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Que dit la loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 concernant la gouvernance, l’organisation et le fonctionnement des communes et des intercommunalités ?

Publié le 26 mars 2020 à 8h00 - par

La loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 apporte des précisions sur la gouvernance, l’organisation et le fonctionnement des communes et des intercommunalités pendant le confinement. Tour d’horizon des principales mesures.

La loi d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19 : quels apports relatifs à la gouvernance, à l'organisation et au fonctionnement des communes et des intercommunalités ?

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Élections municipales 2020
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La loi consacre d’abord que l’élection des conseillers communaux et communautaires dès le premier tour du scrutin le 15 mars 2020 reste acquise. Elle apporte ensuite des précisions concernant le calendrier d’organisation du second tour des élections municipales et communautaires, tout en envisageant de reprendre l’ensemble des opérations électorales si le second tour ne peut pas avoir lieu avant fin juin. Enfin, la loi proroge les mandats des conseillers municipaux et communautaires afin de garantir la continuité du service public, tout en assouplissant les règles de fonctionnement.

Confrontée à une grave crise sanitaire inédite sous la cinquième République, le président de la République et le gouvernement ont pris un certain nombre d’engagement concrétisés par la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19. Les articles 9, 10 et 19 de la loi précisent la gouvernance, l’organisation et le fonctionnement des communes et des intercommunalités pendant le confinement. Les articles 20 et 21 habilitent le gouvernement à des ordonnances sur certains points notamment en ce qui concerne les réunions des organes délibérants, l’exercice des compétences, les délégations, l’adoption et l’exécution des budgets, la fiscalité locale et les consultations et enquêtes publiques. Néanmoins, quatre apports sont notables : le maintien de l’élection des conseillers communaux et communautaires acquise dès le premier tour du scrutin le 15 mars (1) ; le calendrier d’organisation d’un second tour dans les communes où les conseillers municipaux et communautaires ne sont pas encore désignés (2), la prorogation des exécutifs municipaux et communautaires (3) et l’assouplissement des règles de fonctionnement (4).

1. Le maintien de l’élection des conseillers communaux et communautaires acquise dès le premier tour du scrutin le 15 mars 2020

L’article 19 de la loi précise que « l’élection régulière des conseillers municipaux et communautaires, des conseillers d’arrondissement, des conseillers de Paris et des conseillers métropolitains de Lyon élus dès le premier tour organisé le 15 mars 2020 reste acquise, conformément à l’article 3 de la Constitution ». Néanmoins, les conseillers municipaux et communautaires élus dès le premier tour organisé le 15 mars 2020 entreront en fonction à une date fixée par décret au plus tard au mois de juin 2020. En attendant, une prorogation des conseils municipaux et communautaires sortants et de leurs exécutifs est prévue. Cela emporte plusieurs conséquences.

Premièrement, les délibérations adoptées par les conseils municipaux, qui se seraient réunis entre vendredi 20 mars et dimanche 22 mars pour élire le maire et les adjoints, ne produiront leurs effets qu’à compter de la date d’entrée en fonction des conseillers municipaux. Il est instauré un mécanisme d’information à l’attention de ces élus connus depuis le 15 mars 2020. En effet, ils seront destinataires de la copie de l’ensemble des décisions prises par le maire. En revanche, ils n’exercent pas encore les prérogatives afférentes à leur mandat électif.

Deuxièmement, la date sera déterminée par décret sur le fondement d’un rapport remis au plus tard le 23 mai 2020 par le Parlement au gouvernement après avis du conseil national scientifique. Le premier conseil municipal se tiendra de droit entre cinq et dix jours après leur entrée en fonction pour l’élection des maires et des adjoints.

Enfin, dans le cas des établissement publics de coopération intercommunale dont la totalité des conseillers communautaires a été désignée à l’issue du scrutin du 15 mars 2020, le conseil communautaire se réunira au plus tard trois semaines après le début des mandats de conseillers municipaux et communautaires à la date fixée par décret.

2. La clarification relative de l’organisation du second tour des élections municipales

La loi précise d’abord que le Premier ministre devra prendre un décret, avant le 27 mai 2020, pour convoquer le second tour de scrutin. Celui-ci devra intervenir en juin. Ce second tour se fera sur le fondement des résultats du 1er tour du 15 mars 2020. Les déclarations de candidature à ce second tour seront déposées au plus tard le mardi qui suivra la publication du décret de convocation des électeurs.

Ensuite, la loi prévoit plusieurs dispositions relatives au déroulement de la campagne électorale pour ceux qui doivent participer à un second tour de scrutin. La campagne sera ouverte à compter du deuxième lundi qui précède le scrutin. Les dépenses électorales resteront comptabilisées à compter du 1er septembre 2019. Les plafonds de dépenses seront majorés par un coefficient fixé par décret qui ne pourra être supérieur à 1,5. Les comptes de campagne devront être déposés au plus tard le 10 juillet 2020 pour ceux qui ne participeront pas au second tour et au plus tard le 11 septembre 2020 pour ceux qui participeront au second tour.

Enfin, si la situation sanitaire ne permet pas l’organisation du second tour au plus tard au mois de juin 2020, l’élection devra être entièrement recommencée dans les communes de 1 000 habitants et plus pour lesquelles un second tour est nécessaire.

3. La prorogation des mandats de conseillers municipaux et communautaires jusqu’en juin 2020

Premièrement, dans les communes pour lesquelles le conseil municipal a été élu au complet, les conseillers municipaux en exercice avant le premier tour conservent leur mandat jusqu’à l’entrée en fonction des conseillers municipaux élus au premier tour. Leur mandat de conseiller communautaire est également prorogé le cas échéant jusqu’à cette même date. Dans les communes, pour lesquelles le conseil municipal n’a pas été élu au complet, les conseillers municipaux en exercice avant le premier tour conservent leur mandat jusqu’au second tour. Leur mandat de conseiller communautaire est également le cas échéant prorogé jusqu’au second tour.

Deuxièmement, les maires et adjoints au maire, conservent d’une part leur fonction jusqu’à l’élection effective de leurs successeurs. D’autre part, l’ensemble des délégations accordées avant le 15 mars aux élus dont le mandat est prolongé demeurent. Si un maire, en fonction avant le 15 mars, présente sa démission, il sera remplacé par un adjoint, dans l’ordre des nominations et, si l’ensemble des adjoints ont démissionné, par un conseiller municipal pris dans l’ordre du tableau. Si l’ensemble des adjoints au maire et des conseillers municipaux démissionnent, et que le conseil municipal ne comporte plus aucun membre, il conviendra et de nommer une délégation spéciale. Enfin, les indemnités de fonction des élus sortants seront maintenues si ces élus exercent encore leurs fonctions.

4. L’assouplissement des règles de fonctionnement des conseils municipaux et communautaires

Premièrement, la loi reporte la date limite d’adoption des budgets locaux au 31 juillet 2020.

Deuxièmement, les organes délibérants des collectivités territoriales et des établissements publics qui en relèvent ne pourront délibérer valablement que lorsque le tiers de leurs membres en exercice sera présent. Dans l’hypothèse où, après une première convocation régulièrement faite, ce quorum n’était pas atteint, l’organe délibérant serait à nouveau convoqué à trois jours au moins d’intervalle. Il délibèrerait alors sans condition de quorum. Dans tous les cas, un membre de ces organes peut être porteur de deux pouvoirs. Un dispositif de vote électronique ou de vote par correspondance papier préservant la sécurité du vote pourra être mis en œuvre dans des conditions fixées par décret pendant la durée de l’état d’urgence sanitaire. Cela ne sera pas possible dans le cadre des scrutins dont la loi commande le caractère secret.

La loi a apporté un cadre clair-obscur. Les conditions de gouvernance et de fonctionnement des organes délibérants doivent être précisés par ordonnance.

Dominique Volut, Avocat au barreau de Paris, Docteur en droit public

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