Inceste : premières mesures du Gouvernement, alerte de la Défenseur des droits

Publié le 7 octobre 2022 à 8h45 - par

Le Gouvernement vient d’annoncer la mise en place de premières mesures pour lutter contre l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants.

Inceste : premières mesures du Gouvernement, alerte de la Défenseur des droits

Un an après le lancement de la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise), le Gouvernement a annoncé, fin septembre, la mise en place de premières mesures pour lutter contre l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants. Celles-ci entendent répondre à « trois enjeux prioritaires ».

Mieux prévenir et repérer les violences

La secrétaire d’État chargée de l’Enfance, Charlotte Caubel, a ainsi annoncé :

  • La mise en œuvre d’une grande campagne nationale sur les violences sexuelles faites aux enfants pour faire connaître leurs manifestations et leurs conséquences pour les victimes, ainsi que les recours possibles, et mobiliser les témoins, en rappelant que ce sont des actes interdits par la loi et sanctionnés par le Code pénal.
  • La création d’une cellule de conseil et de soutien pour les professionnels destinataires de révélations de violences sexuelles de la part d’enfants. Aujourd’hui, l’accompagnement et le soutien des professionnels dépendent essentiellement de l’institution pour laquelle ils interviennent. Une cellule commune permettra d’appuyer les professionnels confrontés à des révélations, et de les aiguiller vers le dispositif le plus apte à prendre en charge leur signalement, assure la secrétaire d’État chargée de l’Enfance.

Mieux accompagner les enfants victimes

Dans le champ de la justice, le ministre Éric Dupond-Moretti prévoit les évolutions suivantes :

  • Le dépôt au Parlement d’une modification législative permettant le retrait de principe de l’exercice de l’autorité parentale en cas de condamnation d’un parent pour violences sexuelles incestueuses sur son enfant, sauf mention contraire de la juridiction de jugement par motivation spéciale. Ce mécanisme serait compatible avec le principe de la personnalisation des peines et permettrait au juge d’écarter le retrait, notamment en considération de l’intérêt de l’enfant, indique le ministre de la Justice.
  • L’accompagnement de l’enfant, de façon personnalisée et attentionnée, tout au long du processus pénal par les associations d’aide aux victimes et avec l’intervention d’un administrateur ad hoc, en cas de défaillance parentale : le plus tôt possible, dès le dépôt de plainte, pour tous les actes de l’enquête, jusqu’à l’annonce de la décision du procureur de la République, pendant le procès et pour garantir l’indemnisation intégrale du préjudice que l’enfant a subi.

Mieux prendre en charge les enfants victimes

Dans le champ de la santé, le ministre de la Santé et de la Prévention, François Braun, prévoit le déploiement, sur l’ensemble du territoire, des unités d’accueil et d’écoute pédiatriques (UAPED), structures pluridisciplinaires associant médecins, psychologues et enquêteurs. Ces unités vont dans le sens d’une meilleure coordination du parcours de l’enfant, tant sur le plan judiciaire que médical. Il est prévu de déployer ces unités à raison d’une UAPED par département. Par ailleurs, le ministre prévoit de renforcer la formation des professionnels de santé autour de la détection active des maltraitances, la sensibilisation aux questions du respect de l’intimité de l’enfant, et une démarche de prévention des violences.

Auditionnés le 9 mai 2022 par la Ciivise, la Défenseure des droits, Claire Hédon, et son adjoint Défenseur des enfants, Éric Delemar, saluent le travail de restitution de l’appel à témoignage lancé il y a un an par la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants. « Il apporte des préconisations essentielles afin de répondre à la souffrance des victimes, son ampleur et sa prise en compte ». La Défenseure des droits constate que ce travail d’écoute de la parole des victimes répond à certaines des recommandations qu’elle avait formulées et qu’elle défend continuellement.

Le recueil de la parole de l’enfant

Claire Hédon insiste sur l’importance de l’implication de tous les acteurs traitant avec des enfants : directeurs d’école, enquêteurs, éducateurs… Elle rappelle que le recueil de la parole de l’enfant doit se faire dans des conditions adaptées, « ce qui suppose de donner de réels moyens aux services enquêteurs pour réaliser des enquêtes complètes et approfondies dans l’ensemble des situations. » Par ailleurs, le recueil de la parole de l’enfant impose à ceux qui l’écoutent de prendre des mesures adaptées et immédiates pour protéger l’enfant et répondre à sa souffrance.

L’éducation à la sexualité des plus jeunes

Depuis plusieurs années, la Défenseure des droits souligne la nécessité de développer une approche globale de l’éducation à la sexualité, intégrant ses aspects affectifs, psychologiques ou sociaux, au même titre que ses aspects reproductifs. Claire Hédon regrette la trop faible mise en œuvre de la loi de 2001 dans les établissements scolaires, « alors que l’éducation à la sexualité peut contribuer à aider un enfant ou un adolescent à mettre des mots sur le comportement déviant d’un adulte et à le dénoncer ».

La Défenseure des droits appelle, une nouvelle fois, à ce que ce travail de la Ciivise conduise à « un changement de culture radical permettant de faire primer l’intérêt supérieur de l’enfant sur toute autre considération, dès les premiers soupçons de violence ».