Le Sénat plaide pour une véritable politique de prévention de la perte d’autonomie

Publié le 19 avril 2021 à 7h08 - par

Pour privilégier le maintien à domicile, une mission d’information du Sénat préconise, notamment, d’arrêter la construction d’Ehpad à court terme.

Le Sénat plaide pour une véritable politique de prévention de la perte d'autonomie

La Commission des affaires sociales du Sénat a publié, fin mars, les conclusions de la mission d’information de Michelle Meunier (Socialiste, écologiste et républicain – Loire‑Atlantique) et Bernard Bonne (Les Républicains – Loire) sur la prévention de la perte d’autonomie. Cette problématique « reste l’angle mort des politiques du grand âge, comme des travaux commandés par le gouvernement pour alimenter la réforme promise depuis 2018, estiment les deux parlementaires. L’accent mis par la dernière stratégie nationale sur le repérage de la fragilité ne doit pas occulter la prévention et l’objectif d’aider chacun à vieillir heureux, c’est‑à‑dire, pour la plupart, chez soi. »

Leur rapport porte donc sur un aspect particulier, peu étudié à ce jour, qui est celui de la prévention de la perte d’autonomie. « C’est un pan de l’action publique encore sous-estimé, pourtant essentiel pour une population dont le vieillissement sera tiré par les tranches d’âge les plus élevées, les plus de 75 ans », insiste Michelle Meunier. « C’est en outre un phénomène complexe à appréhender, complète Bernard Bonne. La gériatrie elle-même semble hésiter entre deux approches : d’une part, la prévention primaire, qui repose en l’espèce sur le « trépied préventif » valable pour tous, composé d’une alimentation saine, d’exercice physique suffisant et d’un maintien de l’activité intellectuelle et sociale. D’autre part, la prévention plus ciblée, qui ambitionne de repérer la fragilité des personnes vieillissantes. Il nous semble que ces approches sont plus complémentaires que concurrentes. Elles appellent en tout cas des politiques difficiles à conduire, car nécessairement transversales. »

Aussi, pour promouvoir une « véritable » politique de prévention de la perte d’autonomie, les deux sénateurs formulent 11 propositions.

  • Renforcer la compétence des départements en matière médico-sociale
    • En précisant dans la loi sa compétence d’organisation de visites de prévention à 75 ans, d’organisation du maintien à domicile et de soutien apporté aux proches aidants, en lien avec les communes et les centres communaux d’action sociale (CCAS) ;
    • En lui donnant un rôle d’impulsion et de coordination de l’habitat inclusif.
  • Confier à la CNSA, dans un délai restreint, le chantier de l’unification des outils d’évaluation et de la refonte de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA)
    • À court terme, unifier les outils d’évaluation de la situation des personnes, à partir d’un bilan des outils existants ;
    • À moyen terme, confier à la CNSA la conception d’une prestation universelle d’autonomie sans barrière d’âge s’appuyant sur ce nouvel outil d’évaluation.
  • Systématiser les bilans complets vers 75 ans, réalisés par des infirmiers, des ergothérapeutes, des kinésithérapeutes et/ou des psychologues
    • Lancer un plan massif de recrutement d’ergothérapeutes ;
    • Autoriser plus largement ces professionnels à prescrire des aides techniques.
  • Mieux affirmer la priorité du maintien à domicile
    • Inscrire la priorité du maintien à domicile dans le droit positif ;
    • Expérimenter de nouveaux modèles d’organisation et de tarification des services d’aide à domicile.
  • Fixer un objectif d’arrêt de construction d’Ehpad à court terme
    • Développer les résidences autonomie, notamment en Outre-mer ;
    • Revoir les procédures de création et de rénovation d’établissement : y associer résidents et personnel, inclure les architectes dans les commissions de sélection et d’appel à projets, faire de l’ouverture sur la vie de quartier un des critères d’autorisation ou de rénovation ;
    • Encourager financièrement le déploiement des labels de bonnes pratiques ;
    • Créer un statut de kinésithérapeute coordonnateur.
  • Doter la CNSA des moyens d’exercer sa mission de pilotage de la politique de prévention de la perte d’autonomie
    • Élargir son périmètre au moins aux aides à l’adaptation du logement ;
    • Améliorer ses outils de suivi statistique des dépenses de soins infirmiers de ville et relatifs aux services d’aide à domicile.
  • Simplifier radicalement le paysage des aides à l’adaptation du logement en donnant accès aux usagers à des services, unifiés sous la houlette du département, d’information sur les solutions existantes, d’instruction de leur dossier depuis un guichet unique et d’accompagnement dans la réalisation de leurs travaux
  • Associer les ministères des Sports et de l’Enseignement supérieur à la politique de prévention de la perte d’autonomie
    • Associer plus étroitement les services déconcentrés du ministère des Sports aux conférences des financeurs ;
    • Assouplir les possibilités de prescription d’activité physique adaptée pour les personnes âgées ;
    • Développer les partenariats avec les universités de tous les âges, afin de mailler le territoire d’offres d’activités intellectuelles à l’attention des seniors comme des jeunes, sans concurrence entre elles ;
    • Étendre l’opération « Nation apprenante » à un public plus avancé en âge ; y associer les établissements médico-sociaux, enrichir à cette fin les cahiers des charges du service public audiovisuel.
  • Se doter de véritables plans d’action nationaux de prévention de la perte d’autonomie
    • Des plans évaluables, dotés d’objectifs et d’une gouvernance appropriée ;
    • Un volet spécifique sur la prévention de la perte d’autonomie Outre-mer.
  • Élargir les actions et rationaliser le fonctionnement des conférences des financeurs de la prévention de la perte d’autonomie
  • Dresser un bilan des différentes politiques d’accessibilité et d’adaptation des espaces urbains au vieillissement et des modifications qu’elles appellent des règles d’urbanisme