Menu

Yvonic Ramis : “La politique d’attractivité du territoire de l’Allier infuse dans ses services”

Administration

Notre rendez-vous « Parlons Territoires », en partenariat avec la CASDEN Banque Populaire, a pour objectif de décrypter, par le biais d'entretiens avec des élus locaux et des cadres territoriaux, comment une administration travaille au service d'un projet politique. Pour cette dernière édition, WEKA s'est rendu dans le département de l'Allier qui a mis en place une ambitieuse et originale politique d'attractivité. Interview d'Yvonic Ramis, son DGS.

Comment une administration se met-elle en marche pour répondre à une forte volonté du politique en termes d’attractivité du territoire ? Quelle traduction dans l’organisation ?

La stratégie très forte impulsée par notre président, Claude Riboulet, sur la démarche d’attractivité du territoire qu’elle soit résidentielle, économique ou touristique a chamboulé nos repères et notre manière de faire en nous obligeant à prioriser, cibler, cesser de nous disperser et apprendre à mieux agir avec les partenaires du département.
Il a fallu d’abord remettre de l’ordre dans nos divers satellites, étape indispensable avant la création d’une agence « Allier Bourbonnais Attractivité » en substitution de l’ancien comité départemental du tourisme. Nous avons ensuite recruté sa directrice, Pascale Fell, et mené une étude sur nos atouts, nos forces et nos faiblesses. Autre sujet stratégique, notre direction de la communication externe allait à vau-l’eau, sans commande claire. Nous avons commandité un audit externe, puis pris des décisions difficiles et recruté un nouveau directeur de la communication, Laurent Deulin. Même s’il a naturellement des liens fort avec le cabinet, il m’est rattaché directement, un message que j’ai voulu envoyer aux directions, la communication n’étant pas une direction politique satellisée qui bosse toute seule.
Nous avons, enfin, défini clairement les domaines de l’agence et de la communication externe. Elles ont appris à se connaitre, à travailler ensemble et compris l’efficacité de leur complémentarité. À ce moment-là seulement, j’ai considéré que nous avions la capacité et les bases indispensables pour répondre à la volonté politique du président.

Comment le faire dans un contexte financier difficile ?

Le paradoxe est que nous devons être à la fois extrêmement vigilant financièrement tout en optimisant notre attractivité, ce qui veut dire penser développement et être plus que jamais un employeur attractif et capable de fidéliser des compétences. Cela passe par un important travail de réseaux, politiques et professionnels, peu visible du grand public mais qui porte ses fruits. Nous savons qu’au stade où nous en sommes, il est inutile de se lancer dans de grandes campagnes onéreuses nationales ou dans le métro parisien, et nous nous concentrons, en fonction de nos moyens, sur nos fondamentaux et nos atouts. Trois me semblent correspondre à l’identité de ce territoire : authenticité, nature et convivialité.
Authenticité, parce que nous avons un patrimoine historique exceptionnel. Nature, parce nous sommes entourés d’une richesse de paysages, avec une diversité exceptionnelle. Et convivialité parce qu’ici, vous êtes sur des terroirs avec des gens authentiques et attachés à leur territoire qui savent vivre simplement, mais sans pour autant manquer d’ambition.
Sur les trois grands volets de l’attractivité, nous ne sommes en matière économique que des « passagers clandestins », super facilitateurs mais pas faiseurs. En revanche, sur le tourisme et le résidentiel, nous avons la main en lien avec d’autres partenaires bien sûr.

Quelle stratégie de communication interne pour que les agents s’approprient cette politique ?

Difficile d’être contre l’attractivité, c’est presque un mot-valise d’ailleurs, qui peut manquer de clarté pour les agents s’il n’est pas incarné politiquement. Nous avons un président qui sait porter un message politique, l’expliquer et l’incarner, que nous avons su traduire concrètement avec la directrice, et l’ensemble de l’encadrement.
Parallèlement, l’équipe renforcée de la communication interne a su développer cinq axes dont l’un porte sur la fierté et le sentiment d’appartenance à la collectivité : « je suis fier d’être agent du conseil départemental, donc fier d’être Bourbonnais ». C’est nouveau et ça marche ! Même si nous ne sommes qu’au début d’un long processus, les résultats sont au rendez-vous. Nos agents sont les meilleurs ambassadeurs et la démarche infuse dans les services.

Identifiez-vous déjà des résultats ?

Objectivement, et c’est un signe, nous recevons de plus en plus souvent de belles candidatures. Il y a trois ans, nous avions sept postes vacants, aujourd’hui nous n’en avons plus qu’un. La collectivité a une bonne image, ce sont les candidats qui le disent : l’image saine d’une collectivité solide qui a de réels atouts et d’une politique RH très qualitative.
Beaucoup de collectivités oublient trop souvent de parler des politiques RH dans leur marque employeur, il y a pourtant des endroits où il est plus agréable d’aller travailler qu’ailleurs et notre département en fait partie.

Une question plus personnelle, on entend beaucoup parler du blues des DGS, après l’avoir été dans plusieurs collectivités, qu’est-ce qui vous anime aujourd’hui ?

Plus que jamais, dans le contexte d’instabilité géopolitique et de notre situation nationale, je crois dans la puissance du local ! Même si le quotidien des DGS, et particulièrement dans les départements, est très difficile, cela nous oblige à être meilleur que jamais et à nous réinventer. Courroie de transmission du politique, et surtout de son incarnation dans l’administration, nous sommes aussi experts en réassurance face à la petite musique de la strate de trop ou pédagogues pour expliquer que faire des économies sur un secteur, c’est souvent pour mettre des moyens sur un autre.
Je pense également – mais ça n’engage que moi ! – que si nous avons beaucoup progressé dans de nombreux domaines comme l’évaluation globale ou la culture du risque, nous sommes encore défaillants dans l’opérationnalité du pilotage, encore trop à géométrie variable. De ce point de vue, et ce n’est pas tabou, nous avons encore beaucoup à apprendre du monde de l’entreprise.
Je suis passionné par ce que je fais et reste convaincu qu’il y a toujours matière à se faire plaisir, intellectuellement, émotionnellement mais pas égoïstement, pour le service public et l’intérêt général !

Propos recueillis par Hugues Perinel

Posté le 14/11/25 par Rédaction Weka