Entre Saint-Denis et Pierrefitte-sur-Seine, bientôt un mariage avec fracas

Publié le 22 avril 2024 à 15h30 - par

Un mariage original doit se tenir fin mai en Seine-Saint-Denis : celui des communes de Pierrefitte-sur-Seine et Saint-Denis, que des trouble-fête vont tenter d’empêcher.

Entre Saint-Denis et Pierrefitte-sur-Seine, bientôt un mariage avec fracas
© Par Yuriy Davats - stock.adobe.com

« Ce n’est pas une lubie, c’est un échange entre Mathieu (Hanotin, le maire PS de Saint-Denis, NDLR) et moi », avait lancé à une centaine de ses administrés Michel Fourcade, maire socialiste de Pierrefitte lors du premier événement public à ce sujet un samedi de février, un an après leur annonce surprise.

« Ce qui a motivé notre approche c’est évidemment l’intérêt général et le service public », promettait à ses côtés Mathieu Hanotin.

Et le président de l’établissement public territorial Plaine commune de citer plusieurs bénéfices pour les deux communes du nord de la Seine-Saint-Denis : une ville qui pèserait plus au niveau national en devenant la deuxième plus grosse commune de la région avec 145 000 habitants d’après les derniers chiffres officiels.

Ou encore l’élargissement de la cantine scolaire gratuite aux Pierrefittois, une police municipale 24h/24 et « une capacité d’investissement supérieure dès la première année ».

« C’est faux ! », « fallait juste faire un référendum ! », s’est alors fait interrompre l’édile.

Processus permis par la loi et encouragé pour les villages et petites communes, la fusion est votée en conseil municipal sans consultation nécessaire de la population, puis validée en préfecture qui vérifie le respect de la procédure.

Selon l’Insee, 24 communes ont été regroupées en 11 communes nouvelles en 2023. Sur la même année, trois ont décidé de se défaire de précédentes fusions.

Les opposants au projet fustigent un manque de consultation de la population. Le 3 février 2024 à Pierrefitte, le micro n’est pas passé dans les rangs après les discours des édiles.

Une réunion publique est prévue le 2 mai, quatre semaines avant les votes en conseils municipaux, le 30 mai.

Malgré leur pouvoir d’action limité – les maires ont une large majorité dans chacun des conseils municipaux – les opposants veulent faire capoter l’union. Face à ce qu’ils décrivent comme un « déni de démocratie », ils ont lancé une « votation citoyenne ».

« D’où vient cette idée ? Personne n’en avait parlé avant », s’exaspère Christian Boutin, président de l’association Stop Fusion Pierrefitte Saint-Denis et habitant de Pierrefitte.

« Réservoir de voix »

Au 1er janvier 2025, un maire, Mathieu Hanotin, et un premier adjoint, Michel Fourcade, devraient être à la tête de la ville jusqu’aux élections de 2026.

Pour l’opposition, le projet de fusion est une manœuvre purement politique pour acquérir « un réservoir de voix » socialistes.

En 2020, la désunion des listes de la majorité sortante avait joué en faveur de l’élection de Mathieu Hanotin dans un contexte d’abstention record (69 %). Son voisin Michel Fourcade n’a pas de successeur politique après son troisième et dernier mandat.

« C’est bien parce qu’on est assez sereins vis-à-vis de nos projets, en adéquation avec les attentes de la population qu’on peut se permettre d’avancer sur cette proposition forte. La population aura à en juger mais sur pièces et pas sur des fantasmes, en mars 2026 » lors des élections municipales, se défend Mathieu Hanotin.

Rencontrées au marché de Saint-Denis, Farida Allaoui et sa fille Kawthar habitent à Pierrefitte depuis un an. « On ne sait pas vraiment ce que ça va changer. Si c’est un bien, que ça se fasse », estime la mère de famille en recherche d’emploi qui n’était même pas informée du projet. « On est plus à Saint-Denis qu’à Pierrefitte pour les courses, les impôts, le judo… », énumère-t-elle.

En passant devant un stand de produits de dératisation, Richard Blanc, Dyonisien depuis plus de cinq décennies estime que « ça va plutôt développer Pierrefitte qu’autre chose ».

« On propose au maire de ne pas se précipiter, de présenter un vrai dossier avec une analyse financière », affirme Sofia Boutrih, élue d’opposition du groupe « Saint-Denis à gauche », « inquiète » des finances de Pierrefitte. D’après un rapport d’observations définitives de la Chambre régionale des comptes, établi principalement sur les exercices 2016-2021, la gestion financière globale est insuffisante dans la commune, fortement endettée.

Pour l’élue, « c’est une absorption, pas une fusion » et sans garanties sur la continuité du service public. « Nous sommes des villes populaires avec des politiques publiques progressistes, affirme-t-elle. Ça fait partie de notre ADN d’être au plus proche de la population ».

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