Boulogne-Billancourt : une crèche privée au statut singulier

Publié le 9 février 2010 à 0h00 - par

À Boulogne-Billancourt, une crèche est gérée par une entreprise privée qui n’assure ni la facturation ni les repas. Retour sur ce marché particulier.

Boulogne-Billancourt : une crèche privée au statut singulier

Le 1er septembre 2009, la ville de Boulogne-Billancourt a ouvert une crèche de 20 places, rue des Enfants-du-Paradis. « La particularité de ce marché : une entrée commune entre la crèche privée et la crèche municipale et des repas fournis par le cuisinier de la crèche publique, ce qui supposait une collaboration à mettre en place », explique Corine Thérézien-Racamier, directrice de l’entreprise la Ronde des Crèches, attributaire du marché. La ville lance un marché à procédure adaptée pour la gestion de cette crèche en novembre 2008. Le marché à bons de commande d’un an sur une durée maximale de quatre ans est notifié fin mars 2009. « Nous fournissons l’équipement et les repas et assurons l’administratif. Eux fournissent l’équipe, les consommables, c’est-à-dire les jouets et le matériel pédagogique, et assurent le nettoyage et la sécurité », raconte Roxane Vergara, directrice de la famille de la ville de Boulogne-Billancourt, qui gère également l’attribution des places. Pour ce marché, la ville souhaitait facturer aux familles le prix de la prestation. Aussi avait-elle besoin de toucher les subventions de la Caisse d’allocations familiales (CAF). Un système nouveau pour la CAF. En effet, la prestation de service unique (PSU) est en général versée à l’exploitant. « Nous, nous ne sommes pas exploitants mais nous assumons le risque de l’activité. Nous avons donc passé une convention tripartite lors de notre premier marché de gestion de crèche en 2006-2007 avec la CAF. Cette opération a pris un an environ », ajoute Roxane Vergara. Les critères d’attribution sont : 60 % pour la valeur technique et 40 % pour le prix.

Un mémoire technique en trois parties

Trois parties constituent le mémoire technique : la qualité du projet pédagogique et la pertinence du projet de règlement intérieur ; les moyens spécifiquement affectés et, enfin, le budget prévisionnel de fonctionnement – non noté. Les objets d’appréciation de la première partie, notés sur 50 points, sont : l’évaluation des termes du contrat d’accueil proposé aux familles, du projet social et des modalités prévues à la fois pour l’adaptation des enfants et pour l’intégration des parents au sein de l’établissement, et les modalités du suivi médical des enfants. Y figure également l’appréciation de l’organisation des activités quotidiennes. Pour la deuxième partie, notée sur 50 points elle aussi, l’appréciation porte sur le taux d’encadrement, l’estimation en pourcentage du personnel diplômé et qualifié affecté auprès des enfants, les modalités mises en place pour pallier les absences de la responsable de l’établissement, l’évaluation des modalités d’organisation des tâches techniques et la présence de vacations de psychologues pour le personnel. « La dimension de l’équipe doit être un élément essentiel de l’analyse des offres. C’est le cas ici.

Pourtant, certaines collectivités n’en mesurent pas encore assez l’importance. Les moyens humains sont une donnée décisive pour assurer la qualité du service et la sécurité des enfants », commente la directrice de la Ronde des Crèches. Un marché estimé entre 260 000 et 550 000 euros pour lequel la ville a négocié par courrier ou par télécopie. Sept offres ont été reçues. La ville a négocié avec l’ensemble des candidats. « L’arbitrage s’est fait entre les moyens affectés et le prix. Et nous n’avons pas choisi l’offre la moins chère », conclut Roxane Vergara.

Entretien avec Roxane Vergara, directrice de la famille et Olivier Thomas, chargé des marchés publics à la direction de la famille de Boulogne-Billancourt

« Un véritable projet pédagogique, pas un annuaire »

HA. : Combien de temps faut-il pour passer ce type de marché ?

Olivier Thomas : Il faut compter six ou sept mois environ. Nous avons rédigé le marché en septembre 2008 pour passer l’avis de publicité mi-novembre 2008. L’analyse des offres a eu lieu début janvier et la négociation de fin janvier à mi-février 2009. La commission d’appel d’offres s’est réunie début mars pour une notification à la fin de ce mois.

HA. : Que doit contenir le volet pédagogique du mémoire technique ?

Roxane Vergara : Un projet social totalement argumenté. Comment structurent-ils la journée des enfants ? Pourquoi font-ils tel ou tel jeu ? Comment ce projet pédagogique s’est-il construit ? Quelles sont les propositions pour intégrer les parents dans la structure, etc. ?

HA. : Pourquoi mettre l’accent sur le règlement intérieur ?

R.V. : Au-delà de la qualité, il faut faire attention à la pression que les opérateurs peuvent exercer sur les familles dans le but de remplir la structure d’accueil. Une famille qui signe un contrat d’accueil peut se voir signifier que son enfant sera gardé au minimum 10 heures par jour. Aussi est-ce très important de lire attentivement toutes les clauses du règlement intérieur, souvent standard, notamment celles sur la gestion des impayés et sur les cas d’exclusion des enfants (en cas de retard par exemple). Pour notre part, nous gérons les impayés.

HA. : Qu’est-ce qui ne peut pas être accepté ?

R.V. : Une adaptation en trois jours, par exemple. Elle très importante parce que l’entreprise va prendre en charge des tous petits. La crèche n’est pas un centre de loisirs. Aussi leur demande-t-on comment ils envisagent cette adaptation.

HA. : Le suivi médical des enfants et des employés est-il important ?

R.V. : Bien sûr, et nous avons besoin de savoir quand intervient le médecin, s’il vient aux réunions des parents, si un psychologue est à la disposition des salariés, ou encore s’il existe un soutien à la parentalité. Il faut vérifier ici que le candidat ne va pas trop loin. Une crèche ne doit pas se substituer aux autres services de la mairie.

HA. : Pourquoi les moyens humains affectés comptent-ils pour 50 % de la note technique ?

R.V. : Ils sont essentiels dans une crèche. Il faut s’assurer que l’équipe est bien dimensionnée et que le taux d’encadrement est suffisant. Les personnes qui travaillent avec les enfants sont majoritairement des femmes jeunes en âge de procréer. Lorsqu’elles s’absentent pour s’occuper de leurs petits malades, notamment, l’opérateur doit avoir les moyens d’assurer la relève. S’il a recours à l’intérim, cela coûte cher. Il est donc bon de savoir comment il s’y retrouve financièrement. Et puis, que fait-il si les deux diplômées de l’équipe ou le responsable d’établissement sont malades ?

HA. : Y a-t-il des points à vérifier scrupuleusement ?

R.V. : Souvent, le taux d’encadrement proposé et le pourcentage de diplômés sont bien supérieurs à la réglementation. Or, celui-ci prend en compte les enfants qui marchent et ceux qui ne marchent pas. Le calcul du taux doit se faire par section.

HA. : Quels sont les points que vous auriez pu améliorer dans votre cahier des charges ?

R.V. : Nous aurions dû noter qu’un enfant ne pouvait perdre sa place sans notre accord.

HA. : Où se situe la difficulté dans un tel marché ?

R.V. : Il faut s’assurer que l’opérateur s’efforce de remplir la structure parce que nous assumons le risque financier. Le contrat est d’un an, reconductible trois ans. Un modèle intéressant. Si le taux d’occupation n’est pas bon, on peut exercer une certaine pression.

CONTACT
Olivier Thomas, Chargé des marchés publics à la direction de la famille
Tél. : 01 55 18 46 62
Courriel : [email protected]


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