Violences conjugales : des associations tirent la sonnette d’alarme sur les financements

Publié le 4 septembre 2023 à 15h20 - par

Quatre ans après le lancement du Grenelle des violences conjugales, des associations d’aide aux victimes tirent la sonnette d’alarme sur leurs finances « exsangues » en raison de la hausse du nombre de femmes à aider.

Violences conjugales : des associations tirent la sonnette d'alarme sur les financements

« La plus grosse association de défense des victimes de violences faites aux femmes du Val-d’Oise, Du côté des femmes, est en redressement judiciaire. Cette association a fermé son accueil 24/24 et le tribunal pourrait annoncer sa liquidation d’ici fin septembre alors qu’elle accompagne 2 000 femmes », témoigne Anne-Cécile Mailfert, présidente de la Fondation des Femmes, qui finance les associations spécialisées dans les droits des femmes.

En Essonne, Léa Solidarité Femmes a dû licencier en août six de ses 19 salariés et est en train de fermer 65 de ses 141 places d’hébergement faute de financements, alors que ces places étaient occupées et qu’elle a une liste d’attente, alerte sa directrice adjointe Sophie Cartron à l’AFP.

Alors que dimanche 3 septembre 2023 a marqué le 4e anniversaire du lancement du Grenelle des Violences conjugales, la Fondation des Femmes fait valoir que les besoins d’accompagnement de femmes victimes de violences ont explosé mais les budgets, s’ils ont augmenté, n’ont pas suivi le même rythme, laissant les associations « exsangues », en grande difficulté financière.

« Les femmes parlent et c’est une bonne nouvelle. Grâce à la mobilisation politique et sociale sans précédent, les faits dénoncés aux forces de l’ordre ont augmenté de 82 % depuis 2016 », relève l’association dans un communiqué. Les associations de terrain font face à une « augmentation considérable » des demandes des femmes à accueillir, orienter, accompagner.

Or la Fondation des Femmes a chiffré que, depuis le Grenelle, « le budget dépensé par l’État pour chaque femme victime de violences accompagnée a baissé de plus de 25 %. Si le budget de l’État a augmenté depuis 2019, il n’a pas suivi l’explosion des demandes d’accompagnement ».

Interrogé par l’AFP, le ministère de l’Égalité entre les femmes et les hommes n’a pas souhaité réagir.

Charge administrative

« L’État, les préfectures continuent d’envoyer aux associations des victimes à aider, les dispositifs sont pleins, mais les moyens ne suivent pas. Des associations sont obligées de fermer ou de réduire leur action », explique Mme Mailfert.

De plus en plus de téléphones grave danger sont attribués par les parquets à des femmes en danger de mort.

« Avec la montée en charge du dispositif, des associations auraient besoin d’un soutien financier supplémentaire pour assurer un accompagnement soutenu : soutien juridique, psychologique, coups de fil pour les rassurer, recherche de logement », relève Françoise Brié présidente de la Fédération Nationale Solidarité Femmes (FNSF), association qui gère le numéro d’appel 3919.

Les associations soulignent la charge administrative qui pèse sur de petites associations pour obtenir des subventions.

« Certaines associations qui reçoivent énormément de femmes sont obligées de faire plusieurs dizaine de demandes de subventions : à l’État, aux mairies, départements, intercommunalités, aux financements privés, fondations, autres services de l’État. Il serait préférable que 80 % de leur financement provienne du ministère chargé de l’Égalité Hommes Femmes », estime Mme Brié.

« Pour séduire les fondations, elles doivent souvent présenter de nouveaux projets, alors qu’elles ont besoin d’un financement pérenne pour accompagner les femmes dans la durée. Des petites associations doivent multiplier les demandes de subvention par projet, alors qu’on est sur une délégation de service public », souligne Anne-Cécile Mailfert, qui souhaite qu’elles puissent compter sur des financements fiables.

« On signe des baux pour mettre en sécurité des femmes et leurs enfants. On ne peut pas les signer pour une année, sous réserve d’avoir les financements l’année suivante », explique Sophie Cartron.

« Les salariées des associations sont très tendues : elles touchent de tout petits salaires, elles font face à des problèmes très graves et elles ont le sentiment de ne pas avoir les moyens de faire face. Cela créée du malaise au travail », relève Mme Mailfert, qui espère « collecter un million d’euros d’ici la fin de l’année pour soulager les associations les plus en difficulté ».

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