Hausse de la TEOM : “il y a aussi une responsabilité individuelle de limiter la production de déchets”

Publiée le 5 juillet 2022 à 10h49 - par

De nombreuses collectivités ont choisi d'augmenter la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM) ; + 5 % pour près de huit communes sur dix, selon une étude d'Amorce. Laurent Guyon, directeur général des services du syndicat mixte DECOSET, qui traite les déchets pour le compte de huit EPCI autour de Toulouse, nous explique les raisons de cette envolée des prix.
“Pour éviter que la TEOM augmente trop, il y a aussi une responsabilité individuelle de limiter la production de déchets”

Comment s’expliquent les augmentations massives du montant de la TEOM prévues pour 2022 ?

Il faut savoir que ce sont les EPCI (communauté ou syndicat mixte) qui gèrent la collecte des déchets qui votent la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM), même si ensuite ils délèguent la compétence traitement. Dans le montant de la TEOM interviennent deux paramètres : les coûts de collecte et les coûts de traitement. Pour la partie collecte, l’augmentation est liée à la hausse du prix de l’énergie mais aussi aux dépenses de personnel qui augmentent naturellement, même à effectif constant et sans augmenter le salaire des agents, en raison de l’ancienneté. La décision de l’État d’augmenter la valeur du point d’indice va surenchérir encore le prix de la masse salariale pour les collectivités en régie. Pour les autres collectivités, qui passent un marché public avec une entreprise privée qui fait la collecte à leur place, il y a des règles d’indexation sur les coûts de salaire et d’énergie dans les marchés, et cela revient au même.

La TEOM prend également en compte les coûts de traitement, qui augmentent, eux aussi, sous l’effet de plusieurs paramètres. Il y a tout d’abord la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), que l’État applique aux collectivités, et qui augmente beaucoup. Quand les ordures ménagères sont enfouies, elle est plus élevée que lorsqu’elles sont incinérées. Pour inciter les collectivités à entreprendre des démarches de prévention et de réduction de la production des déchets, l’État augmente la TGAP ; son augmentation sera beaucoup plus importante pour les collectivités qui enfouissent que pour les collectivités qui incinèrent les déchets et qui produisent de l’énergie.

Ensuite, pour incinérer ou trier les déchets, les usines utilisent beaucoup d’énergie et, comme les coûts de l’énergie explosent, les coûts de traitement explosent aussi. Gérer un centre de tri ou une usine d’incinération est une activité très industrielle que les syndicats de traitement externalisent souvent, et les marchés comportent généralement une clause d’indexation sur le coût de l’énergie. Ces facteurs se combinant, beaucoup de collectivités risquent en effet cette année d’augmenter la TEOM.

Comment faites-vous au DECOSET ?

Le syndicat est composé exclusivement d’EPCI dont les situations sont variables. Nous avons une grille tarifaire et nous facturons des prestations aux EPCI adhérents, selon un prix en euros pour chaque tonne de déchets incinérés, triés, mis en déchetterie, de déchets verts valorisés… Les EPCI reçoivent une facture mensuelle pour les déchets traités, sur laquelle nous répercutons l’évolution des coûts, et ils équilibrent ensuite leur budget en votant la TEOM. À Toulouse Métropole qui représente 80 % de nos adhérents avec 800 000 habitants, la TEOM n’a pas bougé en 2022 et devrait rester stable en 2023 malgré l’augmentation des coûts. La communauté d’agglomération du Sicoval (80 000 habitants) ne lève pas la TEOM mais une redevance d’enlèvement des ordures ménagères (REOM).

Quelles seraient les solutions pour minorer ces coûts ?

Les hausses de coût sont relativement structurelles mais plusieurs axes de travail permettent de limiter cette augmentation. Je prends un  exemple. Nous avons une usine qui incinère les déchets et le contrat que nous avons signé avec le prestataire précise que les tarifs à la tonne augmentent avec le prix de l’énergie. Nous allons nous mettre autour de la table avec eux et leur demander de prouver que leurs coûts augmentent en même temps que l’électricité. Si ce n’est pas le cas, il n’y a pas de raison que notre facture augmente et nous renégocierons donc le marché.

Autre exemple : dans une usine d’incinération, nous produisons de l’énergie avec les déchets brûlés qui alimente des réseaux de chaleur. L’enjeu est de faire en sorte qu’elle soit le plus performante possible, car si les prix de l’énergie sont hauts, les prix de revente de la chaleur augmentent aussi. Il faut donc compenser l’augmentation de coût subie par l’augmentation des recettes de l’énergie vendue. Et puis, il y a aussi une responsabilité individuelle de chacun pour faire en sorte que le coût de collecte et de traitement des déchets n’entraîne pas une augmentation de la TEOM trop importante, en s’efforçant de produire moins de déchets, de mieux trier, de mettre un composteur dans son jardin…

Propos recueillis par Martine Courgnaud – Del Ry

DECOSET

DECOSET est un syndicat mixte de réalisation, composé exclusivement d’établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), créé en 1993, avec pour vocation la mise en place d’une filière optimale de traitement et de valorisation des déchets ménagers. Il regroupe aujourd’hui 8 EPCI totalisant 152 communes et plus de 1 021 057 habitants.

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