Le 26 septembre prochain, Cuers accueille le salon « Ville basse température l’été ». De quoi s’agit-il ?
C’est parti d’une démarche que nous avons inventée et mise en place à l’été 2022, alors que la ville subissait un record de température qui avait suscité un certain intérêt médiatique. Nous avons commencé à faire des relevés de températures, notamment dans le cadre d’un reportage de TF1 ; devant le collège, la température au sol s’élevait à 61° ! Ces mesures impressionnantes ont accéléré l’intérêt que nous portions au développement durable, et à ce sujet en particulier. Nous avons donc inventé un slogan et créé un schéma directeur pour identifier les actions à entreprendre sur cette thématique et les planifier de manière pluriannuelle. Parmi les déclinaisons du schéma directeur, figurait l’organisation du premier salon professionnel « Ville basse température l’été », destiné aux collectivités et aux entreprises privées. Il comportera un village d’exposants, deux tables rondes sur la surchauffe urbaine, deux démonstrations d’outils et une visite itinérante sur inscription avec le retour d’expérience de la ville de Cuers. C’est une visite dite « inspirante » que nous proposons sous l’impulsion de l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie), où nous expliquerons ce que nous avons déjà fait sur quatre sites.
Que comprend ce schéma directeur ?
Il s’articule autour de quatre grands thèmes : adapter nos rues, nos bâtiments, nos espaces de sports et loisirs, et adapter la réglementation locale – notamment le plan local d’urbanisme. Pour chaque domaine, nous avons déterminé les actions qui pouvaient être conduites à court, moyen et long termes. Le déroulement de la visite permettra aux participants de découvrir nos actions sur ces différents thèmes. Par exemple, le collège étant dans un site très minéralisé, nous avons créé un espace d’arborisation, en plantant trente arbres sur la partie de voirie qui était la plus minérale et qui générait un îlot de chaleur. Nous avons aussi commencé à désimperméabiliser, en libérant les arbres existants de leur gangue bitumineuse. Toutefois, il s’agit là d’une action à moyen et longs termes car l’arbre ne produit pas tout de suite suffisamment d’ombre. Pour le deuxième exemple, nous avons choisi une rue-test du centre-ville très mal exposée, donc très chaude une partie de la journée, sur laquelle nous avons mis des ombrières traversantes qui s’accrochent aux façades des bâtiments et couvrent la totalité de la rue. L’effet est immédiat et spectaculaire : la différence de température mesurée au sol sous l’ombrière et sous la partie au soleil est du même niveau qu’entre un sol au soleil et un sol à l’ombre, soit un écart de 25 à 30 degrés. C’est quasiment aussi efficace que l’arbre. Avec, en outre, un ressenti quasiment de climatisation pour la personne qui a déambulé au soleil et qui arrive dans cet espace. C’est une grande réussite.
Vous avez aussi essayé d’agir en changeant la couleur des enrobés ?
En effet, la troisième initiative que nous allons montrer est que nous avions décidé de choisir pour les chaussées de certaines rues-test de l’enrobé ocre de préférence à l’enrobé noir, ce qui peut diminuer de 15 degrés la température au sol. Mais malheureusement, c’est un échec car dans le sud il ne pleut pas beaucoup, or la gomme des pneus des voitures salit et noircit le bitume ocre. Et en parallèle, vu le nombre de journées d’ensoleillement, le bitume noir s’éclaircit très vite donc sa température au sol diminue. En raison de ce double phénomène, alors qu’au départ, il y avait une différence de 15 degrés entre les deux types de bitumes, moins d’un an plus tard on enregistre seulement 3 à 4 degrés d’écart, pour un coût entre deux fois et demi et trois fois plus élevé pour l’enrobé ocre. Finalement, nous sommes revenus à l’enrobé noir pour les chaussées et nous mettons de l’ocre uniquement sur les trottoirs, où il y a beaucoup moins de noircissement.
Et le quatrième exemple concerne un groupe scolaire ?
Oui, le quatrième exemple que nous allons montrer aux participants, c’est la rénovation complète d’un groupe scolaire avec démolition et reconstruction en partie, qu’on vient de livrer. Nous avons fait le choix, comme beaucoup de collectivités, de traiter la cour selon le concept d’oasis végétalisée, avec gestion de l’eau de pluie. Pour le bâtiment, nous avons choisi le label BDM, « bâtiment durable méditerranéen », qui est un label sur l’écoconstruction et le choix de la gestion entre l’air chaud et l’air froid. Des brise-soleil ont été posés en façade sud. Toutes les ouvertures de fenêtres sont protégées par un revêtement ajouré de type moucharabieh, afin d’éviter le rayonnement solaire direct sur les vitres. Pour cette opération très lourde, à 13 millions d’euros, nous avons réussi à avoir des financements, du Fonds vert notamment. Car malheureusement, dès que vous faites des opérations vertueuses, en bâtiment ou en voirie, c’est plus cher qu’une construction ordinaire. Le vrai levier à trouver est là. Car du coup, soit on ne fait pas, soit on fait moins…
Vous appelez les collectivités à s’associer à votre démarche…
J’administre un groupe LinkedIn de 460 membres qui permet une mise en réseau et un partage d’expérience, et j’invite en en effet les collectivités à le rejoindre. C’est un groupe pluridisciplinaire auquel participent des architectes, des journalistes, des collectivités locales, des élus, des associations… À Cuers, nous avons l’avantage d’avoir trouvé un slogan et la particularité de chercher à intervenir sur tous les domaines. Nous sommes à disposition des autres collectivités pour échanger sur ce type de démarche. Et la réussite du Salon générera peut-être une émulation collective qui fera bouger les choses…
Propos recueillis par Martine Courgnaud – Del Ry