Stanislas Lucienne : “Un véritable accompagnement offert par l’ANCT et les services de l’État” (2/2)

Publiée le 4 octobre 2021 à 10h00 - par

Deuxième partie de notre entretien avec Stanislas Lucienne, Directeur général des services de la Communauté de communes de Roumois Seine, Président de la section régionale Normandie du Syndicat national des directeurs généraux des collectivités (SNDGCT).
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Les intercommunalités ont parfois eu l’impression de signer à marche forcée les nouveaux contrats CRTE avec l’État. Mais peut-on véritablement parler de contrat ou est-ce un nouvel outil de recentralisation des politiques communales ?

À marche forcée peut-être pas, mais nous pouvons tout du moins dire que le tempo dicté par les circonstances a été dense. Ce qui se comprend, dans le même temps, lorsqu’on sait qu’il s’agit de mettre en œuvre un dispositif de relance. Ceci explique cela. Le véritable défi a été de pouvoir profiter de la conclusion de ces contrats pour financer des projets dont la réalisation pourrait être rapide. Pour ce faire, nous avons à Roumois Seine demandé aux communes de nous faire remonter les différents projets en attente. L’idée était d’identifier parmi eux ceux qui relevaient en partie de la compétence de l’intercommunalité, de façon à les soutenir tout en leur donnant un tout cohérent à l’échelle intercommunale. Le résultat paraît prometteur.

Pour cette raison, je ne vois pas le CRTE comme un outil de recentralisation. C’est davantage selon moi un outil de planification, dans la droite ligne des contrats de territoire, qui sous une appellation ou une autre, existent pour coordonner l’action du monde territorial. Le risque aurait pu être que les EPCI soient livrés à eux-mêmes dans leur mise en place et que les choix arrêtés viennent contredire ceux pris par les autres niveaux d’administration. Mais ce risque ne s’est pas avéré, grâce au véritable accompagnement qui a été offert par l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) et les services de l’État. Ceux-ci nous ont accompagné tout au long de la démarche et ainsi permis de structurer notre CRTE de façon véritablement cohérente au regard du schéma d’ensemble local et national.

Quel est l’intérêt immédiat des CRTE pour le bloc communal ?

Le CRTE est un outil intéressant, en ce qu’il permet tout à la fois de donner une visibilité aux projets du territoire et la mise en œuvre d’une véritable concertation entre les différentes parties prenantes.

Dans le cas de la CCRS, il a permis d’approfondir les échanges sur certains sujets et de mûrir le projet de territoire, en réfléchissant à la façon dont il était possible à l’avenir de concilier de façon harmonieuse, par le biais de l’intercommunalité, les différents projets municipaux portés par les nouvelles majorités issues des urnes en 2020. Comme la collectivité est composée, ainsi que je l’ai rappelé, de petites collectivités, cet exercice a permis à l’ensemble des communes membres de se projeter avec la CCRS sur ce qu’il convenait de faire pour affronter le double défi de la transition écologique et de la révolution numérique.

Le CRTE est ainsi le moyen pour la collectivité de mettre en place plus de proximité en portant la création de Maison France Service mais aussi en travaillant sur de nouveaux outils connectés pour permettre un accès simplifié aux services de la Roumois Seine.

Certains élus se plaignent du manque de clarté, voire de l’illisibilité de ces contrats. Qu’en pensez-vous ?

Ce reproche doit être mis en rapport avec le caractère novateur du CRTE. Ce n’est pas un contrat comme le bloc communal en a l’habitude, dans la mesure où c’est davantage un contrat de projet que de mission, et où il se veut intégrateur et qui plus est évolutif. Il rompt de ce fait avec les pratiques habituelles. C’est en ce sens qu’il peut paraître illisible aux yeux de certains. Mais c’est en réalité plus un outil complexe qu’illisible de mon point de vue, du fait justement de sa vocation intégratrice et évolutive.

Cette complexité a conduit la communauté, dont je suis membre, à adapter son service pour accompagner les communes. Au vu des enjeux, notamment financiers, la mobilisation a été forte. Mais pour le reste, le propre du CRTE est d’être décentralisé. La preuve en est que l’État n’impose pas un catalogue de mesures ou d’indicateurs de performance à respecter. Ce qui nous conduit à bâtir la démarche et les indicateurs qui vont avec pour évaluer dans le temps son rapport coût/efficacité au regard des services rendus à la population et aux opérateurs économiques.

La part d’évaluation induite par le CRTE est la contrepartie de son caractère évolutif, elle en est indissociable : puisqu’il s’agit d’un document révisable, il nous faut pouvoir apprécier sur la durée la capacité des actions entreprises à atteindre les objectifs préétablis. Mais cela donne un caractère réaliste à ces contrats car il nous sera possible dans les années à venir d’affiner les démarches entreprises, toujours au regard du double défi de la transition écologique et de la révolution numérique notamment.

Sur la durée, ces contrats ont-ils vraiment de l’avenir ?

Au vu de l’investissement nécessaire pour faire face à ce double défi, on peut le souhaiter. Mais on sait bien que leur durée de vie sera dépendante des crédits alloués à la relance. Il reste que la démarche est intéressante et structurante comme toutes les démarches programmatiques.

Propos recueillis par Fabien Bottini, Professeur des Universités à l’Université du Mans, Membre Sénior de l’Institut Universitaire de France, Membre du Thémis, Membre associé du LexFEIM

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