Le 30 mai 2025, le Conseil d’État a transmis au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) posée par Mme M. Cette question a été enregistrée sous le n° 2025-1152 QPC. Le Conseil constitutionnel a ensuite reçu des observations du Premier ministre et de la requérante, avant de tenir une audience publique le 22 juillet 2025. La décision a été rendue le 30 juillet 2025.
1. Que reprochait la requérante à l’article L. 332-4 du Code général de la fonction publique ?
La requérante reprochait à l’article L. 332-4 du Code général de la fonction publique d’exclure de la comptabilisation des six années de services publics nécessaires pour obtenir un contrat à durée indéterminée, les périodes de travail accomplies pour faire face à une vacance temporaire d’emploi (en application de l’article L. 332-7). Selon elle, cela créait une différence de traitement injustifiée avec d’autres agents contractuels pour lesquels la durée des contrats est prise en compte, ce qui est, selon elle, contraire au principe d’égalité devant la loi. Elle soutenait également que ces dispositions portaient atteinte au droit d’obtenir un emploi1.
2. Sur quoi portait la question prioritaire de constitutionnalité ?
La question prioritaire de constitutionnalité portait spécifiquement sur les mots « et L. 332-6 » figurant à la première phrase du quatrième alinéa de l’article L. 332-4 du Code général de la fonction publique. La requérante considérait que l’inclusion de l’article L. 332-6 (remplacement d’agents absents) et l’exclusion de l’article L. 332-7 (vacance temporaire) créaient une distinction inconstitutionnelle2.
3. Pourquoi les dispositions contestées méconnaissaient le principe d’égalité ?
Le Conseil constitutionnel a estimé que les dispositions contestées méconnaissent le principe d’égalité devant la loi. Il a rappelé que l’objectif de la loi de 2012 était de prévenir les renouvellements abusifs de contrats à durée déterminée et de sécuriser les parcours professionnels des agents contractuels. Le Conseil a estimé que le législateur n’avait pas l’intention de faire de distinction entre les différents types de contrats à durée déterminée pour le calcul des six ans. Il ajoute que la différence de traitement entre les agents recrutés pour remplacer des agents indisponibles (pris en compte) et ceux recrutés pour une vacance d’emploi (non pris en compte) n’a pas de rapport direct avec l’objet de la loi, ce qui la rend contraire au principe d’égalité3.
4. Pourquoi faut-il abroger au 1er octobre 2026 ?
Le Conseil constitutionnel a décidé de reporter l’abrogation des dispositions jugées inconstitutionnelles au 1er octobre 2026. L’abrogation immédiate aurait pour conséquence de supprimer la prise en compte des contrats fondés sur l’article L. 332-6 (remplacement d’agents) dans le calcul de la durée de six années de services publics ouvrant droit à un contrat à durée indéterminée et de créer des conséquences « manifestement excessives ». Pour éviter cela et laisser le temps au législateur de modifier la loi, l’abrogation est différée4.
5. Que faut-il pour cesser l’inconstitutionnalité en attendant le 1er octobre 2026 ?
Afin de faire cesser l’inconstitutionnalité dès la publication de la décision, le Conseil constitutionnel a émis une « réserve transitoire ». Jusqu’à l’entrée en vigueur d’une nouvelle loi, ou au plus tard jusqu’au 1er octobre 2026, les services accomplis dans des emplois occupés en application de l’article L. 332-7 (vacance temporaire) doivent être pris en compte dans le calcul de la durée de six ans prévue à l’article L. 332-4. Cette mesure permet d’appliquer immédiatement le principe d’égalité sans attendre la nouvelle législation5.
Dans cette décision, le Conseil constitutionnel a mis fin à une inégalité de traitement en reconnaissant que tous les services accomplis par un agent contractuel pour répondre à des besoins temporaires de l’administration doivent être pris en compte pour l’obtention d’un contrat à durée indéterminée. Les principes d’égalité et de non-discrimination s’appliquent à l’ensemble de la fonction publique.
Dominique Volut, Avocat-Médiateur au barreau de Paris, Docteur en droit public
1. Consid. 2 et 3 de la décision n° 2025-1152 QPC du 30 juillet 2025.
2. Consid. 4 de la décision n° 2025-1152 QPC du 30 juillet 2025.
3. Consid. 9 et 10 de la décision n° 2025-1152 QPC du 30 juillet 2025.
4. Consid. 14 de la décision n° 2025-1152 QPC du 30 juillet 2025.
5. Consid. 15 de la décision n° 2025-1152 QPC du 30 juillet 2025.
