Bas salaire, absentéisme, santé dégradée : elles racontent leur métier auprès des personnes âgées

Publié le 28 octobre 2019 à 12h14 - par

Précarité, manque de personnel, de temps pour le bien-être des patients : trois femmes, parmi les 830 000 employés du « grand âge », témoignent de leur travail à la veille de la remise d’un rapport attendu de Myriam El Khomri sur la « désaffection » pour les métiers auprès des personnes âgées, pourtant essentiels.

Bas salaire, absentéisme, santé dégradée : elles racontent leur métier auprès des personnes âgées

Laetitia Mauré, auxiliaire de vie : « il faut revaloriser les salaires »

« C’est normal que le secteur n’arrive pas à recruter, il faut revaloriser les salaires et l’indemnité kilométrique. C’est plus possible de payer pour aller travailler », témoigne à l’AFP Laetitia Mauré, auxiliaire de vie à domicile.

« L’indemnité kilométrique, 35 centimes du kilomètre, ça fait 10 ans qu’elle n’a pas été revalorisée », poursuit cette femme de 48 ans, lassée de voir « nombre d’auxiliaires de vie vivre en dessous du seuil de pauvreté ».

« La question de la précarisation des personnes âgées », de plus en plus présente selon elle, « résonne avec notre propre précarité ».

Employée d’une entreprise de soins à domicile de plus de 200 salariés, Mme Mauré juge que ses conditions de travail sont « difficilement tenables ». « On a de moins en moins de temps. On nous demande d’assurer la prise en charge d’une personne en 30 minutes. Or, c’est impossible », explique-elle.

Sa matinée type ? « On arrive, on dit bonjour, on ouvre les volets, on lève la personne pour le transfert lit-fauteuil et, si elle est lourde, c’est compliqué. Ajoutez à ça une petite douche, des mots sympas et quelques démarches administratives, cela prend forcément du temps ».

Sandrine Ossart, aide-soignante en Ehpad : « pas assez de personnel qualifié »

« En théorie, nous devons proposer aux résidents des activités thérapeutiques pour faire “comme à la maison”, c’est-à-dire les entraîner tous les jours à faire les gestes du quotidien. Dans la réalité, on n’y arrive pas car il n’y a pas assez de personnel qualifié », dépeint à l’AFP Sandrine Ossart, 49 ans, aide-soignante auprès de résidents diagnostiqués « Alzheimer et apparentés » dans une maison de retraite médicalisée.

Pour Mme Ossart, qui a un diplôme d’assistante de soins en gérontologie (ASG), qui permet la prise en charge de ces cas lourds, ce manque de personnel formé occasionne « des erreurs et du délaissement ».

À son étage d’un Ehpad privé de 84 places, « il y a deux soignants pour 24 résidents », ajoute-t-elle. « Au quotidien, on passe notre temps à former des gens, des intérimaires, qui de fait ne pourront pas assurer le suivi de ces résidents et ne resteront que peu de temps ».

« On nous parle de maltraitance des personnes âgées dans les Ehpad, c’est injuste parce que j’adore mon métier. Mais la vérité c’est que je ne peux plus prendre soin de chacun comme je voudrais », poursuit-elle.

La « difficulté du travail » engendre aussi « des problèmes de santé », souligne Mme Ossart, qui dit souffrir, après 26 ans de carrière, de douleurs corporelles récurrentes aux épaules et genoux.

Maryvonne Quesseveur, aide-soignante à l’hôpital : « trop d’heures supplémentaires »

« Les patients âgés demandent beaucoup plus d’attention car l’objectif est de préserver leur degré d’autonomie », témoigne à l’AFP Maryvonne Quesseveur, aide-soignante dans un hôpital de la région parisienne, qui fait régulièrement des heures supplémentaires en gériatrie par manque de personnel.

« Mais on n’a pas le temps d’écouter leur solitude, leur désarroi », poursuit cette femme de 42 ans, qui a choisi cette voie « par vocation » et pour « le contact humain ».

« Les gens n’ont plus envie de faire des métiers du soin », constate-t-elle, dénonçant « une volonté de destruction du milieu hospitalier public » et des situations « irrationnelles ».

« Nos conditions de travail sont telles, que les soins consacrés aux patients alités pour leur permettre de récupérer après une intervention sont insuffisants. Cela entraîne parfois une dégradation de leur santé : escarres, irritations, douleurs. Des conséquences médicales qui font allonger les durées d’hospitalisation qu’on cherche tant à raccourcir… ».

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