Une crise politique qui suspend les réformes de la fonction publique
À une semaine d’un vote de confiance décisif le 8 septembre 2025, la chute déjà actée par les oppositions du gouvernement Bayrou provoque une véritable paralysie politique et institutionnelle. Cette instabilité retarde et, pour l’instant, bloque les réformes initiées depuis début 2024. Les collectivités territoriales, tout comme les agents de l’État, se retrouvent plongés dans une période d’attente anxieuse où règne l’incertitude. L’arrêt brutal des discussions fragilise encore davantage le climat social.
L’agenda social de la fonction publique, qui avait été construit autour d’une série de réformes ambitieuses, est désormais mis en suspens. Il avait pour ambition de transformer profondément la gestion des Ressources humaines publiques. La première orientation portait sur la refonte des rémunérations et des carrières, avec un objectif clair :
- moderniser les grilles indiciaires,
- clarifier les régimes indemnitaires,
- et mieux reconnaître les parcours professionnels.
Une deuxième orientation visait à renforcer le dialogue social de proximité en redéfinissant le rôle des comités sociaux territoriaux et en précisant leurs prérogatives en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail. Une troisième priorité concernait l’égalité professionnelle et la lutte contre toutes les formes de discriminations, avec la prolongation des plans d’action obligatoires pour l’égalité entre les femmes et les hommes et le renforcement des obligations de transparence.
L’agenda comportait également un chantier consacré à l’attractivité des métiers publics, incluant la fidélisation des contractuels, la valorisation des métiers en tension et l’accompagnement des transitions numériques et environnementales. Enfin, il prévoyait une simplification des parcours professionnels, destinée à faciliter la mobilité entre les trois fonctions publiques et à valoriser les compétences acquises. Toutes ces réformes, aujourd’hui suspendues, sont ressenties comme une perte de temps et d’énergie. Les fédérations syndicales dénoncent ce qu’elles considèrent comme un abandon pur et simple du dialogue social. Alors qu’un fragile climat de coopération avait commencé à s’installer, la suspension des discussions engendre un profond sentiment de trahison et alimente une défiance croissante entre agents et institutions.
Des tensions sociales exacerbées par les choix budgétaires
Des mesures budgétaires impopulaires parmi les agents publics
À cette crise politique et institutionnelle s’ajoutent des mesures budgétaires perçues comme particulièrement injustes. La décision de supprimer plusieurs milliers de postes dans la fonction publique, notamment dans les fonctions support et administratives, provoque une opposition massive. Les collectivités territoriales redoutent non seulement une perte de compétences essentielles, mais aussi une dégradation tangible de la qualité des services publics rendus aux usagers. Les agents restants, de leur côté, craignent une surcharge de travail et un accroissement de la pression professionnelle.
Absence de revalorisation salariale pour 2025 dans la fonction publique
Dans le même temps, l’absence totale de revalorisation salariale pour 2025 suscite un profond ressentiment. Après deux années marquées par des revalorisations ponctuelles du point d’indice, beaucoup espéraient une nouvelle mesure pour compenser les effets persistants de l’inflation. L’annonce du gel du point d’indice est vécue comme une provocation, renforçant le sentiment de manque de reconnaissance à l’égard des agents publics, dont le pouvoir d’achat est déjà fragilisé.
Mobilisation syndicale : grèves prévues les 10 et 18 septembre
Face à cette double menace, celle des suppressions de postes et du gel salarial, les organisations syndicales réagissent avec force. Elles ont lancé un appel à la mobilisation pour les 10 et 18 septembre 2025. Ces journées de grève nationale, soutenues par l’ensemble des grandes centrales syndicales, visent à obtenir :
- l’arrêt des suppressions d’effectifs,
- l’ouverture immédiate de négociations salariales,
- et la reprise des chantiers de l’agenda social.
Ces mobilisations devraient avoir des répercussions visibles dans de nombreux services publics locaux, notamment dans les crèches, les écoles, les services techniques ainsi que dans les administrations départementales et régionales. Les perturbations seront probablement marquées et largement relayées dans les médias, accentuant la pression sur les décideurs.
La rentrée 2025 illustre la fragilité du lien entre instabilité politique nationale et équilibre social local. Entre réformes suspendues, suppressions de postes et absence de revalorisation salariale, la défiance des agents atteint un niveau critique. Pour les responsables RH territoriaux, l’enjeu est double : préserver la confiance interne et garantir la continuité des services publics. Dans ce contexte incertain, la capacité des collectivités à inventer des marges de manœuvre locales – qu’il s’agisse d’initiatives en matière de qualité de vie au travail, de reconnaissance non financière ou de communication transparente – sera déterminante pour maintenir une cohésion sociale mise à rude épreuve.
