Prouver sa capacité : le pouvoir adjudicateur ne peut pas tout demander

Publié le 29 janvier 2016 à 18h19 - par

La Cour de justice de l’Union européenne s’illustre à nouveau comme gardienne vigilante des procédures.

Le pouvoir adjudicateur peut imposer aux candidats de rémunérer leurs employés à un salaire minimum

Pour tout comprendre

Le droit communautaire favorise les petites et moyennes entreprises

Les textes communautaires prennent en compte l’objectif tendant à favoriser les petites et moyennes entreprises. C’est ainsi que la directive 2004/18 dispose que, afin de favoriser l’accès de ces dernières aux marchés publics, il convient de prévoir des dispositions en matière de sous-traitance.

C’est pourquoi l’article 47 de cette directive prévoit qu’un opérateur économique peut faire valoir les capacités d’autres entités, « quelle que soit la nature juridique des liens existant entre lui-même et ces entités ». Bien entendu, dans ce cas, il doit prouver au pouvoir adjudicateur qu’il disposera des moyens nécessaires, par exemple, par la production de l’engagement de ces entités à cet effet. Et l’article 44 indique que l’attribution du marché se fait après vérification de la capacité du candidat. Il convient donc de concilier cette possibilité de faire appel à la sous-traitance, et la nécessité de vérifier que le candidat dispose bien du concours de son futur sous-traitant.

A l’occasion d’une saisine préjudicielle, par un juge letton, la cour de justice de l’union européenne a été amenée à préciser quelles obligations le pouvoir adjudicateur pouvait mettre à la charge des candidats (CJUE, 14 janvier 2016, C 234/14).

Pas d’obligation de conclure un contrat de partenariat ou de créer une société en nom collectif

L’autorité locale du département de Talsi a lancé une procédure de passation d’un marché public de travaux pour l’amélioration des infrastructures routières afin de faciliter l’accès à la ville.

Le cahier des charges relatif à cette procédure prévoyait que dans le cas où un soumissionnaire fait valoir les capacités d’autres entrepreneurs, il doit mentionner tous ces entrepreneurs et prouver qu’il disposera des moyens nécessaires. S’il est décidé de conclure avec ce soumissionnaire, celui-ci devra, avant la conclusion du contrat, conclure un accord de partenariat avec ces entrepreneurs et communiquer ledit accord au pouvoir adjudicateur, cet accord pouvant être remplacé par la création d’une société en nom collectif. Le cahier des charges allait encore plus loin puisqu’il exigeait que le contrat contienne une clause de responsabilité solidaire dans l’exécution du marché.

La cour admet tout d’abord que le pouvoir adjudicateur puisse obtenir la preuve de ce que les moyens annoncés seront effectivement à la disposition du soumissionnaire. Mais elle relève que le mode de preuve n’est pas imposé par les textes, et que « le soumissionnaire est libre de choisir, d’une part, la nature juridique des liens qu’il entend établir avec les autres entités dont il fait valoir les capacités aux fins de l’exécution d’un marché déterminé et, d’autre part, le mode de preuve de l’existence de ces liens ».

En conséquence, la cour censure la procédure en indiquant qu’un pouvoir adjudicateur ne peut pas imposer à un soumissionnaire de conclure un accord de partenariat ou de créer avec celles-ci une société en nom collectif.

Laurent Marcovici


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