Le Sénat se penche sur « l’habitat dégradé », faute d’une « grande loi logement »

Publié le 28 février 2024 à 9h00 - par

Le Sénat a lancé mardi 27 février 2024 l’examen du projet de loi sur l’« habitat dégradé », pour épauler les copropriétés fragiles et combattre les marchands de sommeil, un texte consensuel, mais loin de répondre aux attentes pressantes face à la « bombe sociale » du logement.

Le Sénat se penche sur "l'habitat dégradé", faute d'une "grande loi logement"
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Malgré des mesures jugées utiles, le texte du gouvernement « n’est pas celui que les Français attendent pour apporter des remèdes à la crise du logement qui prend chaque jour des proportions plus inquiétantes », a lancé la sénatrice LR Dominique Estrosi-Sassone, à l’unisson de nombreux collègues.

La présidente de la commission des Affaires économiques s’est tournée vers le nouveau ministre délégué au Logement, le macroniste Guillaume Kasbarian : « Puissiez-vous dans vos nouvelles responsabilités, avoir les mains peut être un peu plus libres que vos prédécesseurs » pour relever ce défi.

Le texte sur « l’habitat dégradé » n’est que la « première étape d’une longue série de travaux partagés pour répondre » aux défis du secteur, a assuré le ministre, qui a fait l’article du « choc d’offre » que compte créer l’exécutif pour produire davantage de logements.

« Près de 1,5 million de logements sont dégradés », représentant « autant de foyers et de familles qui connaissent des situations de vie inacceptables », a-t-il souligné pour défendre le projet de loi, déjà adopté sans difficulté en première lecture par l’Assemblée nationale.

« Phénomène massif »

À défaut d’être « la grande loi logement » attendue, la rapporteure centriste du texte, Amel Gacquerre (UDI), a estimé que ce texte avait le mérite de s’attaquer à « un phénomène massif », qui n’est « pas seulement l’affaire de villes au taux de pauvreté élevé ou des quartiers prioritaires ».

L’un des grands objectifs est de faciliter le lancement de travaux en amont dans des copropriétés dégradées, avant qu’une dégradation définitive ne nécessite une démolition. Le texte crée pour cela un prêt global collectif afin d’améliorer l’accès au crédit de ces copropriétés.

Favorables à ce nouveau prêt, des sénateurs ont toutefois déploré l’absence de financement de la « garantie publique » que le gouvernement avait ajoutée via un amendement à l’Assemblée.

Après l’avoir supprimée en commission, le Sénat a accepté mardi 27 février de rétablir cette garantie, même si la rapporteure Amel Gacquerre a jugé « peu concrète » la promesse du ministre de préciser son financement « en loi de finances ».

Le Sénat a aussi validé l’une des autres mesures phares du texte : une nouvelle procédure d’expropriation des logements frappés par un arrêté de péril ou d’insalubrité. Avec l’objectif d’anticiper une intervention des pouvoirs publics, sans attendre une dégradation irréversible.

Le projet de loi durcit par ailleurs les sanctions pénales contre les marchands de sommeil, qui exploitent des personnes vulnérables en leur louant des logements indignes.

Les sénateurs ont renforcé les prérogatives des maires dans l’attribution de « permis de louer » dans des zones d’habitat dégradé, en adoptant mardi 27 février 2024 un article qu’ils avaient introduit en commission.

« Texte puissant »

En commission, ils avaient aussi remodelé l’un des principaux ajouts des députés, jugé trop flou : la création de « syndics d’intérêt collectif » ayant une compétence reconnue pour reprendre les rênes de copropriétés fragiles.

Ils veulent notamment que la question de leur rémunération soit précisée. Et que les opérateurs du logement social ne soient plus « réputés » remplir d’office les critères pour remplir ces fonctions.

Pour mieux prendre en compte les petites copropriétés de centre villes, les sénateurs veulent, par ailleurs, donner la possibilité aux maires de faire procéder d’office à un diagnostic structurel des immeubles en zone d’habitat dégradé.

Face à une crise souvent qualifiée de « bombe sociale » par les acteurs du secteur, le Premier ministre Gabriel Attal a assuré après sa nomination vouloir « chercher tous les logements possibles avec les dents » en créant un « choc d’offre ». Il a annoncé une modification de la loi SRU (Solidarité et renouvellement urbains), fixant des quotas de logements sociaux dans certaines communes, qui doit être présentée avant l’été.

« Je souhaite que ce soit un texte puissant qui réponde aux attentes des Français et des élus locaux », a dit ce mardi M. Kasbarian au sujet de cette initiative qui suscite de fortes appréhensions de la gauche, inquiète d’un recul des obligations de production de logements sociaux.

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