Dans l’Eure, élus des bourgs et des cités font cause commune pour créer un « récit positif »

Publié le 5 juin 2025 à 8h40 - par

Si éloignés et pourtant si proches : des élus des bourgs et des banlieues ont débattu pour la première fois mercredi 4 juin 2025 de préoccupations politiques communes, afin de « déconstruire le mythe d’une opposition entre villes et campagnes » et de créer un « récit positif ».

Dans l'Eure, élus des bourgs et des cités font cause commune pour créer un "récit positif"

À l’occasion d’une « Journée nationale de la cohésion des territoires », plusieurs dizaines d’élus de tous bords se sont rassemblés à l’initiative de l’Association des maires ruraux de France (AMRF) et des élus de « Ville et Banlieue » à Quittebeuf, 670 habitants, puis dans la ville voisine d’Évreux, 50 000 habitants, dont le taux de pauvreté caracole à 29 %.

« On est souvent confrontés à des déclarations politiques qui opposent les villages et les quartiers en disant qu’il y aurait trop d’argent pour les uns, et pas assez pour les autres alors que pour faire République, nous avons besoin à la fois de la ruralité et de l’urbanité », souligne Gilles Leproust, président de Ville et Banlieue.

Difficulté d’accès aux services publics, à une offre de santé, de mobilité, à l’emploi ou à la culture ont rythmé les différents ateliers organisés avec des acteurs associatifs.

« Je suis issue d’un quartier politique de la ville et je peux dire pour l’avoir vécu qu’il n’y a pas de frontière entre les administrés des villes ou des campagnes », a témoigné Fatima Aït-Ouailal, de l’association Wimoov (Groupe SOS), qui facilite le retour à l’emploi des personnes peu mobiles.

« On n’est pas là pour pleurer mais pour construire, l’idée c’est de mieux se connaître et de voir comment on peut faire avancer certaines problématiques », a commenté auprès de l’AFP Michel Fournier, président de l’AMRF.

« Le symbole est beau, fort, inédit. On n’a jamais vu des maires ruraux et des maires de quartiers se taper dans la main et se dire il faut absolument qu’on bosse ensemble », se félicite Driss Ettazaoui, vice-président de la communauté d’agglomération d’Évreux (MoDem).

« Solidarités territoriales »

Lors de débats sur les violences faites aux femmes, Marie-Christine Ménard-Chevalier, présidente de la Fédération des centres d’information sur les droits des femmes (CIDFF) de Normandie, a estimé qu’on retrouve « les mêmes types de contrôles sur les victimes, même si ce ne sont pas par les mêmes personnes » dans les quartiers et les campagnes.

Venu parler de son association « Lire et faire lire », qui encourage la lecture chez les jeunes, l’écrivain Alexandre Jardin voit lui dans cette journée une « vraie bascule sur le plan politique ».

« C’est la réunion de la France périphérique, un concept très controversé mais qui représente une France majoritaire quasiment invisible médiatiquement. Le fait qu’elle entame des discussions sur des dossiers techniques communs, c’est fondamental », a expliqué celui qui est également le pourfendeur des zones à faibles émissions (ZFE) avec son collectif Les #Gueux.

À l’issue de la journée, les élus ont dévoilé un manifeste « pour une cohésion effective des territoires ».

« Il ne s’agit plus de choisir entre ville ou campagne, mais de penser le pays en réseaux de solidarités territoriales, en coopération, pour aider nos habitants », écrivent-ils.

« La France n’est ni rurale ni urbaine, elle est les deux à la fois. Elle est partout où l’on ferme une école (…), partout où l’on subit l’éloignement des services publics de l’État, la fracture numérique, le chômage, ou l’absence de perspectives et d’accompagnement pour les jeunes », poursuivent les élus.

Six propositions sont mises en avant à moins d’un an des élections municipales, comme la création de « contrats de solidarité territoriale » associant communes rurales et quartiers populaires autour de projets communs dans l’agriculture urbaine, les circuits courts, les écoles, l’accueil de jeunes en mobilité ou les échanges culturels.

Les élus proposent également d’instaurer une continuité de service public, en « maillant le territoire avec des services mobiles mutualisés entre zones rurales et urbaines » dans différents domaines dont la santé.

A l’instar de ce qui se fait déjà à Lyon, ils envisagent enfin de développer des jumelages entre territoires : « une cité avec un village, un quartier avec un bourg, deux clubs de sport ou des associations ».

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