Le préfet peut autoriser les policiers municipaux des communes volontaires à procéder à l’enregistrement audiovisuel de leurs interventions au moyen de caméras individuelles, lorsqu’un accident se produit où est susceptible de se produire (cf. encadré). C’est le maire ou l’ensemble des maires de l’intercommunalité qui prennent la décision d’équiper les agents de police municipale de caméras-piétons.
Après une expérimentation dans quelque trois cents communes, le gouvernement avait interdit l’utilisation de ces dispositifs, le temps d’évaluer leur apport. Le 3 janvier 2017, la Cnil avait attiré l’attention du gouvernement sur la nécessité d’adopter un texte législatif pour encadrer les « risques élevés de surveillance des personnes et d’atteinte à la vie privée » qu’elles pouvaient représenter. C’est l’objet de l’article 3 de la loi du 3 août 2018 relative à l’harmonisation de l’utilisation des caméras mobiles par les autorités de sécurité publique.
Un décret du 27 février 2019 vient de préciser les modalités de l’autorisation pour les polices municipales, ainsi que les conditions de mise en œuvre de traitements des données qui en sont issues : finalités, durée de conservation (six mois sauf engagement d’une procédure judiciaire, administrative ou disciplinaire), accès aux enregistrements (responsable de la police municipale et agents spécialement désignés, officiers et agents de police judiciaire, maire et président de l’EPCI, agents chargés de la formation), et droits des personnes concernées. La collectivité doit informer le public par internet ou affichage en mairie de l’utilisation des caméras mobiles.
Consultée sur le projet de décret, la Cnil mettait en garde le ministère de l’Intérieur (délibération du 13 décembre 2018), sur le fait que les agents de police municipale ne devront utiliser que les caméras fournies au titre de leurs équipements, à l’exclusion de tout autre dispositif de captation visuelle et sonore, caméras personnelles par exemple. Elle estime également indispensable de définir une doctrine d’emploi contenant des critères objectifs d’utilisation des caméras, pour éviter une collecte disproportionnée de données à caractère personnel. Ce serait d’autant plus utile que les caméras sont autorisées « en tous lieux », notamment au domicile des particuliers. La commission a aussi attiré l’attention du ministère sur la nécessité de prévoir des règles spécifiques, comme l’information individuelle systématique de la personne concernée, le cas échéant, à l’issue de l’intervention.
Par ailleurs, la commission précisait qu’il sera interdit de sélectionner dans les traitements de données une catégorie particulière de personnes à partir de ses seules données. Concernant l’accès aux données, la Cnil estimait notamment nécessaire d’adopter des mesures techniques pour garantir l’absence de consultation des enregistrements par les agents, ainsi que des mesures opérationnelles garantissant que les enregistrements, une fois transférés sur un serveur dédié, ne soient visionnés que dans un cadre légal précis : procédure judiciaire, disciplinaire ou administrative ouverte.
Le 11 octobre 2018, le Conseil national d’évaluation des normes (Cnen) a émis un avis favorable sur le projet de décret. Mais il souhaite une réflexion plus générale sur la vidéosurveillance et demande, ainsi que la Cnil, un débat devant le Parlement. Objectifs : adapter le cadre juridique aux techniques et usages actuels (vidéo « intelligente », suivi et reconnaissance d’individus à l’aide de données biométriques…) et clarifier les normes applicables pour éviter une mauvaise appropriation du droit en vigueur par les collectivités.
Marie Gasnier
L’enregistrement, qui ne peut pas être permanent, a plusieurs finalités : prévenir les incidents lors des interventions, constater les infractions et collecter des preuves afin de poursuivre leurs auteurs, et former les agents. La caméra doit être portée de façon apparente ; un signal visuel indique que l’enregistrement est en cours. Les policiers doivent informer les personnes filmées. |