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Le SRDEII : point sur les élaborations, durée et enjeux

Publié le 20 septembre 2016 à 10h02 - par

Les régions ont jusqu’au 31 décembre 2016 pour adopter le schéma régional de développement économique, d’innovation et d’internationalisation (SRDEII) qui conditionnera la légalité de l’intervention des collectivités territoriales en matière d’aide économique.

Le SRDEII : point sur les élaborations, durée et enjeux

Les enjeux de la force juridique du SRDEII

Le schéma régional de développement économique, instauré par la loi du 13 août 2004 relative aux responsabilités locales était, à l’instar du SRDEII, déjà destiné à coordonner les actions économiques sur le territoire de la région.

Ce schéma, expérimental, n’était pas obligatoire (sans toutefois être dépourvu de force juridique contraignante, puisque son adoption était nécessaire à la prise de compétence par la région de certaines aides par délégation de l’État).

Désormais, le SRDEII, instauré par la loi NOTRe1, est obligatoire, doit définir, à l’échelle régionale, les orientations en matière d’aides aux entreprises, de soutien à l’internationalisation et d’aides à l’investissement immobilier et à l’innovation, ainsi que, de manière plus générale, les orientations relatives à l’attractivité du territoire et s’imposera aux collectivités territoriales et à leurs groupements : « Les actes des collectivités territoriales et de leurs groupements en matière d’aides aux entreprises doivent être compatibles avec le SRDEII. Les actes des métropoles, de la métropole d’Aix-Marseille-Provence et de la métropole de Lyon en matière d’aide aux entreprises doivent être compatibles avec le schéma ou, à défaut d’accord entre la métropole et la région, avec le document d’orientations stratégiques mentionné à l’article L. 4251-15 » (art. L. 4251-17 du Code général des collectivités territoriales « CGCT »).

Tout d’abord, dès lors que le SRDEII entrera en vigueur, tout acte des collectivités territoriales ou de leurs groupements pris en matière d’aide aux entreprises qui ne serait pas « compatible » avec le SRDEII sera illégal, même dans les cas où les collectivités peuvent intervenir de manière autonome (ex : aides en matière d’investissement immobilier et de location immobilière).

Les métropoles disposent d’une marge de manœuvre supérieure puisque, à défaut d’accord entre la région et la métropole, cette dernière élabore son propre document d’orientations qui doit « prendre en compte » le SRDEII (art. L. 4251-15 du CGCT), le législateur ayant pris soin de préciser que le document d’orientation de la métropole « n’autorise pas à définir des aides ou ses propres régimes d’aides (…) » (art. L. 4251-15 CGCT).

Alors que la « conformité » aurait impliqué que le SRDEII soit appliqué sans marge de manœuvre pour les collectivités, la « compatibilité » signifie l’absence de contradiction des actes au SRDEII, les collectivités pouvant préciser et développer les orientations de ce dernier. On peut argumenter que la « prise en compte » laisse en outre la possibilité de s’en écarter « sous le contrôle du juge, pour un motif tiré de l’intérêt de l’opération envisagée et dans la mesure où ce motif le justifie »2.

Dès lors, il appartient aux régions d’élaborer des SRDEII suffisamment exhaustifs pour qu’ils puissent être considérés comme fixant de véritables « orientations » dans les domaines prévus par la loi, sans toutefois prévoir en détail l’ensemble des principes et modalités de mise en œuvre, car sinon les collectivités et leurs groupements seraient contraintes à une véritable mise en « conformité » de leurs actions avec le SRDEII, au-delà donc des exigences de la loi.

Calendrier et modalités d’approbation

Une fois adopté par le conseil régional, le SRDEII doit ensuite être approuvé par arrêté du représentant de l’État. La loi ne fixe pas de délai à l’issue duquel le SRDEII doit avoir été transmis à ce dernier, ni le délai dont il dispose pour approuver le SRDEII (seul un délai de trois mois est prévu pour que la région tienne compte des modifications souhaitées par le représentant de l’État). Le gouvernement a simplement précisé qu’il « est donc de bonne administration que l’approbation intervienne dans des délais raisonnables »3.

En tout état de cause, il appartient aux régions ainsi qu’au représentant de l’État de veiller à optimiser le calendrier d’adoption et d’approbation, car, à notre sens, à compter du 31 décembre 2016, tant que le SRDEII n’est pas approuvé et donc en vigueur, il existe un risque de critique de la légalité des actes des collectivités territoriales et de leurs groupements en matière d’aides économiques.

En effet, l’obligation selon laquelle ces actes doivent être compatibles avec le SRDEII est déjà entrée en vigueur depuis le 1er janvier 2016, son respect pouvant selon nous être invoqué dès le 1er janvier 2017.

Durée du SRDEII

En principe, le SRDEII est adopté dans l’année qui suit le renouvellement général des conseils régionaux (art. L. 4251-14 du CGCT). Dès lors, le SRDEII qui sera adopté avant le 31 décembre 2016 sera valable au maximum jusqu’au 31 décembre 2022.

Toutefois, dans les six mois qui suivent le renouvellement des conseils régionaux, le conseil régional pourra décider de maintenir en vigueur le SRDEII existant. Les effets du SRDEII pourront donc être prorogés jusqu’au prochain renouvellement du conseil régional, sans nécessité de nouvelle approbation par le représentant de l’État (cette dernière étant toutefois requise en cas de révision totale ou partielle du SRDEII, en vertu de l’article L. 4251-19 du CGCT).
 

Sébastien Pinot, associé du cabinet Bignon Lebray


Notes :

1. Loi n° 2015-991 du 7 août 2015, article 2 ayant modifié les articles L. 4251-12 et suivants du CGCT.

2. Conseil d’État, n° 311443, 17 mars 2010

3. Instruction du gouvernement relative à la nouvelle répartition des compétences en matière d’interventions économiques des collectivités territoriales et de leurs groupements issue de l’application de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe)

Auteur :

Sébastien Pinot

Sébastien Pinot

Associé du cabinet Bignon Lebray


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