Pénuries : une liste de médicaments essentiels qui divise

Publié le 10 juillet 2023 à 9h40 - par

Depuis sa publication, la liste de 450 médicaments essentiels pour éviter les pénuries, comme la France en a connues l’hiver dernier, suscite la controverse. Une liste qui est un élément d’un plan plus vaste du Gouvernement pour repenser tout le secteur du médicament.

Pénuries : une liste de médicaments essentiels qui divise
© Image par Ondrej Janovec de Pixabay

Le ministre de la Santé François Braun a dévoilé mi-juin une liste de médicaments jugés prioritaires, un moyen de répertorier les molécules les plus indispensables aux patients et sécuriser les chaînes d’approvisionnement.

Une « première étape importante » mais « le Gouvernement doit veiller à remettre de l’ordre » dans cette liste, qui suscite des interrogations, a déclaré jeudi 6 juillet 2023 Laurence Cohen, rapporteure de la commission sénatoriale sur les pénuries.

Certains médicaments sont redondants, d’autres sont absents, estiment des acteurs de la santé, qui demandent des corrections.

« La liste fournie ne comporte aucune thérapeutique ciblée des rhumatismes inflammatoires (en dehors du rituximab), aucun anti-inflammatoires non stéroïdiens, aucun traitement anti‐ostéoporotique et aucun corticoïde injectable », relève la Société française de rhumatologie (SFR).

« On y trouve aussi des médicaments dont l’utilité n’est pas démontrée, ou sans avantage clinique par rapport à d’autres substances du même groupe pharmacothérapeutique », alors que d’autres, « utiles à de nombreux patients et patientes, semblent tout simplement oubliés », écrit la revue indépendante spécialisée Prescrire.

Côté patients, France Assos Santé, souhaite être consultée pour un ajustement de cette liste et dit avoir transmis au ministère de la Santé ses « demandes et propositions ».

Elle n’est pas la seule instance à avoir été tenue à l’écart des travaux d’élaboration : « La Haute autorité de santé n’y a pas été associée et la question des liens d’intérêts n’est tout simplement pas traitée », déplore la sénatrice Laurence Cohen.

« On s’y perd »

Pour établir cet inventaire, les sociétés savantes de différentes spécialités médicales ont été consultées : on leur a demandé de coter des molécules de leur spécialité selon plusieurs critères (par exemple leur degré d’utilisation, les risques que leur absence fait courir au système de santé etc.)

Cette présélection a été soumise à l’avis d’un deuxième groupe d’experts.

Il existe déjà, depuis 2016, une liste de 6 000 médicaments d’intérêt thérapeutique majeur (MITM) : les industriels doivent constituer un stock de sécurité de 4 mois minimum en cas de tensions d’approvisionnement sur les deux années précédentes (contre un stock de 2 mois pour les autres médicaments).

Dans la liste des 450 dévoilée en juin, certains produits seront soumis à la règle des stocks de 4 mois, et d’autres non.

Face à la diversité des listes, « on s’y perd », se désolait jeudi 6 juillet la présidente de la commission sénatoriale, Sonia de la Provôté. Elle s’est demandée sur quelle liste s’appuyer en cas de besoin. Et quelle sera l’articulation avec la liste européenne en chantier contre les pénuries ?

L’Europe semble en effet être une planche de salut pour sortir des pénuries récurrentes de médicaments dont les causes sont multiples.

Ce phénomène, qui touche surtout les médicaments peu chers car commercialisés depuis longtemps, a été amplifié par la pandémie suivie de la triple épidémie de Covid-19, grippe et bronchiolite de l’hiver dernier. Des tensions importantes sont ainsi apparues sur des produits d’usage courant, dont l’amoxicilline et le paracétamol.

« Il est et sera difficile à chaque État membre de l’Union Européenne de résoudre seul le problème national de ses propres pénuries, car la tâche est trop lourde et les investissements très importants », souligne l’Académie de médecine dans un communiqué.

Le secteur attend avec impatience le rapport de la mission interministérielle sur les outils de « régulation » et le « financement des produits de santé » pour régler les problèmes de disponibilité des médicaments, dont la sortie est prévue fin juillet.

Copyright © AFP : « Tous droits de reproduction et de représentation réservés ». © Agence France-Presse 2023


On vous accompagne

Retrouvez les dernières fiches sur la thématique « Santé »

Voir toutes les ressources numériques Santé