La Cour des comptes veut faire de l’éducation prioritaire un laboratoire pour le système éducatif

Publié le 31 octobre 2018 à 9h26 - par

Bien qu’elle n’ait pas rempli ses objectifs, la politique d’éducation prioritaire est toujours nécessaire mais doit être modernisée, selon la Cour des comptes. L’occasion d’expérimenter des méthodes pour moderniser l’ensemble du système éducatif.

La Cour des comptes veut faire de l'éducation prioritaire un laboratoire pour le système éducatif

En près de quarante ans, l’éducation prioritaire n’est pas parvenue à améliorer les résultats scolaires. Entre l’éducation prioritaire renforcée (Rep+) et les autres établissements, on relève des écarts proches de 20 % en français et de 35 % en mathématiques, très supérieurs à l’objectif de 10 %, constate la Cour des comptes qui a évalué la politique menée depuis 1981. La Cour souhaitait, à la fois, établir un bilan de la relation coût-efficacité « d’une politique publique ancienne aux effets modestes », et identifier comment l’améliorer, à l’heure où les pouvoirs publics ont décidé de la relancer. L’enquête porte sur la période de scolarité obligatoire (collège et école primaire), mais elle exclut le lycée, qui n’est plus intégré à l’éducation prioritaire, du fait de la segmentation entre voie professionnelle et voie générale et technologique. Elle ne prend pas non plus en compte les dispositifs mis en œuvre par les collectivités.

En dépit de régulières relances de la politique de l’éducation prioritaire, le système éducatif français est toujours considéré comme très déterministe : les résultats des élèves dépend fortement de leur milieu social, économique et culturel. Toutefois, malgré la dégradation de l’environnement économique et social de nombreux territoires, l’éducation prioritaire a adapté son périmètre et multiplié ses modes d’intervention, pour finalement réussir à contenir les résultats scolaires. La Cour constate également que les établissements concernés favorisent l’intégration de la société française, « notamment pour des jeunes qui vivent les effets cumulés de la ségrégation résidentielle et d’une concentration encore plus accusée dans leurs écoles et leurs collèges d’élèves en grande difficulté scolaire ». Autant de raisons de maintenir une politique de l’éducation prioritaire, tout en l’améliorant. La Cour des comptes préconise pour cela six orientations, déclinées en multiples recommandations (cf. encadré), aux effets à moyen et long termes.

L’évolution de l’éducation prioritaire doit passer par l’expérimentation et la différenciation. Selon la Cour des comptes, sa rénovation apparaît aussi comme une chance pour moderniser le système éducatif et mener certaines expériences : assouplissement des conditions de recrutement et de gestion des enseignants, fonctionnement en réseau des établissements, recentrage sur le premier degré. Les établissements de l’éducation prioritaire deviendraient ainsi le laboratoire vivant « de l’école du socle commun de connaissances, de compétences et de culture fondée sur la notion de réseaux réunissant les deux strates de la scolarité obligatoire ».

Rénover la politique d’éducation prioritaire exige en outre de coordonner les actions à différents niveaux. Une action préventive, à long terme, visant à renforcer la mixité sociale et scolaire, permettra de limiter la concentration de publics défavorisés. Un effort ardu et aux effets parfois marginaux, qui passe par l’association de l’Éducation nationale avec les collectivités territoriales et les autres intervenants à la politique de la ville.

 

Marie Gasnier

 

Les trois leviers d’une politique scolaire

Mobilisant 1,4 milliard d’euros (moins de 4 % du budget des écoles et collèges) pour 20 % des élèves scolarisés et 30 % des élèves en difficultés sociales, l’éducation prioritaire a agi sur les trois leviers d’une politique scolaire : la classe, pour améliorer les taux d’encadrement des élèves par les enseignants ; l’enseignant, pour contrer la faible attractivité des postes ; et l’établissement, afin de préserver un climat scolaire propice à l’enseignement.

 

Six pistes d’orientations

  • Fortifier l’autonomie, la responsabilité et l’évaluation des réseaux de l’éducation prioritaire renforcée.
  • Doter l’éducation prioritaire d’outils d’évaluation plus performants.
  • Concentrer l’action publique sur le premier degré, en mobilisant les leviers à fort rendement.
  • Ajuster la gestion des enseignants aux besoins de l’éducation prioritaire.
  • Revoir le processus d’identification des bénéficiaires et réviser les mécanismes d’allocation des ressources.
  • Favoriser la mixité scolaire en renouvelant les mécanismes d’affectation des élèves.

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