Inégalités, services publics, police : les mises en garde de la Défenseure des droits

Publié le 18 mars 2021 à 10h04 - par

Précarité des personnes les plus vulnérables, hausse des réclamations visant les forces de l’ordre, recul des services publics : le rapport annuel de la Défenseure des droits dépeint une France frappée par une « aggravation des inégalités » liées aux conséquences de l’épidémie de Covid-19.

Inégalités, services publics, police : les mises en garde de la Défenseure des droits

« La crise sanitaire n’a pas épargné le fonctionnement des services publics (…) Cet affaiblissement a contribué à accentuer le creusement des inégalités sociales, frappant d’abord les plus vulnérables, soulignant leur rôle essentiel dans la préservation de l’égalité », résume dans son rapport publié jeudi 18 mars 2021 cette autorité indépendante chargée notamment de défendre les citoyens face à l’administration.

L’institution, dirigée depuis juillet par Claire Hédon, ex-présidente de l’ONG ATD-Quart Monde qui a succédé à Jacques Toubon, a reçu près de 97 000 réclamations en 2020, soit 6 % de moins que l’année précédente.

Elles concernent majoritairement les relations avec les services publics ; plus de 60 000 réclamations, en baisse de 1,6 % sur un an.

« La population est épuisée par cette crise, notre devoir c’est de rétablir les personnes dans leurs droits, de les aider à faire face à une bureaucratie qui est parfois kafkaïenne », explique Mme Hédon à l’AFP, pointant du doigt une « déshumanisation » des services publics et les inégalités d’accès à internet.

Atteintes aux libertés

La Défenseure des droits alerte par ailleurs sur les risques majeurs que représentent les mesures rognant les droits et libertés à long terme, comme la fermeture des guichets pour les demandeurs d’asile, la situation des mineurs non accompagnés ou l’accès aux visites pour les résidents en Ehpad.

S’il est « légitime » que l’État puisse se doter de moyens « nécessaires » pour faire face à l’urgence sanitaire, ce régime doit demeurer « temporaire, être strictement encadré et respecter les principes de notre État de droit : légalité, nécessité et proportionnalité », note Claire Hédon.

« Il ne faut pas qu’on s’habitue à des atteintes à nos libertés, je pense que c’est important de le rappeler », souligne-t-elle.

Comme les années précédentes, 2020 a été marquée par les questions de relations entre police et population : la Défenseure des droits a enregistré un bond de 10,5 % des dossiers liés à la « déontologie de la sécurité », avec plus de 2 100 réclamations, dont la majorité concerne l’action des forces de l’ordre.

Selon Mme Hédon, cette hausse s’explique en partie par la hausse des dossiers mettant en cause les polices municipales, « particulièrement mobilisées » pendant cette crise.

« Le maintien de l’ordre est légitime mais il doit être absolument irréprochable. Il faut renforcer la confiance entre la population et la police et cela passe par l’exemplarité et par des sanctions quand il y a des dérapages et un usage de la force disproportionné », souligne Claire Hédon.

Dans son rapport, la Défenseure des droits rappelle que les saisines en matière de déontologie de la sécurité ont augmenté de près de 210 % depuis 2014.

Si certaines de ses recommandations ont été retenues dans le nouveau Schéma national du maintien de l’ordre (SNMO), ce n’est pas le cas de l’interdiction du LBD (lanceur de balles de défense) lors des manifestations ou le fait de confier la mission de maintien de l’ordre uniquement à des unités spécialisées.

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