Management stratégique de l'information

 
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Pratiquer la veille stratégique et l'intelligence économique en PME et en TPE

  • 1 - Introduction et état des lieux
  • 2 - L'intelligence économique : pour quelles PME ?
  • 3 - Pratiquer la veille stratégique en PME/TPE
    • 3.1 - Utilité de la veille en PME/TPE
      1. Anticiper les menaces et les opportunités Diminuer l'incertitude La veille stratégique sert à anticiper les évolutions positives ou négatives de l'environnement, afin de ne pas subir d'éventuelles surprises stratégiques, c'est-à-dire des événements soudains, non familiers et urgents. Il s'agit de faire perdre ces caractères d'urgence, de soudaineté et de non-familiarité aux événements à venir, de prévenir les menaces ou d'être prêt à saisir les opportunités. Il s'agit pour le dirigeant de chercher à diminuer l'incertitude qui entoure ses décisions. Pour cela, la veille stratégique s'attache à détecter notamment ce que l'on appelle des « signaux faibles », informations parcellaires qui, regroupées, vérifiées et recoupées, permettent de comprendre, par exemple, la stratégie à venir d'un concurrent ou le développement d'un nouveau marché. Les dirigeants de PME qui font de l'IE déclarent ainsi réussir à anticiper les tendances de leur environnement à un horizon de deux ans, en moyenne. Ils peuvent ainsi mieux préparer leurs décisions, voire transformer une menace en opportunité. D'une certaine façon, l'IE est un investissement en temps : le temps qu'on y consacre permet de donner du temps à la préparation des projets de l'entreprise. Transformer une menace en opportunité Ressort, travail des métaux, 100 personnes, CA : 7,5 M€ « Prenons un autre événement : les trente-cinq heures. Notre entreprise ne pouvait rien faire contre. Mais nous sommes passés aux trente-cinq heures le 1 er  janvier 1999 alors que nous n'y étions pas obligés. En 1998, lorsque nous avons négocié en interne, nous avons voulu démarrer très vite en nous disant que nous allions prendre la loi avec un an d'avance, pour que quand les autres commenceraient à se poser la question “comment s'organiser ?”, nous soyons déjà organisés. Le résultat, c'est qu'en l'an 2001 dans cette entreprise, il n'y avait pas d'heures supplémentaires : on faisait trente-cinq heures, et on avait même diminué les effectifs. Cette loi m'a obligé à reconsidérer tellement de choses qu'on a réduit nos effectifs. On a transformé cette contrainte en opportunité. »
      2. Obtenir un avantage concurrentiel La veille est une compétence clé De même qu'être bon en négociation, avoir un faible taux de défauts, ou avoir un bonne gestion des ressources humaines peut donner un avantage sur les concurrents, une bonne pratique d' IE peut également donner à une PME un temps d'avance. Toutes les entreprises n'étant pas au même niveau de compétences en matière de veille stratégique, mieux anticiper l'environnement que ses concurrents, ou le faire plus vite, confère un avantage compétitif à l'entreprise (à niveaux de mise en œuvre équivalents). L'activité de veille peut représenter, en soi, une compétence distinctive pour une PME. Être au courant avant les concurrents Ressort, travail des métaux, 100 personnes, CA : 7,5 M€ « Nous faisons partie du Syndicat national des fabricants de ressorts, donc nous suivons de près les négociations normatives, que ce soit au niveau français ou européen, surtout européen. On le suit pourquoi ? Parce qu'on veut donner notre avis, et surtout parce que c'est un très bon moyen d'être informé bien en amont du “grand public”, c'est-à-dire des ressortiers en général. Donc j'ai des gens très actifs au niveau de notre syndicat sur tout ce qui est commission de normalisation, notamment des gens de notre bureau d'études. »
    • 3.2 - Étapes de la veille en PME/TPE
      1. La détermination du besoin en information « Qu'est-ce que je veux savoir ? » Aucune organisation, même très grande, ne collecte d'information au petit bonheur la chance. La définition du besoin en information consiste donc à définir les « questions de veille », c'est-à-dire les secteurs, acteurs, ou autres domaines que l'entreprise se donne pour mission de surveiller, de façon la plus continue possible ; mais aussi les thèmes qui peuvent être une source d'interrogation ponctuelle par rapport à un projet donné, ou parce qu'apparaît un nouveau concurrent, ou parce que l'on a remarqué une opportunité imprévue lors d'un salon. Une étape particulièrement importante La détermination du besoin en information nécessite d'y consacrer un temps spécifique. Rappelons qu'en PME , une grande partie de l'activité de veille va être effectuée par le dirigeant et par d'autres collaborateurs en même temps que d'autres tâches. Dès lors, si on ne sait pas quelle information est importante pour son entreprise, il est impossible de la « repérer » en lisant une revue ou en parcourant un salon. En revanche, quand on a en tête les quelques questions de veille qui sont primordiales pour l'entreprise, dès que l'on entend ou lit une information qui peut permettre d'alimenter le processus de veille, on va pouvoir s'en saisir, c'est-à-dire la collecter, voir « creuser » la source d'information ainsi détectée. Bonnes pratiques Cette étape de la veille doit être réalisée au moins une fois par an, au moment même où l'entreprise met à jour ses projets stratégiques pour l'année à venir (projet de développement, de différenciation). Il faut alors en profiter pour déterminer les grands axes de la veille. Mais il faudra aussi ajouter les questions de veilles liées à tout projet majeur pour l'entreprise qui apparaîtrait en cours d'année, ou qui découlerait de tout événement imprévu ayant des répercussions majeures et/ou rapides sur l'entreprise. Une autre bonne pratique consiste donc à ne pas transformer ces grands axes en œillères : quotidiennement, et dans le cadre des contacts habituels ou non de l'entreprise, il s'agit de « détecter l'insolite » en vue d'identifier un événement de rupture ou une tendance lourde qui se cache derrière une péripétie ou une information inattendue. On appelle la capacité à trouver quelque chose qu'on ne cherchait pas particulièrement la «  Serendipity  ». Ces bonnes pratiques ne sont pas contradictoires, mais complémentaires : les questions de veille « annuelles » guident la collecte, mais ne la limitent pas. Faire preuve de « Serendipity » Portmento, 25 personnes, fabrication d'équipements d'emballage et de conditionnement, CA : 1,8 M€ En zappant pendant la mi-temps d'un match retransmis à la télévision, le PDG de Portemento tombe sur l'interview d'un patron de centre commercial qui affirme que dans 20 ans, les boutiques ne stockeront plus de vêtements en dehors de quelques modèles destinés à être essayés. Tout ou presque sera commandé par smartphone et livré. Il se dit que cela diminuerait sérieusement ses ventes de cintres pour les magasins, mais qu'il faudrait en revanche développer des supports de vêtements « intelligents » pour les entrepôts, voire de nouveaux types d'emballage pour les expéditions. Il note le nom de ce patron de centre commercial et de l'émission dans laquelle il est interrogé. Il en visionnera l'intégralité pour alimenter sa réflexion. Cette collecte d'information n'était pas programmée, mais montre comment une personne qui a des « questions de veille » en tête est capable de détecter des éléments importants, comme ici un signal d'alerte sur le déclin potentiel des cintres utilisés en boutiques et une idée de nouveau produit à développer. Comment sélectionner les questions de veille ? On constate que les besoins en informations exprimés par les dirigeants de PME concernent d'abord le marché (dans l'ordre : clients, fournisseurs et concurrents), puis la recherche de nouveaux marchés. Ce faisant, les PME / TPE oublient parfois de surveiller des éléments pourtant déterminants de leur environnement, comme les grandes tendances de consommation ou la législation. Les outils et concepts de l'analyse stratégique sont très utiles pour définir ses besoins en information Ils sont nombreux et plus ou moins complexes à utiliser. Une PME pourra toutefois s'en approprier certains facilement qui constitueront autant de grilles de lecture lui permettant de définir et prioriser les éléments à surveiller. La PME/TPE gagnera d'abord à définir des questions de veille à partir de sa vision et de sa stratégie. Ces dernières ne sont pas toujours formalisées dans les petites structures et il faut, alors, ne pas hésiter, notamment lors d'une première démarche de ce type, à se faire aider par un intervenant extérieur (ex. : les chambres de commerce ou de métiers). Cette démarche aboutit souvent pour la PME/TPE à déterminer quelles sont ses grandes «  activités stratégiques  » (ex. : 3 à 5 combinaisons « marché/produit/technologie » distinctes), et à décider pour chacune d'entre elles d'un objectif stratégique, c'est-à-dire de ce que l'entreprise souhaite faire (arrêter les frais, investir, maintenir le niveau actuel, etc.). L'identification de marchés, produits ou technologies prioritaires va aider la PME/TPE à déterminer lesquels doivent être prioritairement surveillés. L'entreprise aura ensuite intérêt à se poser la question de son environnement concurrentiel et de son environnement global (analyse externe). D'autres outils d'analyse stratégique peuvent la guider dans cette analyse. Il s'agit principalement du «  modèle des forces de Porter  » et du modèle «  PESTEL  ». Ces outils présentent les forces qui s'appliquent à une entreprise et qui peuvent constituer des opportunités ou des menaces. Le premier est centré sur le marché de l'entreprise (concurrents actuels ou nouveaux entrants potentiels, produits de substitution, clients et fournisseurs) ; le second rappelle qu'un marché est aussi influencé par des éléments politiques, économiques, socioculturels, technologiques, écologiques et légaux. Il ne faut d'ailleurs pas oublier qu'outre les acteurs publics et privés qui interviennent dans ces domaines, il existe de nombreuses organisations de la société civile (associations, ONG , groupes informels de citoyens ou d'entrepreneurs) qui sont à inclure dans ce type d'analyse. Évidemment, une PME/TPE ne peut surveiller simultanément et quotidiennement tous ces acteurs et éléments. Il est donc intéressant pour elle de faire un travail de priorisation pour aboutir aux thèmes déterminants pour elle. Elle pourra ensuite mener une analyse dite « interne », en utilisant par exemple l'outil appelé «  chaîne de valeur  » (de M.-E. Porter) qui permet de décomposer les étapes de création de valeur par l'entreprise et d'identifier ses compétences clés. Ces dernières sont amenées à évoluer, permettant ainsi à l'entreprise de s'adapter ou d'innover. Elles sont donc source de questions de veille. Mener une analyse stratégique pour définir les questions de veille Portmento, 25 personnes, fabrication d'équipements d'emballage et de conditionnement, CA : 1,8 M€ Portmento fabrique et commercialise des supports de transport et de présentation de vêtements (portants, cintres, housses, cartons à chapeau, etc.) et a développé une gamme réputée pour sa solidité et sa durabilité. – Lors de l' étape de définition de ses objectifs stratégiques , Portmento a défini (notamment) comme activité stratégique à développer celle qui consiste à «  concevoir et fabriquer pour le compte de la grande distribution généraliste implantée en Europe des supports de vêtements de type cintres à pinces  ». Cette définition a permis l'établissement d'une question de veille ainsi libellée : «  Détecter toute évolution ou tout événement concernant aussi bien l'importance que la disposition des linéaires dédiés aux cintres et accessoires de vêtements au sein des surfaces de vente de nos clients de la grande distribution.  » – Lors de l' étape d'analyse externe , la PME constate que l'intensité concurrentielle sur le marché de la grande distribution est très forte. Elle décide donc de se différencier pour faire diminuer cette pression concurrentielle : «  en vue de nous différencier de nos concurrents directs dans le domaine de la fabrication de cintres à vêtements pour la grande distribution, nous allons développer une gamme de cintres incorporant une fonction esthétique  ». Cette décision la conduit à se poser la question de veille suivante : «  Détecter toute apparition de cintres à vêtements ayant une fonction esthétique ; par exemple : un cintre incorporant une source lumineuse permettant de créer un éclairage d'ambiance par diffusion du rayonnement lumineux à travers un vêtement clair posé sur celui-ci.  » On voit ici que la question inclut une première piste de recherche. Une analyse PESTEL la conduit aussi à identifier deux questions importantes : «  quelles sont les évolutions réglementaires prévisibles concernant les matériaux que nous utilisons dans la fabrication de nos cintres ?  » (législation) et «  quelles sont les grandes tendances en matière de mode qui pourraient conduire les boutiques à avoir de nouveaux besoins en matière de présentation d'articles (nouveaux types de chaussures, de vêtements, d'accessoires de mode ?)  ». Une des réponses à cette dernière question, la mode des « tongs de ville » conduira l'entreprise à développer des présentoirs adaptés. – Lors de l' étape d'analyse interne , Portmento a identifié une de ses compétences clés comme étant son «  aptitude à concevoir des objets à base de bois moulé, fabricables en grandes séries et ayant vocation d'accessoires d'ameublement  ». Elle considère donc qu'une autre question de veille prioritaire est la «  détection de toutes nouvelles avancées dans le domaine du bois moulé ou des techniques substitutives de celui-ci (“la mise en forme sous pression ou dépression de matériaux naturels”) applicables à des objets de grandes séries dont la plus grande dimension est 30 cm  ». Choisir les « bonnes » questions de veille Les démarches d'analyse stratégique peuvent déboucher sur des dizaines de questions de veille. Une PME / TPE ne pourra pas tout traiter de façon formalisée. Il lui faut donc déterminer une petite ou une grosse dizaine de questions prioritaires qui devront être la base de l'étape suivante, la collecte d'information. Les autres questions seront traitées en « arrière-plan », leur processus de définition ayant normalement contribué à les rendre présentes à l'esprit du dirigeant et de ses proches collaborateurs. Une bonne façon de sélectionner six questions de veille est de choisir les trois questions auxquelles les réponses permettront probablement de saisir de nouvelles opportunités, et les trois questions auxquelles les réponses permettront probablement de contourner ou d'éviter des menaces. Sélectionner les questions de veille Portmento, 25 personnes, fabrication d'équipements d'emballage et de conditionnement, CA : 1,8 M€ 1/ Questions pour saisir des opportunités • Détecter toutes attentes émergentes ou insolites en relation avec la présentation des vêtements et chaussants dans les linéaires des GMS Grande et moyenne surface . • Détecter en France et plus largement en Europe l'apparition de nouvelles enseignes dans le domaine de la mode. • Détecter toutes solutions techniques (existantes ou émergentes) permettant de personnaliser à la demande la décoration de petits objets à base de bois moulé. 2/ Questions pour éviter des menaces • Détecter les tendances lourdes conduisant à réduire, voire supprimer, l'utilisation au quotidien des vêtements que l'on suspend sur cintre. • Détecter toutes réglementations visant à limiter, voire interdire, l'utilisation des traitements de surface électrolytiques pour les mobiliers de magasin ; détecter tout traitement substitutif du traitement électrolytique actuel et visant à conférer un aspect « métal chromé » à des bâtis métalliques ou plastiques. • Détecter dès leur mise à disposition du public, les brevets déposés par nos concurrents au niveau mondial et notamment les éventuelles augmentations soudaines du nombre de brevets déposés par tel ou tel d'entre eux. Exprimer clairement ses besoins Si la définition générique des besoins en information reste relativement simple, son expression précise, permettant ensuite de mener une recherche d'information, est plus délicate. Par exemple, alors que beaucoup d'entreprises cherchent à réduire leurs coûts et leurs délais, peu expriment un besoin en informations liées à la production. Ce type de contradiction, plus fréquent qu'on ne l'imagine, doit être levé par un travail de maïeutique (ex. : un Brainstorming avec deux ou trois collaborateurs). Ensuite seulement il sera possible de réfléchir à la façon dont on peut obtenir l'information. Bien exprimer son besoin en renseignement Drap, industrie textile, 20 personnes, CA : 3 M€ Drap est une PME spécialisée dans la fabrication de drapeaux. Son dirigeant est très intéressé par la mise en place d'une démarche de veille stratégique, et dispose d'un stagiaire pour effectuer la collecte d'informations. Il a identifié un premier besoin générique en renseignement : « Comment réduire le prix de revient des drapeaux ? » La question peut paraître simple, mais elle n'est pas suffisamment précise pour pouvoir chercher une réponse concrète. Il est délicat de demander à un salarié : « trouve-moi comment réduire le coût de fabrication de nos produits ». En l'occurrence, il faut d'abord décortiquer le processus de fabrication et d'approvisionnement, pour voir où sont les postes de coûts les plus importants, et chercher ensuite d'autres méthodes ou d'autres fournisseurs. En PME, ce travail nécessite l'implication du dirigeant ou du directeur de la production. Dans ce cas, plusieurs pistes de recherche précises ont finalement pu être données au stagiaire, dont la recherche des différentes techniques d'impression sur tissu (l'idée étant de changer éventuellement l'outillage) et la recherche de fournisseurs d'encre alternatifs (l'idée étant, comme cela se fait dans l'univers BtoC, de ne plus être un client captif du fournisseur d'encre).
      2. La planification de la collecte d'information La planification de la collecte d'information est rarement formelle en PME . La plupart du temps, le dirigeant lui-même est au cœur du processus de collecte. Cependant, une PME qui désire améliorer son système de veille stratégique pourra déterminer : 1) Qui sont les personnes chargées de chercher l'information ? 2) Quelles sources d'information utiliser (revues, sites, bases de données, salons, etc.) ? 3) Quels moyens sont alloués à cette collecte (temps/ressources) ? L'information est l'affaire de tous Cette phrase revient fréquemment dans les ouvrages sur l' IE . Dans les PME, pourtant, la fonction d'IE est souvent concentrée dans les mains du dirigeant, et dépend en grande partie de son réseau. Le dirigeant est très impliqué comme capteur ou traqueur d'informations. Cependant, on sait également que les PME pratiquant l'IE se démarquent des autres PME par une plus grande participation des employés à la collecte d'information. L'adage ci-dessus correspond donc à la réalité des pratiques. En conséquence, les PME / TPE qui font de la veille sont souvent des entreprises où la démarche stratégique est expliquée aux employés. En partageant sa vision stratégique avec ses salariés, et en leur communicant certaines questions de veille, le dirigeant peut les inclure dans la démarche de collecte d'information. Il est à ce titre particulièrement intelligent de s'appuyer sur les collaborateurs qui ont des contacts à l'extérieur de l'entreprise. Impliquer les collaborateurs qui sortent fréquemment de l'entreprise Talyse, industrie chimique, 97 personnes, CA : 16,8 M€ « C'est le travail du dirigeant d'entreprise que de savoir parfaitement ce que préparent les concurrents. On peut appeler ça de la veille, mais ça n'est pas très formel. C'est le réseau de l'équipe dirigeante qui s'occupe de ce genre de choses, c'est-à-dire les personnes qui sortent régulièrement de l'entreprise, qui ont des contacts à caractère commercial, en tout 6/7 personnes. Ils obtiennent les informations auprès de clients, parfois il y a des concurrents qui vont me dire des choses, on les rencontre dans les congrès. Normalement, il est interdit de se parler entre concurrents… mais on les connaît par les clients, qui eux-mêmes connaissent les concurrents. Ce sont des petites bribes d'informations glanées ici et là, qui font qu'on arrive à se faire une idée plus ou moins juste sur les intentions des concurrents. » Types de veille et planification La veille est souvent découpée en « domaines à surveiller ». On parle alors de veille technologique, veille marketing, veille sociétale, veille juridique, etc. Concrètement, cela permet aussi de répartir l'effort de veille sur différents services d'une PME / TPE , en fonction des compétences de chacun. Si le dirigeant a souvent un œil sur tout, il peut demander au comptable de surveiller les évolutions fiscales, au directeur de la production de faire de la veille brevets, et aux commerciaux de remonter de l'information sur les concurrents. Certaines questions de veille qui pourraient, si elles étaient découvertes, révéler les intentions stratégique de l'entreprise, doivent toutefois n'être communiquées qu'avec précaution et seulement au(x) collaborateur(s) qui cherchera(ont) l'information (en lui/leur demandant la plus grande discrétion). Répartir l'effort de veille Ressort, travail des métaux, 100 personnes, CA : 7,5 M€ « La veille est plus ou moins formalisée. Tout ce qui est normatif, évolution du matériau, des équipements et des machines, est réalisé avant tout par notre responsable étude et développement. Les changements de procédés de fabrication, l'évolution des produits, c'est déjà une équipe commerciale et études qui est à la recherche des tendances du marché, des nouveaux produits. Pour tout ce qui relève du commerce électronique, aujourd'hui, c'est notre commercial qui est en tête de pont. Il faut d'abord s'assurer que nous sommes bien répertoriés et consultés lorsqu'il y a des appels d'offres en ligne. Et moi-même, je suis l'évolution du commerce électronique, notamment en essayant de faire des achats en ligne pour voir de l'autre côté de l'écran. Faisant l'expérience du côté acheteur, j'essaye de mieux comprendre comment nous devons agir commercialement en tant que vendeurs. Donc il y a, en matière de veille, des actions concertées entre plusieurs collaborateurs. […] La remontée des informations accidentelles, c'est-à-dire celles qui nous arrivent alors qu'on n'a pas eu à les chercher, se fait de façon informelle et très rapide. La veille est un axe stratégique. Cet axe est assorti d'objectifs par service ou par personne. À partir de là, il y a un système de communication et de remontée d'information. Nous fonctionnons avec des comptes rendus et des réunions où l'on fait le point sur les principaux travaux de veille que nous effectuons. » Demander des rapports d'étonnement Certains dirigeants demandent que tout salarié qui constate quelque chose d'inhabituel fasse un petit rapport expliquant ce qu'il a remarqué. Cela évite une planification de la veille trop rigide qui empêcherait une information importante, mais totalement imprévue, d'atteindre le décideur. La structure d'une PME, plus petite, moins codifiée que celle d'une grande entreprise, est plus favorable à ce type de remontée d'information (à condition que le climat social et donc, les salariés, s'y prêtent).
      3. La collecte de l'information Cette étape est la recherche d'information et sa diffusion auprès de ceux qui sont susceptibles de l'analyser et de l'interpréter. Des sources d'information gratuites ou peu onéreuses Si l'on pense toujours à Internet comme à une source d'information gratuite et quasiment illimitée (ce qui n'est pas entièrement vrai, ou n'est pas forcément un avantage), il ne faut pas sous-estimer les autres sources d'information. Les PME / TPE peuvent par exemple s'abonner à des bibliothèques pour quelques centaines d'euros par an et y consulter des dizaines de revues spécialisées, des bases de données d'entreprises, d'études de marché, des rapports de recherche, des ouvrages d'experts, etc. Veille technologique : exemples de sources d'information • Corde, BTP, 44 personnes, CA : 4,4 M€ « Il y a de la veille technique, mais je serais tenté de dire que c'est essentiellement moi qui lis plein de revues françaises et anglaises, scientifiques, techniques, centrées sur les activités dans lesquelles on peut intervenir ou sur du matériel dont on peut avoir besoin, pour faire évoluer au niveau technique. Autrement, comme je vous l'ai dit, je fais partie d'organismes de recherche sur les risques naturels, parce que ça m'intéresse. » • Broche, travail des métaux, 75 personnes, CA : 5 M€ « On a plusieurs trucs pour obtenir des renseignements. D'abord, on travaille avec certains fournisseurs : comme on a de bonnes relations, ils nous transmettent leurs propres informations, qu'ils ont glanées ici et là. D'autre part, on collabore avec eux sur certains développements d'outils. Là aussi, ça nous permet d'apprendre plein de choses. » • Talyse, industrie chimique, 97 personnes, CA : 16,8 M€ « Nous faisons une veille brevets assez élaborée. Nous effectuons très régulièrement une veille bibliographique via nos deux actionnaires. La recherche s'effectue par mots clés qui sont transmis au service juridique de l'actionnaire néerlandais. Ils me transmettent tous les brevets qui sont tombés – dans le cas que je vous montre, sur une période de deux mois et demi – et qui correspondent aux mots clés donnés. Ils sont issus d'une base de brevets américaine. Du côté de l'actionnaire français, je paye environ 1 000 € par an, au prorata du nombre de demandes effectuées. La base analysée est spécifique au domaine pétrolier. Cette veille est régulière, sur la base d'un profil que j'ai établi, suffisamment large pour tout voir, et suffisamment étroite pour ne pas être noyé sous les informations. C'est l'établissement de ce profil qui constitue la véritable difficulté. » Une autre solution est d'appartenir à des associations, clubs, fédérations ou autres groupements qui mettent à disposition de la documentation, voire disposent d'un service de veille mutualisé. Des outils gratuits De nombreux outils de veille sont disponibles gratuitement, le premier étant probablement Google ! Les PME ont donc tout intérêt à commencer par travailler en utilisant ces outils, quitte à acquérir ensuite des outils payants si le besoin s'en fait sentir. On a vu se développer le marché de la «  Business intelligence  », ensemble des technologies de l'information au service, notamment, de la veille et du traitement des données. En PME, la limitation des ressources financières et humaines impose une contrainte forte sur l'équipement en Hardware et Software . Mais heureusement, cette limitation n'a pas que des inconvénients. Les grandes entreprises pâtissent aujourd'hui de surinformation, notamment chiffrée, liée à la complexité de leurs systèmes d'information et au développement du «  Big data  ». Les PME, moins équipées, utilisent davantage les réseaux personnels de leurs dirigeants, qui délivrent une information plus qualitative. Le réseau du dirigeant, outil primordial de l'intelligence économique en PME Le réseau est un moyen de pallier le manque de ressources des PME pour la veille. Une PME / TPE a deux types de réseaux à sa disposition : 1) Le réseau professionnel : clients, fournisseurs, administrations publiques, universités, écoles, organisations professionnelles, consulaires, territoriales, institutions financières, etc. Une étude a montré que dans les industries de produits en plastique, les PME recourent avant tout aux informations technologiques obtenues des fournisseurs de matières premières. Les ateliers d'usinage obtiennent leurs informations des donneurs d'ordres. Les scieries s'informent auprès de leurs fournisseurs d'équipements. 2) Le réseau personnel du dirigeant (ou de l'équipe dirigeante) : personnes rencontrées dans des activités culturelles, sportives, famille, amis, réseau d'anciens, etc. Le réseau personnel du dirigeant La parole à Broche, travail des métaux, 75 personnes, CA : 5 M€ « Ça n'empêche pas qu'au départ, ces réseaux sont là pour le plaisir personnel. Mais si on sait les contrôler, on peut s'en servir pour marquer son territoire, pour être respecté. Attention, il y a quand même une notion d'éthique : les réseaux personnels sont des endroits où les gens se sentent bien et c'est important de conserver cet aspect social. Il y a donc des limites à se fixer ; qu'est-ce qu'on s'autorise à faire, qu'est-ce qu'on ne fait pas. » Les réseaux informels et formels des PME sont plus complexes qu'on ne le croit souvent ; ils servent autant au transfert d'information technologique, économique et politique qu'aux relations sociales. Dans les petites entreprises, les réseaux informels sont les plus utilisés. Ils deviennent cependant plus structurés ou plus formalisés à mesure que l'entreprise se développe et structure sa veille. Le dispositif français d'appui à l'IE La collecte de l'information peut et doit s'appuyer sur des partenaires, afin notamment d'en diminuer les coûts et d'en améliorer l'efficacité. En France, il existe de nombreux dispositifs d'appui aux PME , tant publics que privés. Les CCI , l' INPI , les chambres des métiers, Ubifrance, les syndicats professionnels, l'Ordre des experts-comptables… sont autant de partenaires potentiels pour les PME. Ils offrent des services gratuits ou payants, allant d'une sensibilisation à un accompagnement personnalisé. Certains offrent aussi de véritables prestations de service. Bien entendu, les PME peuvent aussi utiliser les services de consultants ou de prestataires spécialisés en IE, regroupés au sein du SYNFIE Syndicat français de l'intelligence économique . Se faire aider est particulièrement important si l'on aborde un domaine très nouveau pour l'entreprise (nouveau pays cible, nouvelle technologie, etc.). Une autre possibilité intéressante pour une PME est de faire appel aux services de stagiaires issus de masters spécialisés en IE (il en existe un classement annuel sur le site du SMBG : http://www.smbg.fr/ ).
      4. L'exploitation de l'information C'est l'étape au cours de laquelle l'information devient un véritable « renseignement » à travers une évaluation, des recoupements, une analyse, une synthèse. Tout cela se fait de façon informelle la plupart du temps. Il arrive fréquemment, en PME, que ce soit la personne qui recueille l'information qui en soit aussi « l'analyste », pour des raisons de compétences techniques. Tout salarié est susceptible de participer à la phase d'analyse. Des ouvriers analystes Broche, travail des métaux, 75 personnes, CA : 5 M€ « On achète des pièces fabriquées par les concurrents. Pas pour copier les pièces (c'est déjà trop tard) mais plutôt pour les regarder avec les compagnons. Ça nous permet de deviner un certain nombre de trucs… Comme ils ont beaucoup de métier, ils sont capables de reconstituer le procédé de fabrication. Ça nous permet de voir s'il y a de nouvelles idées à prendre. On se met à plusieurs, on discute. Les compagnons aiment bien faire ça. Ils savent que c'est important pour l'entreprise, ils ne font pas que travailler sur les machines. Les compagnons, c'est comme ça qu'on appelle les ouvriers de notre entreprise. Ce ne sont pas de vrais compagnons au sens de ceux qui font leur Tour de France. Mais bon, vous voyez, ça traduit bien l'esprit de l'atelier. Il y a une bonne ambiance, ils sont motivés, ils aiment bien participer à des activités comme ça. Finalement, on fait de la veille technologique. » L'interprétation des événements de rupture peut s'avérer malaisée dans un certain nombre de cas ; il convient alors de réunir l'équipe de direction et de travailler par étapes : Énoncer l'événement et ses causes. Identifier les principales conséquences favorables ou défavorables « toutes choses égales par ailleurs ». Définir les actions permettant d'amplifier les conséquences présumées favorables et de minimiser les conséquences présumées défavorables.
      5. La diffusion du produit de la veille Définition C'est l'acheminement des renseignements sous une forme appropriée (orale ou écrite) aux personnes qui en ont besoin. Dans la PME, il s'agit toujours du chef d'entreprise, mais aussi des différents départements susceptibles d'utiliser l'information (ex. : direction commerciale ou de la production). Cette diffusion est généralement orale, mais il est préférable de garder une trace des informations collectées. Cela peut se faire dans une petite base de données, avec un système de mots-clés. L'important est que ceux qui peuvent avoir à utiliser une information sur un concurrent ou une technologie puissent la retrouver facilement.
  • 4 - Aller plus loin en IE : protection de l'information et influence en PME/TPE

1 - Introduction et état des lieux

En dépit des idées reçues, il existe des PME et même des TPE pratiquant l'intelligence économique (IE). Ce qui diffère, par rapport à une grande entreprise, ce sont les moyens mis en œuvre. Il en va de l'IE comme des autres fonctions de l'entreprise (RH, marketing, etc.) : une PME peut très bien la pratiquer de façon relativement informelle. L'attitude du chef d'entreprise est donc déterminante : s'il est convaincu que la pratique de IE peut aider son entreprise à être plus performante, il sera le mieux placé pour adapter les grands principes décrits dans cet ouvrage à son organisation. En premier lieu, il sera bien avisé d'entreprendre une démarche de la veille stratégique, porte d'entrée vers l'IE.

Remarque

Pour préserver l'anonymat des entreprises, les noms des PME citées ont été changés.

L'intelligence économique n'est plus le domaine réservé des grandes entreprises

Si dans les années 1990, on pensait que l'IE était une affaire réservée aux grandes entreprises, voire aux multinationales appartenant à des secteurs stratégiques pour l'État (défense, nouvelles technologies, énergie, etc.), ce n'est plus le cas aujourd'hui. Il en va en effet de l'IE comme de toutes les pratiques organisationnelles : les différences entre une petite et une grande entreprise, entre une entreprise privée et une entreprise publique, entre une entreprise, une ONG, une collectivité territoriale, voire un État sont bien souvent de degré, pas de nature. Toutes ces organisations pratiquent des formes de marketing, de gestion des ressources humaines, de planification, de comptabilité, etc. Toutes sont susceptibles de pratiquer l'IE. Simplement, leurs moyens, leurs objectifs et leurs méthodes différeront. Ce n'est pas parce que l'IE n'est pas incarnée dans un organigramme ou matérialisée par un coûteux système d'information dédié qu'elle n'est pas pratiquée. Elle n'a même pas besoin d'être nommée pour l'être : certains patrons de PME la pratiquent sans le savoir. La première chose à faire pour une PME qui souhaite s'approprier une démarche d'IE est donc d'oublier définitivement la phrase « ce n'est pas à notre portée ».

Veille, protection et influence

Tous les principes généraux et nombre d'outils décrits dans les chapitres de cet ouvrage peuvent s'appliquer en PME. L'IE, dans une petite structure, consiste tout autant que dans une grande à faire de la veille, à protéger son patrimoine informationnel et à tenter d'influencer son environnement plutôt que de le subir. Tout cela est possible sans infrastructure lourde et sans moyens financiers importants.

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