposition permettrait aux conseillers municipaux, notamment de l’opposition, d’alerter le préfet d’un problème de gestion manifeste des finances de la commune.

Le texte est encore en discussion et pourra être substantiellement enrichi. La proposition de loi prévoyait notamment la création d’un poste de questeur dans les communes de 3 500 habitants et plus, confié à un élu de l’opposition. Supprimée par la commission des lois, cette disposition pourrait être de nouveau débattue.

Dominique Volut, Avocat-Médiateur au barreau de Paris, Docteur en droit public


1. Proposition de loi visant à renforcer la démocratie locale et le fonctionnement du conseil municipal, n° 1964, déposée le 5 décembre 2023.

2. Rapport n° 2051 de la commission des lois sur la proposition de loi de M. Frédéric Zgainski et plusieurs de ses collègues visant à renforcer la démocratie locale et le fonctionnement du conseil municipal (1964).

3. Ibidem, p. 1.

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