Covid-19 : les agents publics peuvent-ils faire valoir leur droit de retrait ?

Publié le 12 mars 2020 à 13h00 - par

Le Covid-19 est un virus présent sur le territoire national, avec notamment plusieurs zones de regroupement de cas appelés « clusters ». Les agents publics n’hésitent plus à invoquer le droit de retrait pour se prémunir des dangers d’une contamination, mais tout n’est pas permis.

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L’article 5-1 du décret n° 85-603 du 10 juin 1985 relatif à l’hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu’à la médecine professionnelle et préventive dans la fonction publique territoriale précise que si un agent a un motif raisonnable de penser que sa situation de travail présente un danger grave et imminent pour sa vie ou pour sa santé ou s’il constate une défectuosité dans les systèmes de protection, il peut mettre en œuvre un droit de retrait. La notion de danger grave et imminent est entendue comme étant une menace directe pour la vie ou la santé du fonctionnaire ou de l’agent, c’est-à-dire une situation de fait pouvant provoquer un dommage à l’intégrité physique ou à la santé de la personne. Le risque de contamination par le coronavirus peut de ce fait être possiblement considéré comme un danger grave et imminent, mais l’appréciation du bien-fondé de l’exercice du droit de retrait pour ce motif doit néanmoins se faire au cas par cas au regard du poste de travail occupé et de l’activité exercée.

L’agent doit estimer raisonnablement qu’il court un risque grave et imminent pour sa santé et sa sécurité

Le droit de retrait est un droit individuel, l’agent doit estimer raisonnablement qu’il court un risque grave et imminent pour sa santé et sa sécurité. Un danger grave est un danger susceptible de produire un accident ou une maladie entraînant la mort ou paraissant devoir entraîner une incapacité permanente ou temporaire prolongée. La gravité a donc des conséquences définitives ou en tout cas longues à effacer et importantes, au-delà d’un simple inconfort.

Le caractère imminent du danger se caractérise par le fait que le danger est susceptible de se réaliser brutalement dans un délai rapproché. L’imminence du danger suppose qu’il ne se soit pas encore réalisé mais qu’il soit susceptible de se concrétiser dans un bref délai. L’exercice du droit de retrait impose préalablement ou de façon concomitante la mise en œuvre d’une procédure d’alerte. Le fonctionnaire ou l’agent signale alors immédiatement à son supérieur hiérarchique toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé.

L’autorité territoriale prend alors les mesures et donne les instructions nécessaires pour permettre aux agents, en cas de danger grave et imminent, d’arrêter leur activité et de se mettre en sécurité en quittant immédiatement leur lieu de travail. Aucune sanction ne peut être prise, aucune retenue de rémunération ne peut être effectuée à l’encontre d’agents qui se sont retirés d’une situation de travail dont ils avaient un motif raisonnable de penser qu’elle présentait un danger grave et imminent pour leur vie ou pour leur santé.

Les agents publics peuvent-ils invoquer le risque Covid-19 pour exercer légalement le droit de retrait

Dans une zone géographique où il n’y a aucun cas de Covid-19 avéré, l’exercice du droit de retrait par un agent pour cette raison est infondée. Si l’agent public travaille dans une zone qualifiée de cluster (zone où le nombre de personnes atteintes du Coranovirus est très important), l’exercice du droit de retrait est justifié si les conditions de son travail génèrent un risque important de contamination. Si un agent est en contact régulier dans le cadre de son activité avec un public qui provient régulièrement d’une zone à risques, il peut exercer légalement son droit de retrait.

Si l’employeur met en œuvre les recommandations du gouvernement dans le contexte de lutte contre le Covid-19, les agents publics n’ont pas de motif raisonnable de penser que leur situation de travail présente un danger grave et imminent pour leur vie ou leur santé. Au contraire, si les recommandations du gouvernement ne sont pas diffusées et mises en œuvre par l’employeur public, alors le salarié peut exercer son droit de retrait jusqu’à ce que celles-ci soient mises en œuvre. Par ailleurs, le droit de retrait s’exerce sous réserve de l’exclusion de certaines missions de sécurité des biens et des personnes, incompatibles avec l’exercice de ce droit (sapeurs-pompiers, police municipale, gardes champêtres).

Au final c’est à l’autorité territoriale qu’il appartiendra, après avis du médecin de prévention, d’apprécier le bien fondé de l’exercice du droit de retrait face au risque Covid-19. Si l’employeur juge que le droit de retrait n’a pas été exercé légalement, il peut ne pas rémunérer l’agent qui a fait valoir ce droit en portant atteinte au principe de continuité du service public.

En cas de divergence sur la réalité du danger ou la façon de le faire cesser, le CHSCT sera réuni en urgence dans un délai de vingt-quatre heures maximum. Discernement et raison gardée devront donc être les maîtres des nombreux agents publics qui s’interrogent sur la possibilité d’exercer leur droit de retrait pour éviter la contagion.


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