Environnement (analyse de données sur l’air, la gestion des déchets, la consommation d’eau, maintenance prédictive des réseaux), mobilités (analyse comportementale et accidentologie), urbanisme (exploitation des données de catégorisations du foncier et du bâti, inventaire du mobilier urbain)…, l’intelligence artificielle (IA) générative se diffuse rapidement et les entreprises proposent désormais des offres aux collectivités. Ce qui « incite les élus locaux à agir vite et de manière concertée avec l’État afin de poser un cadre éthique et réglementaire partagé via une convention nationale de l’IA », constate Jacques Oberti, président d’Intercommunalités de France. Les élus intercommunaux, auditionnés le 30 janvier 2024 par le comité national de l’intelligence artificielle générative mis en place par Élisabeth Borne en septembre 2023, jugent en effet indispensable d’anticiper les impacts de l’IA sur les missions des agents et de poser un cadre éthique et réglementaire de l’IA, en concertation avec l’État. Le débat devrait aussi porter sur l’utilisation de l’IA sous l’angle écologique et démocratique dans tous les domaines : économie, social, santé, éducation, sécurité… Car l’IA n’est pas seulement une question technologique.
Si elle constitue un outil indéniable, l’IA générative ne doit évidemment pas se substituer à la relation humaine avec les citoyens. D’autant que, de nombreuses fonctions administratives pouvant être automatisées, l’IA pourrait impacter 37 % des emplois publics contre 32 % dans le secteur privé, selon une étude du cabinet Roland Berger. Intercommunalités de France, France Urbaine et les Interconnectés ont entrepris de recenser les projets des collectivités pour éclairer les élus dans leurs décisions. Des cas d’usage multiples pourraient apparaître : archivage, recherche de subventions, gestion d’actes juridiques des collectivités…
Les thèmes abordés le 30 janvier 2024 rejoignent en partie un plan d’action présenté par la commission numérique d’Intercommunalités de France au début de l’année. La commission estime notamment qu’il faudrait traiter l’utilisation de l’IA dans l’espace public par le biais de conventions citoyennes, chartes et débats locaux sur l’IA, comme en ont organisé Angers Loire métropole, Montpellier Méditerranée métropole ou Rennes, par exemple. Ces débats et consultations pourraient aider les citoyens à s’approprier le sujet et à dessiner les contours éthiques et politiques d’une convention nationale d’IA.
L’IA pourrait libérer du temps des agents
Certaines collectivités – c’est le cas de Montpellier – réfléchissent à un cadre d’utilisation de l’intelligence artificielle et commencent à expérimenter l’IA générative auprès de leurs agents. L’État (direction interministérielle du numérique) doit aussi tester prochainement un outil d’IA générative français (Albert) auprès des agents volontaires du réseau France services, majoritairement recrutés par les collectivités. Objectif : générer des textes fiables afin de libérer du temps et de renforcer les contacts entre agents et usagers. « Le croisement entre les différentes expérimentations de l’État et celles menées par les collectivités sera nécessaire pour poser un futur cadre », précise Intercommunalités de France. En effet, les élus doivent être en mesure de pouvoir décider des modalités d’utilisation de ces nouveaux outils auprès des usagers et des agents.
Le comité interministériel de l’intelligence artificielle générative, coprésidé par l’économiste Philippe Aghion et Anne Bouverot, présidente du conseil d’administration de l’École normale supérieure, devrait rendre ses conclusions d’ici quelques semaines.
Marie Gasnier