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Les élections départementales de mars 2015 : pour faire quoi ?

Publié le 13 mars 2015 à 17h00 - par

À l’heure où le sort du Département est en question, le prochain scrutin aura lieu dans un contexte inédit.

Les élections départementales de mars 2015 : pour faire quoi ?
Renaud-Jean CHAUSSADE, Avocat en droit des collectivités territoriales, Counsel du cabinet Delsol AvocatsRenaud-Jean CHAUSSADE

Les prochaines élections départementales auront lieu les 22 et 29 mars 2015 dans des circonstances perturbées par le débat actuel sur le devenir du Département et l’examen très avancé devant le Parlement du projet de loi sur la nouvelle organisation territoriale de la République (loi Notre).

Dans l’exposé des motifs de ce projet de loi, la possibilité d’une suppression pure et simple du Département est envisagée. Cela pourrait ainsi signifier que les prochaines élections seraient les dernières, les conseillers départementaux ayant vocation à exercer un ultime mandat jusqu’en 2021.

Toutefois, les contraintes juridiques, politiques et pratiques qui seraient liées à cette entreprise de suppression tendent sérieusement à remettre en cause la faisabilité à court terme de cette hypothèse.

Il n’en reste pas moins que le texte actuellement en discussion déconstruit le Département en lui retirant un grand nombre de compétences au profit du duo Région/Intercommunalité.
Dans le projet de loi initial, examiné en Conseil des ministres le 18 juin 2014, il était tout simplement question de ne laisser au Département que le cœur de ses compétences constituées principalement par l’action sociale et la culture.

Bien évidemment, le projet a très largement évolué dans le cadre du débat parlementaire. Néanmoins, la succession d’annonces de réformes et d’interrogations sur le sort du Département a pour effet de brouiller son image et son action.

En raison de cette instabilité presque existentielle, les prochaines élections vont ainsi se tenir dans des circonstances rendant difficiles la lisibilité du scrutin et des enjeux qui y sont attachés.

Il est assurément complexe pour les candidats de présenter un programme sur des compétences susceptibles d’évolution majeure et pour les électeurs de saisir la portée de leur vote.

Quid des Départements ?

Toutefois, à examiner la situation de plus près, l’avenir du Département n’est pas aussi incertain qu’il n’y paraît.

D’une part, la suppression du Département en tant que collectivité territoriale est un projet semble-t-il ajourné, ne serait-ce que pour des raisons tenant à la révision de la Constitution et à l’obtention des majorités requises, notamment dans le cadre du Parlement réuni en Congrès, qui est loin d’être une donnée acquise.

Sauf dans le cas très particulier de l’aire métropolitaine lyonnaise où le département du Rhône a disparu, cette collectivité devrait donc avoir encore quelques beaux jours devant elle.

D’autre part, suite à son second examen par l’Assemblée nationale, la loi Notre ne procèderait pas à la réduction des compétences annoncée.

En effet, des compétences comme la voirie et la gestion des services départementaux d’incendie et de secours resteraient départementales.

De même, si le Département ne pourrait plus se saisir de tout sujet qu’il considérerait comme relevant de son intérêt en raison de la suppression de la clause générale de compétence, il demeurerait solidement installé sur son socle de compétences où son expertise et son expérience sont unanimement reconnues, voire, plébiscitées.

C’est d’ailleurs sous l’impulsion de l’Association des Régions de France que la compétence « voirie » a été restituée au Département.

Il ne viendrait du reste à aucun autre niveau de collectivité l’idée de disputer la gestion de l’action sociale, en particulier, du revenu de solidarité active, ou l’exercice de la solidarité territoriale.

Si le fait régional est mis en avant, il apparaît ainsi que le fait départemental existe aussi et n’est pas en voie de totalement disparaître.

Par ailleurs, l’élection départementale en tant que telle présente un caractère relativement novateur du fait des évolutions de son mode de scrutin prévues par la loi Valls n° 2013-403 du 17 mai 2013.

Outre l’élargissement des circonscriptions électorales et le principe d’un renouvellement général tous les 6 ans, il est à souligner que deux conseillers départementaux de sexe opposé seront élus par canton dans le cadre d’un acte de candidature commun, contraignant ainsi un homme et une femme à se présenter sur le même ticket.

La parité s’impose aux élections dans le cadre d’un mode de scrutin binominal majoritaire mixte, créant une solidarité juridique entre les candidats jusqu’au terme de leur élection et des éventuelles suites contentieuses qu’elle pourrait connaître. Ce mouvement paritaire se poursuit également à travers les règles relatives à l’élection des membres de la commission permanente et des vice-présidents.

Si cette évolution soulève des difficultés pratiques indéniables, force est de reconnaître que le Département sera le théâtre et le laboratoire d’une idée démocratique forte fondée sur l’objectif constitutionnel d’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives.

Ne serait-ce que pour cette raison, le Département est bien présent dans son temps.

 

Renaud-Jean CHAUSSADE, Avocat en droit des collectivités territoriales, Counsel du cabinet Delsol Avocats


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