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La dissolution de l’Assemblée nationale, quelles conséquences pour les réformes en cours ?

Publié le 12 juin 2024 à 8h10 - par

Ce dimanche 9 juin 2024, le président de la République a fait l’usage de l’article 12 de la Constitution pour dissoudre l’Assemblée nationale. Un décret du 9 juin 2024 organise les élections législatives les 30 juin et 7 juillet prochains. Des réformes de la décentralisation et de la fonction publique seront mises entre parenthèses.

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L’article 12 de la Constitution dispose que : « le président de la République peut, après consultation du Premier ministre et des Présidents des Assemblées, prononcer la dissolution de l’Assemblée nationale. Les élections générales ont lieu vingt jours au moins et quarante jours au plus après la dissolution. L’Assemblée nationale se réunit de plein droit le deuxième jeudi qui suit son élection. Si cette réunion a lieu en dehors de la période prévue pour la session ordinaire, une session est ouverte de droit pour une durée de quinze jours. Il ne peut être procédé à une nouvelle dissolution dans l’année qui suit ces élections ». Pouvoir propre du président, le droit de dissolution n’a été utilisé que six fois depuis l’avènement de la Ve République en 1958. Plusieurs réformes devaient donner lieu au dépôt de projets de loi, notamment en matière de décentralisation et de réforme de la fonction publique.

1. Les effets immédiats de la dissolution

Premièrement, le mandat des députés est interrompu dès le 9 juin 2024. Cela signifie que toutes les commissions ont cessé tout fonctionnement. En revanche, le mandat des sénateurs se poursuit. Or, le débat législatif est pour l’instant suspendu tant que l’Assemblée nationale n’est pas renouvelée.

Secondement, le gouvernement reste en poste afin de maintenir la continuité des institutions. Néanmoins, son activité législative reste suspendue car le Premier ministre ne peut pas faire un usage normal de l’article 39 de la Constitution et déposer des projets de loi. Son activité réglementaire n’est néanmoins pas restreinte car il peut continuer de prendre des décrets d’application des lois ou simples.

2. Les effets à moyens termes de la dissolution

Premièrement, la Constitution et la pratique du régime de la Ve République créent un lien entre le gouvernement et la majorité des députés. En d’autres termes, un gouvernement ne peut agir que s’il possède une majorité de députés à l’Assemblée nationale. En effet, celle-ci peut engager, avec l’article 49 de la Constitution de manière plus aboutie que ne peut le faire le Sénat, la responsabilité du gouvernement. À ce stade, rien ne garantit que l’actuel gouvernement aura une majorité à l’Assemblée nationale le 7 juillet prochain. Par ailleurs, si une nouvelle majorité se dégage, rien ne dit que les actuels travaux en cours seront repris par un nouveau gouvernement.

Secondement, le gouvernement a annoncé plusieurs réformes, notamment, sur la décentralisation, sur l’autonomie de la Corse et sur la Fonction publique. Des discussions avec les acteurs principaux étaient en cours. Des projets de lois ordinaires et constitutionnelles devaient être déposés dans les semaines à venir. La dissolution vient geler les discussions pour les prochains jours et semaines durant la période électorale. Rien n’indique que les réformes prévues survivront aux élections législatives anticipées.

La séquence politique actuelle montre parfois la limite de la communication de réformes non encore présentées devant le Parlement. Beaucoup de choses commençaient à s’écrire et généraient des émotions sur des éventuels profonds changements. On touche ici à la limite des vues prospectives quand il s’agit de réformes non encore normées.

Dominique Volut, Avocat-Médiateur au barreau de Paris, Docteur en droit public

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