C’est avec la pandémie de Covid-19 que la santé mentale est devenue une préoccupation des Français, mais également des politiques. Pour autant, la filière de soins était avant la crise sanitaire en souffrance. Selon la FHF, près d’une personne sur cinq est touchée par des troubles mentaux au cours de la vie. Or, « les tensions sur l’offre de soins en psychiatrie illustrent la nécessité de proposer des mesures nouvelles et fortes, pour répondre à l’urgence et bâtir l’avenir », explique la Fédération. En effet, la psychiatrie publique prend en charge 85 % des patients suivis en établissement et le nombre de patients pris en charge à l’hôpital public a augmenté de 7 % entre 2014 et 2022. Dans le même temps, entre 2013 et 2021, le nombre de lits d’hospitalisation complète en établissement public a diminué de 15 %. Et « le financement a évolué deux fois moins rapidement que l’ONDAM (Objectif national des dépenses d’assurance maladie, ndlr) et quatre fois moins rapidement que le secteur psychiatrique privé », relève la FHF. Dernier point : l’enquête menée en juin 2023 auprès des établissements publics assurant une activité de psychiatrie montre que plus d’un quart des postes sont vacants dans 40 % des établissements. De plus, 25 % des établissements se déclarent en grande difficulté pour répondre aux besoins de la population.

Face à ces constats, la FHF a donc planché avec une trentaine de professionnels du terrain sur des propositions concrètes. Elles sont réparties en quatre axes. Le premier consiste à réaffirmer les grands principes de l’organisation des soins en psychiatrie, à savoir la place des agences régionales de santé (ARS) et celle de la psychiatrie publique comme socle de la prise en charge des patients. Il s’agit aussi de renforcer la place de l’ambulatoire et le rôle des centres médico-psychologiques (CMP). L’objectif principal est de mieux réorganiser les parcours de soins des patients sur le territoire. Parmi les différentes actions listées, on peut citer la réalisation d’une cartographie précise des réalités territoriales et en assurer le suivi, à l’initiative des ARS. La FHF propose aussi d’établir des liens et de partager du temps de transmission entre les soignants de l’ambulatoire et de l’intra-hospitalier afin d’assurer une totale continuité des soins, y compris dans les modalités de prise en charge du patient. Quant aux CMP, la fédération souhaite qu’ils soient les pivots de la prise en  charge ambulatoire, ce qui passe par la nécessité de garantir un accès pour tous aux CMP avec entre autres des objectifs de délais d’accès. Ce qui suppose néanmoins de « désengorger » les CMP en développant les soins à domicile, les équipes mobiles spécialisées et les consultations avancées.

Faire évoluer les prises en charge

Le deuxième axe porte sur l’évolution des modes de prise en charge pour répondre aux besoins de santé en repensant l’organisation hospitalière. Ce qui implique de faire évoluer les objectifs de l’hospitalisation complète, de soutenir et d’accompagner les établissements dans l’évolution des pratiques de soins et le renforcement de l’ambulatoire avec par exemple la mise en place de modes alternatifs à l’hospitalisation et l’utilisation d’outils numériques, de mettre en adéquation les pratiques de soins et les attentes des professionnels, et de renforcer la place de la psychiatrie médico-légale (unités pour malades difficiles (UMD), unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA), services médico-psychologiques régionaux (SMPR)).

Le troisième concerne le lien entre la psychiatrie et les acteurs du territoire que la FHF veut renforcer. Ce qui consiste à déployer les liens avec la médecine de ville – médecins généralistes, mais aussi communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) –, à favoriser les organisations permettant la bonne orientation des situations d’urgence (la FHF préconise des protocoles avec le SAMU et les urgences) et à structurer la permanence des soins en impliquant acteurs privés et publics.

Quatrième et dernier axe : le développement de l’attractivité des métiers de la psychiatrie. La FHF préconise notamment de communiquer sur la psychiatrie pour améliorer la connaissance de cette spécialité́ médicale et lutter contre les idées reçues, et d’améliorer les conditions de travail en établissement psychiatrique.

Ce premier volet de propositions sera complété par un second sur la recherche en psychiatrie, la psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent ainsi que les droits des patients. La FHF devrait présenter ce travail lors du deuxième semestre 2024.

Magali Clausener