En cas de non paiement, le titulaire d’un marché public de dépôt peut-il exercer un droit de rétention ?

Publié le 15 avril 2009 à 2h00, mis à jour le 15 avril 2009 à 2h00 - par

Le principe d’insaisissabilité des biens des personnes publiques s’oppose à ce que le titulaire d’un marché d’entreposage ait pu régulièrement faire usage des voies d’exécution ouvertes par l’article 1948 du Code civil pour contraindre le pouvoir adjudicateur au paiement des prestations correspondant à l’entreposage des matériaux lui appartenant. C’est ce qu’a affirmé la Cour administrative d’appel de Paris dans son arrêt du 24 octobre 2008, Fonds de développement des archipels (n° 06PA03339). Analyse et commentaire d’Olivier Caron et Alexandre Labetoule, avocats.

En cas de non paiement, le titulaire d’un marché public de dépôt peut-il exercer un droit de rétention ?

Faits

Le Fonds de développement des archipels, qui revêt la nature d’un établissement public industriel et commercial, a confié à la société Entrepôts et Magasins Généraux de Tahiti (EMGT) les prestations d’entreposage et de colisage de maisons préfabriquées devant être distribuées dans les archipels dans le cadre d’opérations de logement social. À la suite de difficultés d’exécution du contrat, la société EMGT a demandé la condamnation du Fonds au paiement d’une indemnité pour rupture abusive du contrat d’entreposage. Elle a également retenu les marchandises entreposées pour le compte du Fonds afin de le contraindre à régler les sommes réclamées.

Décision

Le principe d’insaisissabilité des biens des personnes publiques s’oppose à ce que le titulaire d’un marché d’entreposage ait pu régulièrement faire usage des voies d’exécution ouvertes par l’article 1948 du Code civil pour contraindre le pouvoir adjudicateur au paiement des prestations correspondant à l’entreposage des matériaux lui appartenant.

Le conseil de l’avocat

Aux termes de l’article 1948 du Code civil : « Le dépositaire peut retenir le dépôt jusqu’à l’entier payement de ce qui lui est dû à raison du dépôt ». Les entreprises ne sauraient impunément faire usage de ce droit de rétention prévu par le Code civil contre des biens appartenant à des personnes publiques. En l’espèce, la Cour administrative d’appel de Paris a estimé que la société EMGT avait ainsi commis une faute non détachable du contrat de dépôt ouvrant droit à réparation du préjudice subi par le Fonds. D’une manière générale, le principe d’insaisissabilité s’oppose non seulement à la mise en œuvre contre les personnes publiques (État, collectivités locales, établissements publics) de l’ensemble des procédures civiles d’exécution, mais interdit aussi la constitution de sûretés sur les patrimoines administratifs. S’y ajoutent d’autres effets, relatifs à la compensation entre dettes publiques et créances privées, et à l’inapplicabilité des procédures collectives aux personnes publiques.

Texte de référence : CAA de Paris, 24 octobre 2008, Fonds de développement des archipels, req. n° 06PA03339, mentionné aux tables du Recueil Lebon

Extrait

« … nonobstant le silence du contrat, le principe d’insaisissabilité des biens des personnes publiques s’oppose à ce que la société (…) ait pu régulièrement faire usage des voies d’exécution ouvertes par l’article 1948 du Code civil précité pour contraindre le Fonds d’entraide aux îles qui, de par son statut d’établissement public industriel et commercial, est une personne publique, au paiement des prestations correspondant à l’entreposage des matériaux lui appartenant. »

Texte officiel
Code civil (article 1948).


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