À la région Nouvelle-Aquitaine, le congé menstruel est déjà une réalité

Publié le 3 avril 2024 à 11h00 - par

« Je me sens respectée au travail et davantage considérée ». Depuis novembre, vingt femmes ont déjà eu recours au congé menstruel instauré par la région Nouvelle-Aquitaine pour ses agentes, sans attendre l’adoption d’une loi sur ce sujet.

À la région Nouvelle-Aquitaine, le congé menstruel est déjà une réalité
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« Il s’agit d’une expérimentation, on bricole encore un peu. Mais on ne perd rien à progresser sur la  santé de nos agents », affirme Sandrine Derville, vice-présidente du Conseil régional et instigatrice du projet.

L’idée lui est venue au printemps 2023, après la mise en place d’un congé menstruel pour les employées de la ville de Saint-Ouen souffrant de règles douloureuses, une première pour une municipalité, lancée quelques semaines après le vote d’une loi sur ce sujet en Espagne.

Outre Saint-Ouen et la Nouvelle-Aquitaine, la métropole de Lyon a également généralisé l’arrêt de travail en cas de règles douloureuses depuis le 1er octobre 2023. Des entreprises comme Carrefour, Louis Design ou L’Oréal ont aussi lancé des initiatives en l’absence de cadre législatif.

Plusieurs initiatives ont en effet été lancées au Parlement, mais sans aller au bout, à l’image d’une proposition de loi socialiste rejetée en février.

Le ministre de la Santé, Frédéric Valletoux, s’était alors opposé à cette généralisation qui « tourne le dos au dialogue social », évoquant notamment le « risque de discrimination à l’embauche ».

Autorisation spéciale d’absence

« De plus en plus d’entreprises se mobilisent sur ce sujet, c’est aux entreprises de mettre en place le recours au télétravail, mieux impliquer la médecine du travail », face à ce « véritable sujet de santé publique », a-t-il encore plaidé mardi 2 avril 2024 lors des questions aux gouvernement.

Il répondait au député du groupe écologiste Sébastien Peytavie, qui a présenté la semaine dernière une nouvelle proposition de loi pour un « arrêt menstruel sans jour de carence ».

Rejetée mercredi dernier en commission des affaires sociales, l’initiative figure dans la « niche » parlementaire écologiste de jeudi 4 avril à l’Assemblée, qui comprend huit textes, et n’est donc pas sûre d’être examinée.

« On a huit textes, onze heures, c’est difficile de hiérarchiser », a déclaré mardi 2 avril 2024 la présidente du groupe écologiste à l’Assemblée Cyrielle Chatelain. « On a une première victoire, c’est une bataille culturelle. »

« C’est un travail qu’on va continuer très fortement dans les mois qui vont venir, c’est impossible qu’on finisse une mandature sans qu’on ait un arrêt menstruel », a-t-elle ajouté.

Le congé menstruel expérimenté par la région Nouvelle-Aquitaine pendant deux ans prend la forme d’une autorisation spéciale d’absence (ASA) que l’on peut demander pour deux jours par mois maximum.

Sans jour de carence

« C’est le même fonctionnement que pour les jours réservés aux gardes d’un enfant malade », explique Sandrine Derville.

L’agente concernée doit fournir un certificat médical de moins de quatre mois et valable un an pour prouver qu’elle souffre de règles douloureuses ou d’endométriose. Contrairement aux arrêts maladies, il n’y a pas de jour de carence.

« Il s’agit d’une reconnaissance de la société civile sur le sujet », témoigne une employée du siège de la Région, à Bordeaux, atteinte d’endométriose et souhaitant rester anonyme.

« Quand vous vous tordez de douleur et appelez SOS Médecin à 2h00 du matin, il est compliqué d’aller travailler le lendemain. L’adoption du congé menstruel par la région me met du baume au cœur, je me sens reconnue en tant que femme, mais aussi en tant que femme malade », continue-t-elle.

« Chaque année, je prenais six à sept jours de congés parce que je souffrais trop à cause de mes règles ! Je suis heureuse que la région soit précurseure dans ce domaine et de pouvoir disposer de mes jours de congé au même titre que mes collègues masculins, mais j’espère que ce dispositif sera inscrit dans la loi », témoigne une autre agente.

Sandrine Derville souhaite également que l’initiative régionale permettra l’émergence d’un cadre légal : « On peut aussi discriminer une femme à l’embauche parce qu’elle peut tomber enceinte. Le rôle du législateur, c’est précisément de passer des lois qui font avancer la société et éliminent les discriminations », argumente-t-elle.

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